Il est de retour. Ruben Ramchurn, ancien président l'Union démocratique du centre (UDC) d'Yverdon-les-Bains, agitateur public connu loin à la ronde, est réapparu à la stupeur générale lors de la dernière séance de l'organe délibérant de la cité thermale, le 6 juin.
Pourtant, il y a tout juste deux mois, le conseiller communal (législatif), condamné à plusieurs reprises par la justice (l'élu conservateur a à chaque fois fait recours), assurait quitter la politique. Et même la Suisse pour l'île Maurice!
Ce revirement s'explique-t-il par un besoin irrépressible de lumière médiatique? Celui qui a été exclu de sa section par ses ex-camarades durant son absence fuit-il la justice? Le trublion du Nord vaudois n'élude aucune question. Interview cash.
À peine deux mois après avoir annoncé votre exil à l’île Maurice et votre retrait de la politique, vous voilà de retour au Conseil communal d’Yverdon-les-Bains. Le trublion que vous êtes ne supportait pas de ne plus exister médiatiquement?
Non. Pour être honnête, j’avais d’ailleurs bien hésité avant de me présenter au Conseil communal la semaine dernière. Comme mon déménagement définitif n’est pas encore fait et qu’un préavis touchant des commerçants pour lesquels je me suis beaucoup engagé par le passé était à l’ordre du jour, je me suis senti obligé d’honorer mon mandat.
Mais qu’est-ce qui a motivé votre retour en Suisse?
Les dernières heures de vie de ma grand-mère.
Vous avez pu la voir avant son décès?
Oui. J’ai pu passer un moment avec elle et lui dire ce que je voulais lui dire. J’ai d’ailleurs encore toute ma famille et tous mes amis ici. Quoi qu’il arrive, je garderai un lien avec Yverdon et sa région.
Vous comptez bientôt repartir pour de bon?
Je n’ai pas envie de rester très longtemps ici. Ce que je vois ne me plaît pas et j’ai trouvé une certaine sérénité dans ma nouvelle vie. Je n’ai toutefois pas encore pris mon billet de départ. Vous savez, j’ai un gros défaut: je n’aime pas l’injustice et quand je vois de l'injustice, j'ai de la peine à ne pas m'en mêler… Je crois cependant avoir réussi à faire le deuil du besoin de justice. J'arrive à accepter aujourd'hui que la justice ne se fait pas sur cette terre, ou seulement parfois. La vie n'est pas quelque chose de juste.
Qu’est-ce qui vous dérange dans ce que vous voyez ici?
Beaucoup de choses. Par exemple, quand je me promène sur la place d'Armes et que je vois les toxicos et les dealeurs pulluler et désormais avoir à leur disposition un bistrot et des chaises longues, je me dis qu’il est mieux pour moi de retourner à l’île Maurice m’occuper de mes affaires et plonger avec les baleines à bosse.
Vous avez été condamné à plusieurs reprises par la justice, notamment pour calomnie et infraction à la loi fédérale sur les armes, et avez systématiquement fait recours. Vous n’assumez pas vos actes?
C’était par ordonnance pénale et donc totalement à charge. C’est de l’ordre de la plaisanterie. J’ai à chaque fois contesté et je me réjouis de démontrer au tribunal que tout cela ne repose sur rien. Souvenez-vous que les autorités qui m’accusaient dans un premier temps de trafic de drogue ont dû revoir leurs allégations. On m’accuse de tout et de rien, c’est la vie. Certains disent même que j’ai inventé certains de mes diplômes. Je pourrais écrire un livre sur les fausses accusations qui me visent.
Il se murmure aussi que vous êtes dans une situation financière difficile. C’est exact?
La situation de mes affaires n’est pas un élément d’intérêt public. Il est vrai que j’ai beaucoup dû dépenser pour me défendre en justice ces derniers temps et que je cherche des investisseurs pour mener à bien mes projets.
Mais, personnellement, vous avez des dettes?
Notamment envers la justice, oui.
Vos dettes sont importantes?
Je n’ai pas fait le compte et cela dépend de ce qu’on met dedans. Si on parle de l’ensemble de mes dettes, cela inclut des histoires personnelles et difficiles avec la mère de mon fils. Je ne m’étalerai pas là-dessus.
D’après vos publications sur les réseaux sociaux, vous faites beaucoup la fête, de musculation et de plongée quand vous êtes à l’île Maurice. Vous aurez d’autres activités que la musique électronique, l’apnée, la fonte et l’alcool dans le Nord vaudois?
Je ne bois que très peu d’alcool! En principe qu’un jour par semaine. Ici, dans le Nord vaudois, je plonge dans le lac de Neuchâtel ou dans la Thièle. Je fais évidemment toujours de la musculation. Je ne publie pas ce qui est relatif à mes activités professionnelles sur les réseaux sociaux parce que ça n’intéresse ni ne fait rêver personne.
Quelles sont les activités professionnelles que vous évoquez?
Mon projet principal — dans le domaine de l’écologie — s’est affiné et avance. À côté, j’essaie de faciliter des investissements financiers entre l’île Maurice et la Suisse. Comme j’ai beaucoup de contacts des deux côtés, je m’y emploie. C’est aujourd’hui cette dernière activité qui me permet de faire tourner l’ensemble.
Vous êtes optimiste?
J’essaie d’y croire. Ce sont des marchés dans lesquels il y a beaucoup d’avenir. L’île Maurice est un petit Dubaï. On y vit et on y travaille très bien. Dans le fond, pourquoi rester en Europe là où la fiscalité est confiscatoire et où il fait froid?
Ce discours n’est pas contradictoire avec votre engagement à l’Union démocratique du centre (UDC) qui dit œuvrer pour l’économie suisse?
J’ai toujours fait partie de son aile libertarienne. Je vois la Suisse comme le pays champion du commerce international. Mais penser que l’Europe est l’avenir, c’est une erreur de boomer. L’avenir du point de vue économique, c’est l’Inde, l’Afrique, le Moyen-Orient … Je pense que la Suisse s’enferme sur l’Europe alors qu’elle devrait s'ouvrir sur le monde. L’île Maurice est une merveilleuse porte d’entrée sur tous ces nouveaux marchés.
La section yverdonnoise de l’UDC vous a exclu durant votre absence. Vous lui en voulez?
Non, pas du tout. J’étais la bête à abattre et certains membres de mon parti, notamment des entrepreneurs, subissaient une grosse pression de la part de personnes d’autres partis qui leur intimaient de me gicler. Ma section s’est finalement exécutée, avec prétexte qui n’est cependant pas valable.
Ah bon? Vous allez donc vous opposer au vote de votre parti?
Je pourrais recourir. Mais je ne suis pas sûr de vouloir le faire. Grâce à mes anciens collègues, je peux désormais m’asseoir en tant qu’indépendant, juste en face de la Municipalité. C’est l’une des meilleures places.
Pourquoi ne pas être revenu vous défendre lors de l’assemblée générale durant laquelle votre tête a été coupée par vos camarades?
Cette séance tombait presque en même temps qu’un mandat de comparution qui m’invitait à concilier avec des dealeurs, à Yverdon. À vrai dire, je n’avais envie d’assister à aucun de ces événements. Dans tous les cas, j’étais en arrêt maladie.
Peut-on vous demander de quoi vous souffriez?
J’avais des symptômes de la dengue. Heureusement, c’était une fausse alerte.
C’est quoi, les symptômes de la dengue?
Des courbatures, en gros.
Le sportif que vous êtes a peur des quelques courbatures?
C’est vrai que j’ai des symptômes de la dengue tous les jours où je m’entraîne. Mais on ne sait jamais. Et je ne suis pas médecin.