Ce n’est pas seulement depuis la catastrophe de Blatten (VS) que l’on constate combien les effets du dérèglement climatique deviennent de plus en plus visibles en Suisse. Dans les régions alpines en particulier, le réchauffement global se fait sentir de manière marquée. La menace d’une hausse continue des températures se traduit par la fonte perceptible des glaciers locaux.
La Suisse reste encore le principal centre glaciaire de l’Europe continentale. Le pays alpin compte environ 1400 glaciers majestueux, mais leur nombre diminue rapidement. Plus d’un millier de glaciers plus petits ont déjà disparu, comme le rapporte l’agence de presse AP. Une perte douloureuse, et pas seulement pour le tourisme.
Parmi les glaciers les plus visités de Suisse, le glacier du Rhône attire de nombreux visiteurs grâce à sa taille impressionnante. Mais la fonte croissante suscite de grandes inquiétudes quant à son avenir touristique et à sa conservation.
Des températures en hausse et moins de neige
Comment protéger ces géants de glace et quelles conséquences leur disparition entraînera-t-elle pour la Suisse? Blick a posé la question à Lifa Imad, expert et directeur de l’Institut de glaciologie appliquée à la Haute école spécialisée des Grisons.
«Pour que les glaciers survivent, il faudrait qu’ils restent gelés. Cela signifie que la température ne doit pas dépasser zéro degré, même en été. Sinon, la glace fond», explique Lifa Imad en évoquant les étés de plus en plus chauds.
Un autre facteur aggrave la situation: «Quand l’hiver précédent est peu enneigé, la quantité de glace qui fond dépasse celle qui est reconstituée. Les glaciers diminuent donc et reculent», ajoute-t-il. L’hiver dernier, le pays a connu des conditions plutôt douces et un faible enneigement, comme le montrent les bilans météorologiques.
Couverture et neige artificielle
Pour ralentir la fonte des glaciers, une méthode éprouvée consiste à les recouvrir de bâches. «Cette technique existe depuis une vingtaine d’années», précise Lifa Imad. Ces tissus résistent aux UV, isolent et réfléchissent le rayonnement solaire. L’effet protecteur est avéré, cela retarde la fonte et compense un hiver peu enneigé.
Une autre solution étudiée récemment par la Haute école spécialisée des Grisons et d’autres institutions est l’enneigement artificiel. Testée avec succès à Diavolezza, cette méthode vise à isoler les glaciers grâce à la neige produite artificiellement. Mais cette technique n’a pas encore été mise en œuvre à grande échelle.
L'eau potable va-t-elle bientôt manquer?
Nos glaciers sont toutefois bien plus que des lieux appréciés des touristes. Ils sont également une source de vie et d'énergie importante pour la Suisse. Ils fournissent de l'eau potable et de l'irrigation jusqu'au-delà des frontières du pays et assurent la majeure partie de l'approvisionnement en électricité, grâce aux barrages hydrauliques. Alors que se passera-t-il si ces sources glacières se tarissent?
«Selon des estimations, la plupart des glaciers auront disparu d’ici à 2100. Vers 2150, il ne devrait plus en rester un seul», révèle Lifa Imad. Il nuance toutefois: «L’eau de fonte ne s’infiltrera pas entièrement dans le sol, des lacs alpins et des sources pourraient se former. La recharge des nappes phréatiques pourrait aussi continuer à alimenter l’approvisionnement en eau.» Avant de conclure sur une note d’espoir: «Ce serait déjà un progrès de poser dès aujourd’hui les bases pour préserver ces ressources.»