Demander l'asile pour être soigné
Les autorités suisses veulent freiner le tourisme médical géorgien

Le tourisme médical en provenance de la Géorgie coûte des millions aux contribuables suisses. La Confédération a commandé une étude pour réfléchir à des contre-mesures pour freiner le phénomène.
Publié: 26.10.2025 à 06:06 heures
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La médecine de pointe suisse attire des personnes de Géorgie.
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Raphael Rauch

Une femme géorgienne gravement malade prend l'avion pour la Suisse et y dépose une demande d'asile. Pendant que la procédure d'asile est en cours, elle se fait soigner dans les hôpitaux locaux aux frais du contribuable suisse. Des dizaines de cas de ce type ont été révélés ces dernières années.

Une situation qui a incité la Confédération, en collaboration avec l'Autriche, à commander une étude à l'Organisation internationale pour les migrations (OIM). Nous avons pu consulter les résultats grâce à la loi sur la transparence.

Encourager le retour des Géorgiens

Selon les analyses de l'OIM, le tourisme médical a baissé en 2023 et 2024, mais le phénomène existe toujours en Suisse au vu de son système de santé performant. Bien que le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) classe fréquemment les demandes d'asile géorgiennes comme infondées, les problèmes médicaux de nombreux requérants d'asile complexifient la situation.

D'un côté, la Suisse souhaite respecter les principes humanitaires et offrir des prestations de santé aux demandeurs d'asile, mais d'un autre côté, la Confédération refuse de rester les bras croisés face à ce qu'elle considère être une exploitation du système d'asile à des fins médicales.

L'étude de l'OIM propose des solutions ciblées pour aider au retour et à la réintégration des personnes ayant fui la Géorgie pour des raisons médicales: la Confédération doit encourager leur départ et leur retour volontaires via des mesures d'accompagnement médical. Les auteurs estiment que si la prise en charge sanitaire des demandeurs d'asile est garantie dans leur pays d'origine, ils pourraient davantage être incités à y retourner.

Des lacunes dans l'approvisionnement

L'étude se penche aussi sur les causes du tourisme médical. Parmi elles, les lacunes dans l'approvisionnement médical en Géorgie, surtout en ce qui concerne les traitements spécialisés et des médicaments spécifiques. C'est pourquoi l'OIM recommande d'élargir la couverture de l'assurance maladie et de réduire les paiements supplémentaires particulièrement élevés.

Les auteurs de l'étude proposent également de développer des centres de traitement spécialisés dotés d'un équipement moderne en Géorgie. Par ailleurs, des formations continues ciblées doivent permettre d'améliorer la qualité des traitements et renforcer la confiance de la population locale.

Un problème de confiance

Le système de santé géorgien souffre aussi d'une mauvaise image. De nombreux Géorgiens se sentent obligés de partir à cause d'un manque d'informations, bien que le pays offre de bonnes prestations médicales dans certains domaines. Selon l'étude, des informations précises sur le fonctionnement du système de santé géorgien, ainsi qu'une meilleure communication entre médecins et patients pourraient améliorer la situation.

L'étude suggère aussi la mise en place d'une stratégie nationale pour les personnes souffrant de maladies chroniques. En cas de cancer, mais aussi de maladies rares, la Géorgie n'est pas suffisamment équipée pour y faire face. Le système de santé local doit trouver des solutions, en s'appuyant sur la télémédecine par exemple. Des médecins européens pourraient aider à distance avec des diagnostics et des conseils thérapeutiques, des programmes d'échange, des projets communs et du coaching. 

Le lobby pharmaceutique pointé du doigt

Les auteurs de l'étude critiquent vivement le secteur pharmaceutique. Ils estiment que certaines entreprises entravent l'accès à des médicaments bon marché et de bonne qualité. Ils recommandent donc des mesures pour ouvrir le marché et contrôler les prix des médicaments.

Le Secrétariat d'Etat aux migrations salue les recommandations de l'OIM. Elles «identifient aussi bien les lacunes du système de santé géorgien que les défis liés aux demandes d'asile pour raisons médicales pour les pays d'accueil». Et d'ajouter: «Nous avions recommandé de définir des mesures concrètes réalisables à court ou moyen terme. Nous avions souligné l'importance d'agir également sur la perception qu'ont les citoyens géorgiens de leur système de santé».

Des demandes d'asile géorgiennes en baisse

En 2023, 104 personnes venues de Géorgie ont été expulsées de Suisse, contre 94 en 2024 et 84 jusqu'à présent en 2025. A noter qu'il y a aussi eu des départs volontaires. Selon les chiffres de 2025, 128 Géorgiens ont jusqu'à présent quitté la Suisse. 

Le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), via son ambassadrice en Géorgie, est d'ailleurs intervenu à ce sujet. «Après l'intervention de l'ambassadrice Heidi Grau en octobre 2024, un échange d'informations constructif a pu être établi avec le ministère local de la Santé. Les demandes d'asile en provenance de Géorgie ont nettement diminué en 2025», avance le DFAE. 

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