La conseillère fédérale socialiste Elisabeth Baume-Schneider travaille d'arrache-pied sur la prochaine grande réforme de l'AVS en 2030. Son objectif: surmonter la vague de départs à la retraite de la génération des baby-boomers grâce à des recettes supplémentaires. Elle n'entend toutefois pas toucher à ce stade à l’âge de départ à la retraite. Un choix qui fait vivement réagir le PLR.
Le parti met en garde contre des coûts supplémentaires d'environ 3000 francs par ménage et lance une pétition contre cette «attaque contre la classe moyenne». Le président du Parti libéral-radical, Thierry Burkart, justifie cette démarche dans une interview accordée à Blick.
Thierry Burkart, le PLR s'en prend violemment à la réforme de l'AVS 2030. Qu'est-ce qui vous irrite à ce point?
La conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider a choisi la voie la plus simple et en même temps la plus dommageable. Des cotisations supplémentaires réduisent le pouvoir d’achat et une TVA plus élevée renchérit les achats quotidiens. Une fois de plus, ce sont les travailleurs qui en feront les frais. La réforme coûtera à chaque ménage environ 3000 francs par an. La classe moyenne et les PME seront massivement affaiblies.
3000 francs? N'est-ce pas un peu exagéré?
Le déficit structurel s'élèvera à environ 3 milliards de francs dans les années 2030, la 13e rente AVS coûtera 5 milliards et la suppression du plafond pour les couples mariés envisagée par la Commission de la sécurité sociale du Conseil des Etats sans suppression simultanée des avantages matrimoniaux coûtera près de 4 milliards. Soit 12 bons milliards! Ce serait l’équivalent d’environ 3000 francs par ménage. A un moment donné, ça suffit!
Votre pétition demande un «assainissement durable et réaliste». Mais augmenter uniquement l'âge de la retraite n'est pas très réaliste.
Nous sommes ouverts au compromis. Mais le Conseil fédéral n'a pas tenu sa parole! Lors de la campagne de votation sur l'initiative concernant les retraites, il a promis de miser également sur des mesures structurelles lors de la prochaine réforme. Il estimait qu’un relèvement de l’âge de la retraite était justifié. Aujourd'hui, il ne veut plus en entendre parler.
Au Conseil fédéral, les partis bourgeois tiennent une majorité de 5 contre 2 contre la gauche. C'est entre vos mains...
Je ne sais pas ce qui s'est passé au Conseil fédéral. Mais ce qui est frappant, c'est que nous sommes le seul parti à lutter avec véhémence contre les charges supplémentaires constantes imposées à la classe moyenne. L'Union démocratique du centre (UDC) se tait parce qu'au final, ils votent avec la gauche sur les questions de politique sociale, et pas seulement sur l'extension non financée des rentes. Et le Centre a depuis longtemps abandonné la droite en matière de politique sociale. Avec sa propre initiative d'extension, il est pris dans le piège de l'AVS et pactise donc avec la gauche.
Sans recettes supplémentaires, la vague de départs à la retraite des baby-boomers ne pourra pas être maîtrisée. Quel est donc votre compromis?
Nous ne soutiendrons pas une réforme menée unilatéralement aux dépens de la classe moyenne qui travaille et qui ne contient pas de mesures structurelles. L'initiative sur les retraites a été rejetée pour deux raisons: d'une part parce qu'elle prévoyait une généralisation et ne faisait aucune exception pour les professions physiquement pénibles. Nous allons tenir compte de cette critique lors d'une nouvelle proposition. D'autre part, il faut une augmentation modérée de l'âge de la retraite. Vivre toujours plus vieux sans travailler plus longtemps est une illusion.
Par quel moyen souhaitez-vous agir sur les recettes?
Nous ne voulons pas d'augmentation d'impôts. Nous parlerons de recettes supplémentaires pour financer la 13e rente AVS uniquement si c'est la seule solution. Nous nous opposerons à toute nouvelle extension des cotisations AVS au détriment de la classe moyenne et des PME. Nous soutenons la suppression du plafond pour les couples mariés si elle s'accompagne de la suppression des avantages actuels pour les couples mariés et qu'elle est donc neutre en termes de coûts. En d'autres termes, nous prônons une véritable équité.
La gauche souhaite un impôt sur les successions, le Centre une taxe sur les transactions financières en faveur de l'AVS. Pourquoi ne pas y contribuer?
Nous rejetons les nouveaux instruments fiscaux. La taxe sur les transactions financières n'est de toute façon qu'un rideau de fumée du Centre et n'est pas réalisable. Un récent rapport du Conseil fédéral l'a confirmé.
La réforme de l'AVS 2030 risque d'être bloquée. Un grand coup de balai, comme en 1948 sous l'égide de Walther Stampfli, alors conseiller fédéral PLR, ne semble plus possible.
Les pères fondateurs de l'AVS auraient également refusé une réforme aussi unilatérale. L'AVS n'a pas pour vocation de réaliser les fantasmes de redistribution de la gauche et des Vert-e-s. Elle a été conçue à l'époque sur la base d'une espérance de vie nettement plus faible et maintenue en équilibre. Le PLR perpétue cet héritage responsable.
Outre l'AVS, l'accord avec l'UE et les mesures d'accompagnement de politique intérieure font couler beaucoup d'encre. Êtes-vous satisfait de la manière dont le dossier est géré?
C'est justement en période de grande incertitude que nous voulons une relation stable à long terme avec l'UE. C'est pourquoi nous rejetons catégoriquement l'initiative des 10 millions de l'UDC. Notre parti définira sa position sur les Bilatérales III en octobre lors de son assemblée des délégués. Je m'en tiendrai à ce processus.