Jan Jenisch, président du conseil d'administration de Holcim, a reçu l'an dernier 48 millions de francs selon Ethos, fondation spécialisée dans les investissements durables. Ce montant comprend également son salaire en tant que CEO de l'entreprise de production de matériaux de construction. Il a occupé ce poste jusqu'en avril 2024.
Pourtant, dans son rapport annuel, Holcim a indiqué un salaire de 5,1 millions de francs. Selon Ethos, les actions et les options sur actions constituent la raison principale de cette différence élevée. Certaines actions datant de mars 2020 vaudraient aujourd'hui 36,6 millions de francs après une période de performance de quatre ans, de 2020 à 2024.
Un porte-parole de Holcim rejette les calculs d'Ethos. «La valeur de ce programme d'options a été mal compris par Ethos, car il s'agit d'un programme quinquennal qui reflète la performance record sur une période de cinq ans et ne constitue pas une rémunération annuelle», a-t-il déclaré à l'agence de presse AWP. Ce cas montre toutefois que les CEO et les membres du conseil d'administration suisses gagnent souvent beaucoup plus au fil des ans grâce à leurs actions que ce qui est indiqué dans les rapports annuels des entreprises.
La direction d'UBS gagne nettement plus
En effet, les entreprises évaluent souvent les actions et les options dans le cadre de la rémunération variable à une valeur nettement inférieure à celle du marché. Comme ces détentions d'actions sont généralement bloqués pour plusieurs années, leur valeur est parfois X fois plus élevée en cas de hausse du cours de l'action. Ainsi, le CEO d'UBS Sergio Ermotti a reçu 14,4 millions de francs en 2023 pour neuf mois de travail. Mais si les actions comprises dans le package de rémunération avaient été évaluées à leur valeur réelle, le montant aurait atteint 18,4 millions de francs, selon Ethos.
Ethos avait notamment critiqué le fait que les actions avaient été évaluées de manière totalement arbitraire à seulement 50% de leur valeur le jour de l'attribution. L'année précédente, elles auraient tout de même été prises en compte dans la rémunération à hauteur de 71,5% de leur cours par une société indépendante. C'est pourquoi la rémunération des membres de la direction qui recevront ces actions dans quelques années devrait faire grimper leurs salaires bien au-delà des chiffres du rapport annuel.
Pour l'année 2024, Sergio Ermotti a reçu un salaire annuel de 14,9 millions de francs. Une rémunération nettement plus élevée était attendue, les médias ont donc fait l'éloge du patron de l'UBS. Les salaires élevés dans les banques sont également un sujet de débat au Parlement. L'UBS a donc évité de jeter de l'huile sur le feu avec le réelle salaire de Sergio Ermotti. En effet, selon Ethos, la banque n'a pas révélé la valeur de marché de l'attribution d'actions orientée sur le long terme.
Chez Roche, les salaires des dirigeants sont aussi sous-évalués
Le président du conseil d'administration de Roche, Severin Schwan, bénéficie lui aussi d'une sous-évaluation de son portefeuille d'actions. Sur ses 5,7 millions de francs pour l'année 2024, près de deux millions concernent des actions qui n'ont été évaluées qu'à 55,8% de leur valeur de marché, comme on peut le lire dans le rapport annuel. Sans cela, sa rémunération aurait été supérieure d'environ 1,5 million de francs. Severin Schwan a été CEO de Roche pendant 15 ans et détient des actions du groupe d'une valeur de 65 millions de francs ainsi que d'énormes quantités d'options datant de l'époque où il était CEO.
Son successeur, le CEO Thomas Schinecker, a reçu l'année dernière 10 millions de francs. Ce montant comprend entre autres des actions bloquées sur dix ans pour 744'000 francs, qui ont été sous-évaluées de près de 600'000 francs. Ses options sur actions ont également été évaluées à un niveau inférieur d'environ 800'000 francs. Dans son rapport, Roche justifie l'évaluation par le fait que les actions sont bloquées pour dix ans, ce qui équivaut à une dépréciation de valeur.
Le géant suisse de l'alimentation Nestlé se montre plus transparent à ce sujet. Le CEO Mark Schneider y a reçu 9,6 millions de francs jusqu'à son départ fin août 2024. Les paquets d'actions distribués à la direction sont pris en compte dans la rémunération à leur valeur de marché.
Le plus gros salaire suisse, le CEO de Novartis Vas Narasimhan, a reçu 19,2 millions de francs pour l'année. Selon le rapport annuel, son important portefeuille d'actions a été évalué à la valeur du marché.