Donald Trump a demandé jeudi à la Cour suprême de lui permettre de révoquer sans attendre une gouverneure de la banque centrale des Etats-Unis. Cette affaire est vue comme une mise à l'épreuve de l'indépendance de l'institution.
Le président américain attend des juges qu'ils disent qu'il a le pouvoir de limoger Lisa Cook, une des plus hautes responsables de la Réserve fédérale (Fed), sans attendre que le recours que celle-ci a intenté soit tranché sur le fond. Après des revers en première instance et en appel, la Maison Blanche avait prévenu qu'elle porterait l'affaire devant la Cour suprême, dont le président a cimenté la majorité conservatrice pendant son premier mandat.
Première femme noire à la Fed
Donald Trump avait publié fin août une lettre dans le but de renvoyer Mme Cook avec «effet immédiat». Il l'accuse d'avoir menti à des banques lors de demandes de prêts immobiliers personnels, en présentant deux logements comme des résidences principales.
Première femme noire gouverneure de la Fed, nommée sous le démocrate Joe Biden, Lisa Cook a immédiatement porté l'affaire devant la justice pour rester en place. S'en est suivie une course contre la montre, l'exécutif ayant tenté de l'empêcher de participer à la réunion de politique monétaire qui s'est tenue mardi et mercredi.
«Motif valable»?
L'affaire pose la question des limites du pouvoir présidentiel à l'égard d'une institution censée fixer les taux d'intérêt à l'abri des ingérences et alternances politiques. Les mandats des gouverneurs sont ainsi volontairement longs (14 ans) – celui de Mme Cook court jusqu'en 2038.
La loi précise que le président peut révoquer un gouverneur en cas de «motif valable», une expression que la jurisprudence associe généralement à la démonstration de l'existence de fautes graves ou de malversations. Dans le cas de Lisa Cook, une enquête a été ouverte par le ministère de la Justice, mais elle n'a pas été inculpée. Et Mme Cook semble en train de réunir des documents pour attester qu'une banque savait qu'un des logements ne serait pas sa résidence principale.
Dans la saisine de la Cour suprême, les avocats de Donald Trump affirment que la loi «autorise le président à révoquer des membres du conseil des gouverneurs 'pour motif valable', sans restreindre les types de motifs admissibles».
Les avocats de Mme Cook considèrent que la question des prêts immobiliers est un «prétexte» pour libérer un siège au sommet de la Fed, où Donald Trump pourra placer un fidèle. Selon les arguments qu'ils avaient portés devant la cour d'appel, si aucune limite n'est posée au pouvoir du président, «rien ne l'empêchera de renvoyer d'autres membres du conseil sous des prétextes tout aussi fallacieux» et «l'ère d'une Fed indépendante serait révolue».