Intimidation «sans précédent»
Trump accusé de violentes menaces pour bloquer un accord climatique

Sous la pression de Washington, un accord mondial visant à taxer les émissions des cargos a échoué. Selon de nouveaux témoignages, l’administration Trump aurait mené une véritable campagne d’intimidation contre des pays favorables au plan, allant jusqu’à les menacer.
Publié: 05:41 heures
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Dernière mise à jour: il y a 59 minutes
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L'administration Trump aurait mené une brutale campagne d'intimidation afin de faire capoter un accord sur la pollution maritime.
Photo: keystone-sda.ch
Léa Perrin
Léa PerrinJournaliste Blick

A la veille du sommet mondial COP30, Trump est sous le feu des critiques pour sa position sur le changement climatique. Au-delà de son inaction très mal perçue par de nombreux pays, de nouvelles révélations éclatent sur la façon dont il aurait fait capoter un important accord sur la taxation des émissions maritimes en octobre dernier. Quelques semaines après les faits, des diplomates et dirigeants sortent de l'ombre pour dénoncer de graves menaces, révèle le «New York Times», ce jeudi 6 novembre. 

Alors que plus d’une centaine de pays s’apprêtaient à valider un accord historique pour réduire la pollution des cargos, un incroyable retournement de situation a bouleversé les négociations. A l'origine de ce changement de cap: une offensive américaine d'une rare brutalité. L’administration Trump aurait lancé une campagne d’intimidation «sans précédent» afin de torpiller le projet, selon neuf diplomates impliqués.

Des menaces inédites

Des responsables de plusieurs pays – sous couvert d'anonymat par crainte de représailles – ont fait état d'une liste de menaces inédites. Un ambassadeur philippin aurait été prévenu que les marins de son pays ne pourraient plus accoster dans les ports américains s’il soutenait le texte. Des diplomates caribéens, choqués, auraient été prévenus qu’ils risquaient d’être black-listés et privés d’entrée aux Etats-Unis.

Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio aurait joué un rôle central dans cette opération d'intimidation. Il aurait personnellement contacté plusieurs capitales du monde pour avertir que des sanctions financières ou douanières frapperaient ceux qui continueraient à défendre la mesure. D'autres menaces, plus voilées, promettaient notamment des retraits de visas ou des hausses de droits portuaires. 

«Brutalité diplomatique» envers l'Europe

Ces pressions, soutenues par l’Arabie saoudite, visaient surtout les pays les plus vulnérables, ou les pays économiquement dépendants de Washington. Certaines délégations, dont des pays européens, auraient même été convoquées à l’ambassade américaine à Londres. «Personne n’avait jamais vu une telle brutalité diplomatique», résume un négociateur européen. L’Europe, à l’origine du projet de taxe sur les émissions maritimes, se retrouve ainsi en première ligne.

L’accord en question, négocié depuis des années sous l’égide de l’Organisation maritime internationale (OMI), prévoyait une taxe sur les émissions des navires les plus polluants afin d’inciter l’industrie à adopter des carburants plus propres. Ce dispositif devait constituer la première taxe carbone mondiale pour le transport maritime, un secteur responsable d’environ 3% des émissions planétaires de gaz à effet de serre. La plupart des pays étaient prêts à voter en faveur de ce plan.

Après cette campagne de pression, le vote prévu à Londres a basculé: le 17 octobre, les Etats membres ont repoussé la décision d’un an, par 57 voix contre 49, enterrant de fait la mesure. Certains Etats européens, comme la Grèce et Chypre, plus proches des intérêts des armateurs, se seraient finalement abstenus.

La Maison Blanche nie les faits

Interrogé par les médias américains, le gouvernement américain a nié toute intimidation. «Le président Trump a été clair: les Etats-Unis ne participeront à aucun accord climatique international qui ne sert pas les intérêts du peuple américain», a déclaré une porte-parole de la Maison Blanche. Chris Wright, secrétaire à l’Energie, a reconnu avoir appelé «une vingtaine de pays» et rédigé le message que Donald Trump a ensuite publié sur les réseaux sociaux.

Pour David Goldwyn, ancien diplomate américain, ces méthodes sont «disproportionnées». Si l'aversion de Trump pour les actions de lutte contre le réchauffement climatique est connue, le recours à l'intimidation personnelle, s'il est avéré, est un phénomène nouveau pour le gouvernement américain, et pourrait enfreindre les conventions diplomatiques.

Une COP30 sans Etats-Unis

D’autres observateurs estiment que ces pratiques risquent d’éroder la confiance envers les Etats-Unis dans les négociations climatiques à venir. Une tendance qui se dessine déjà, à quelques jours seulement du sommet COP30 au Brésil qui démarrera lundi 10 novembre.

Le président américain, qui n'assiste pas à la réunion dans la ville amazonienne de Belém, a été traité de menteur par les dirigeants de la Colombie et du Chili pour son rejet de la science du climat, rapporte la «BBC», ce vendredi 7 novembre. L'absence des Etats-Unis à un sommet de négociations sur le climat mené par l'ONU est une première depuis 30 ans. 

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