Un pilote livre son point de vue sur le drame
L'équipage d'Air India a-t-il commis une erreur fatale avant le crash meurtrier?

La deuxième boîte noire de l'avion d'Air India, qui s'est écrasé jeudi en Inde, vient d'être retrouvée. Une découverte qui devrait permettre d'en savoir plus sur les causes du drame. Alwin Machole, un pilote, suppose que «quelque chose a mal tourné dans le cockpit».
Publié: 11:45 heures
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Dernière mise à jour: 12:32 heures
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Le 12 juin, le vol 171 d'Air India s'est écrasé peu après le décollage.
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Janine Enderli

Jeudi dernier, 242 personnes ont embarqué à Ahmedabad à bord d’un Boeing 787-8 d’Air India à destination de Londres. Mais moins de 40 secondes après le décollage, l’avion s’est écrasé sur un quartier résidentiel. Tous les passagers, à l'exception d'un seul, ont péri. Depuis, une question obsède les enquêteurs: que s’est-il passé? Bien que de nombreuses hypothèses circulent, les causes exactes du drame demeurent inconnues. Un pilote ayant longtemps exercé en Inde livre son point de vue à Blick.

«Quelque chose a mal tourné»

«De mon point de vue, quelque chose a mal tourné dans le cockpit», déclare Alwin Machold à Blick. Cet Allemand exerce depuis plus de 30 ans, il a travaillé pour des compagnies aériennes du monde entier et se dit profondément ému par le drame d'Air India.

«Avec plusieurs collègues et contrôleurs aériens, nous avons analysé les vidéos du crash», explique-t-il. Un détail les a immédiatement marqués: «Les volets n'étaient pas déployés au moment du crash. Le train d'atterrissage, en revanche, était sorti.» Or, cela devrait être l'inverse, souligne Alwin Machold. Il soupçonne une erreur de manipulation dans le cockpit : «Le copilote a probablement confondu les leviers. C’est une erreur tragique.»

Une formation courte et beaucoup de pression

Selon la direction générale de l'aviation civile indienne, l'avion était piloté par le capitaine Sumeet Sabharval, 60 ans. Ce dernier avait plus de 8000 heures de vol à son actif et était considéré comme expérimenté. Il était assisté par Clive Kundar, un jeune pilote 32 ans, qui avait volé à peine plus de mille heures. «C'est très peu pour un pilote de jet long-courrier, cela correspond à moins d'un an d'expérience de vol et de travail», explique Alwin Machold.

Le pilote allemand connaît bien le secteur de l’aviation en Inde. Il y a travaillé comme pilote pendant cinq ans et en maîtrise les rouages. «Ce qui m’a frappé, c’est la volonté du secteur de se développer très rapidement», observe-t-il.

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Aujourd’hui, il y a un manque de personnel dans les cockpits. La pression sur les jeunes recrues est énorme, alors que leur niveau d’expérience est relativement faible
Alwin Machold, pilote
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Sur le plan technique, les avancées sont réelles, mais la formation reste un point critique. «Avec la crise du Covid, presque tous les pilotes étrangers ont été licenciés. Aujourd’hui, il y a un manque de personnel dans les cockpits. La pression sur les jeunes recrues est énorme, alors que leur niveau d’expérience est relativement faible.»

Gare aux conclusions hâtives

Le pilote précise que ses déclarations ne permettent pas de tirer des conclusions directes sur l'équipage du vol 171. Il constate toutefois des similitudes avec des schémas observés lors d’incidents passés. «Un accident aussi tragique n'arrive pas comme ça. Des éléments tels que la culture d'entreprise, la communication et la mentalité jouent un rôle important. Se contenter d'accuser le pilote d'une erreur humaine n'est pas suffisant», clame-t-il.

Il ne s'agit toutefois que de spéculations, les boîtes noires n'ayant pas encore livré leurs secrets. De nombreux experts de l'aviation ont d'ores et déjà mis en garde contre toute tentation de tirer des conclusions trop hâtives.

De nombreuses questions en suspens

Une autre hypothèse fait état de problèmes techniques auxquels auraient été confrontés les pilotes dans le cockpit, comme une panne simultanée des deux moteurs. C’est ce qu'avance Steve Scheibner, expert américain en aéronautique. Selon lui, une nouvelle vidéo laisse penser que la turbine à air de secours (RAT) se serait déployée peu après le décollage.

En général, cette turbine ne s’active que lorsque les systèmes vitaux de l’appareil doivent être alimentés en électricité, notamment en cas de défaillance majeure. «On peut apercevoir une bosse sur le ventre de l'avion et, juste en dessous, un petit point gris. C'est la RAT.» Or, celle-ci n’est pas absolument pas conçue pour fournir toute la puissance nécessaire à un avion volant à seulement 120 ou 150 mètres d’altitude.

Les deux boîtes noires permettront, espérons-le, de faire la lumière sur les événements. La première – le «Cockpit Voice Recorder» – capte tous les sons dans le cockpit, y compris les échanges entre les pilotes. La seconde – le «Flight Data Recorder» – enregistre des centaines de paramètres liés aux moteurs, aux commandes de vol ou encore à la position des volets. Les prochains jours pourraient enfin apporter des réponses aux nombreuses questions en suspens.

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