Après l'opération «Toile d'araignée», au cours de laquelle plusieurs avions russes ont été endommagés ou détruits, l'Ukraine ne s'est pas arrêtée là. Mardi, une détonation a résonné à 4h44, ébranlant le pont de Kertch. Egalement appelé pont de Crimée, il relie la péninsule ukrainienne occupée par la Russie au continent.
Selon les services secrets ukrainiens (SBU), un pilier aurait été endommagé par l'explosion sous-marine. «Dans les faits, le pont risque de s'effondrer», affirme le SBU. Malgré les risques, la Russie a décidé de rouvrir le pont à la circulation.
Des mois durant, 1100 kilogrammes d'explosifs, du TNT, ont été placés sous le pont. Interrogé par Blick, l'analyste militaire britannique H. I. Sutton pense qu'il est possible que la charge explosive ait été placée grâce à un seul drone sous-marin. «Déplacer 1000 kg sous l'eau est très différent que de le faire dans les airs», explique l'expert en guerre maritime. Une opération loin d'être facile. Mais il est également possible que de nombreuses ogives aient été déposées.
Des drones Toloka TLK utilisés?
«Les Ukrainiens ont une nouvelle fois démontré leur incroyable capacité à planifier des missions», estime H. I. Sutton. «Cette attaque a probablement nécessité de nouvelles technologies et de nouveaux véhicules qui ont dû être développés et testés en amont.»
Un – ou plusieurs – drones sous-marins de type Toloka TLK ont peut-être été utilisés. Ces véhicules aquatiques sans pilote ont été présentés pour la première fois en avril 2023 et n'ont cessé d'être améliorés depuis. Le Toloka TLK est produit en trois tailles différentes. Le modèle 1000, d'une taille de 4 à 12 mètres, est la plus grande variante. Il peut porter une ogive pesant jusqu'à 5 tonnes. Et ce, avec une portée pouvant atteindre 2000 kilomètres. Les deux modèles plus petits, le TLK 400 et le TLK 150, ont des ogives de 500 et 50 kilos. Il semble donc possible qu'un Toloka TLK 1000, ou alors plusieurs petits drones sous-marins, aient été utilisés pour détruire le pont.
Pour l'instant, l'information n'a pas été confirmée et l'expert maritime ne veut pas tirer de conclusions hâtives. Mais cette théorie pourrait se tenir. Car ce n'est qu'au printemps dernier que Volodymyr Zelensky a présenté des modèles révisés des petits drones Toloka, face à des chefs d'Etat et gouvernements alliés.
Comment la Russie protège le pont de Crimée
Par ailleurs, des médias russes et ukrainiens ont évoqué l’éventuelle utilisation d’un drone sous-marin nommé «Maritchka» lors de l’attaque. Ce dispositif a été conçu et testé par une équipe de volontaires ukrainiens. Ce drone de six mètres de long a été conçu pour détruire des ponts, des fortifications côtières, des navires et même des sous-marins. H. I. Sutton l'a présenté à l'été 2023 sur son blog «Covert Shores», comme «le premier au monde à être directement issu des besoins de la guerre».
Endommager le pont de Crimée est un véritable défi, selon l'expert. «La Russie a mis en place d'importantes défenses, qui englobent des systèmes de surveillance pour détecter les attaques, des patrouilles pour intercepter les bateaux, des barges ancrées, des filets et des clôtures, ainsi que des défenses aériennes. En général, ces défenses sont une réponse à la dernière attaque», explique-t-il. Au fil du temps, l'Ukraine a fait preuve d'ingéniosité pour détourner ces défenses, ajoute l'expert. «Avec le temps, cela deviendra juste plus difficile.»
S'agissait-il alors de la dernière attaque contre l'une des principales lignes d'approvisionnement russes? H. I. Sutton estime que non. «On peut supposer que l’Ukraine dispose de plusieurs plans pour détruire le pont de Kertch», affirme-t-il.