Les scientifiques sceptiques
Trump fait un lien douteux entre le paracétamol et l'autisme

Le président américain Donald Trump a fortement déconseillé le paracétamol aux femmes enceintes, l'associant à un risque accru d'autisme. Ces propos controversés sont condamnés par des spécialistes, qui soulignent le manque de preuves scientifiques solides.
Publié: 04:35 heures
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Donald Trump s'est exprimé sur l'autisme, lundi à la Maison Blanche.
Photo: FRANCIS CHUNG / POOL
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ATS Agence télégraphique suisse

Le président américain Donald Trump a fortement déconseillé lundi le paracétamol aux femmes enceintes, assurant qu'il était «peut-être associé à un risque très accru d'autisme», des propos condamnés par des spécialistes de ce trouble neurodéveloppemental complexe. «N'en prenez pas», «n'en donnez pas à votre bébé», a lancé le républicain lors d'une conférence de presse à la Maison Blanche dédiée à l'autisme, l'un de ses grands sujets de préoccupation.

«Selon une rumeur – et j'ignore si c'est le cas – ils n'ont pas de paracétamol à Cuba car ils n'ont pas de quoi s'offrir de paracétamol. Eh bien ils n'ont quasiment pas d'autisme», a lancé le président. Présent dans des antalgiques très largement utilisés comme le doliprane, le dafalgan ou encore le tylenol (aux Etats-Unis ou au Canada), le paracétamol ou acétaminophène est recommandé aux femmes enceintes contre la douleur ou la fièvre.

D'autres médicaments comme l'aspirine ou l'ibuprofène sont eux contre-indiqués, notamment en fin de grossesse. Lier le paracétamol à l'autisme serait «très irresponsable et potentiellement dangereux», avaient prévenu début septembre des dizaines de scientifiques américains spécialistes de l'autisme alors que le «Wall Street Journal» avait évoqué cette piste.

La science «bien plus nuancée»

«La science est bien plus nuancée et incertaine», avaient-ils insisté, prévenant qu'une telle annonce sèmerait «confusion et peur». La question d'un lien entre la prise de paracétamol lors d'une grossesse et les troubles du neurodéveloppement chez l'enfant n'a en effet «rien de nouveau», relève pour l'AFP David Mandell, professeur en psychiatrie à l'université de Pennsylvanie.

De nombreuses études ont été menées sur le sujet, avec des résultats divergents. Une vaste étude menée sur plus de 2 millions d'enfants et publiée en 2024 dans la prestigieuse revue médicale Jama avait ainsi écarté ce risque. Mais cet été, une analyse de précédentes études a abouti à une conclusion inverse, ses auteurs prévenant toutefois que des études supplémentaires étaient nécessaires pour confirmer un lien possible.

L'une des difficultés rencontrées par les chercheurs vient du fait qu'il est difficile de distinguer les effets de la prise de ce médicament des raisons pour lesquelles il est pris, explique David Mandell. «On sait que la fièvre (...) peut augmenter le risque de retard et de troubles du développement neurologique», pointe-t-il. «Il faut donc être très prudent lorsqu'on essaie de déterminer lequel de ces deux facteurs est responsable de l'augmentation du risque d'autisme.»

Un traitement contre l'autisme promu

L'administration Trump a également promu lundi la prise d'acide folinique comme traitement potentiel contre certaines formes d'autisme, une piste prometteuse mais qui nécessite davantage de recherche selon des experts. L'autisme est un trouble complexe au spectre très large dont l'origine est étudiée depuis des décennies.

Si la génétique joue un rôle important, des facteurs environnementaux ont également été mis en avant, comme la neuro-inflammation ou la prise de certains médicaments comme l'anti-épileptique dépakine durant la grossesse. Le ministre américain de la Santé Robert Kennedy Jr. avait promis de déterminer les causes de ce qu'il qualifie d'«épidémie d'autisme» avant la fin du mois.

Un engagement qui avait inquiété les experts en raison de la complexité du sujet et des positions du ministre, qui s'est notamment fait le relais de fausses théories liant autisme et vaccins. Si les cas d'autisme ont augmenté ces dernières décennies aux Etats-Unis, nombre de scientifiques rejettent l'existence d'une épidémie, mettant en exergue les améliorations des diagnostics.

Trump ne veut pas de vaccin contre l'hépatite B

Lundi, le président lui-même a remis en cause le bénéfice et la sûreté des vaccins. Il a ainsi suggéré que les personnes qui ne prennent pas de médicaments et ne se font pas vacciner n'ont pas d'autisme.

«L'hépatite B se transmet par voie sexuelle. Il n'y a aucune raison de vacciner contre l'hépatite B un bébé qui vient à peine de naître. Je dirais donc d'attendre que le bébé ait 12 ans», a-t-il ainsi assuré. L'hépatite B peut toutefois être transmise par la mère à l'enfant lors de la grossesse ou l'accouchement.

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