Le Sénat américain a franchi dimanche 9 novembre une étape décisive vers la fin du plus long shutdown de l’histoire des Etats-Unis, en votant par 60 voix contre 40 pour lever l’obstruction démocrate et avancer sur la loi de financement du gouvernement. Ce vote crucial laisse entrevoir une réouverture progressive des services publics dès la fin de la semaine. Le trafic aérien, le versement des aides sociales et le fonctionnement de nombreuses agences sont gravement perturbés depuis le 1er octobre, date du début de la paralysie.
Obtenu après 40 jours de chaos, ce vote fait suite à un accord bipartisan scellé au terme de semaines de négociations à huis clos entre sénateurs des deux partis et avec la participation du président Donald Trump lui-même, rapporte Politico. Une partie des démocrates rejette fermement ce compromis. Et le shutdown n’est pas encore officiellement levé: le texte doit encore être adopté par la Chambre des représentants, avant d’être signé par le président.
Un «long» processus
Dans le cadre de l’accord, une partie des démocrates se sont engagés à ce qu’au moins huit de leurs sénateurs votent en faveur du texte, permettant d’atteindre le seuil de 60 voix nécessaires pour lever l’obstruction parlementaire. Ce cap a été atteint dans la nuit de dimanche à lundi, créant des tensions dans le camp démocrate.
Une fois ce barrage levé, le Sénat doit encore procéder au vote final sur l'accord, qui requiert seulement une majorité simple, acquise aux républicains. Le texte sera ensuite transmis à la Chambre des représentants, où il devra être voté à son tour à la majorité de 218 voix. Ce n’est qu’après ces étapes, et la signature de Donald Trump, que les fonctionnaires fédéraux pourront reprendre le travail et les services publics rouvrir complètement.
Même le président américain s’est montré confiant: «On dirait qu’on s’approche de la fin du shutdown», a-t-il déclaré à la presse en rentrant à la Maison Blanche, après un week-end passé à Mar-a-Lago
Ce que prévoit le compromis
Le texte prévoit une loi de financement provisoire permettant de rouvrir l’administration fédérale et de financer intégralement certaines agences pour l’exercice budgétaire en cours, notamment le Département de l’Agriculture, la FDA, les Affaires des anciens combattants, les projets de construction militaire et le fonctionnement du Congrès. Les autres agences fédérales bénéficieraient d’un financement temporaire jusqu’à fin janvier 2026, en attendant un accord global sur le reste du budget.
Les démocrates ont obtenu de l’administration Trump la garantie de réembaucher les fonctionnaires licenciés au début du shutdown et de leur verser leur salaire rétroactivement. «La proposition protégera les fonctionnaires fédéraux contre les licenciements abusifs et garantira qu’ils soient réintégrés», a affirmé le sénateur démocrate Tim Kaine.
Les démocrates ont aussi obtenu la promesse d’un vote en décembre sur la prolongation des subventions de santé liées à l’Affordable Care Act (Obamacare), qui expirent à la fin de l’année. Mais le chef de la minorité démocrate au Sénat, Chuck Schumer, a déploré que cette mesure fasse seulement l’objet d’un vote ultérieur et non d’une adoption directe dans le texte actuel.
Les démocrates divisés
Malgré l’accord, une partie du camp démocrate reste vent debout, dont des ténors. Plusieurs élus progressistes dénoncent un compromis trop favorable aux républicains et jugent insuffisante la promesse de simple vote sur l'Obamacare. «C’est une terrible erreur», a fustigé la sénatrice Elizabeth Warren, appelant son parti à défendre le droit à des soins abordables.
A la Chambre des représentants, le chef des démocrates Hakeem Jeffries a lui aussi prévenu que son groupe ne soutiendrait pas un projet de financement n’intégrant pas directement la prolongation des crédits d’impôt de l’Affordable Care Act. Mais plusieurs élus modérés se disent prêts à voter le texte pour rétablir le fonctionnement du gouvernement, illustrant la fracture entre pragmatisme et idéalisme au sein du parti.
Des divergences assumées
Les démocrates favorables à l’accord défendent une approche plus pragmatique. «Nous avons obtenu la garantie d’un vote à une date fixe sur un projet de loi que nous rédigerons nous-mêmes», a souligné la sénatrice Jeanne Shaheen, insistant sur la nécessité d’un texte bipartisan susceptible d’être adopté.
Son collègue Angus King a reconnu qu’il n’existait «aucune garantie» que l’extension d’Obamacare soit adoptée d’ici le 31 décembre, mais a estimé que c’était «le meilleur accord possible» face à des républicains refusant toute négociation tant que le gouvernement restait paralysé.