Roumanie, Pologne, Portugal
La droite nationale-populiste repart à l'assaut de l'Europe

Le baromètre politique européen sera-t-il au beau fixe ce dimanche pour la droite nationale-populiste en Roumanie, en Pologne et au Portugal. Les deux premiers pays élisent leur président, le troisième son Parlement. La vague trumpiste va-t-elle déferler?
Publié: 10:50 heures
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Dernière mise à jour: 13:08 heures
Le leader de l'Alliance pour l'union des Roumains (AUR), George Simion, s'exprime lors d'un débat avec le candidat indépendant Nicusor Dan, le 8 mai 2025.
Photo: Anadolu via Getty Images
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Richard WerlyJournaliste Blick

Trois scrutins et la même interrogation: les candidats et les partis de droite nationale-populiste, portés par la vague Trump venue des Etats-Unis, vont-ils l’emporter dans les trois pays européens où les électeurs se rendent aux urnes ce dimanche: la Roumanie, la Pologne et le Portugal?

Pour y répondre, il faut comprendre les réalités locales. Trois pays, trois situations différentes, mais à chaque fois une évidence: les opposants à l’intégration européenne, souvent partisans de Donald Trump, ont à chaque fois une occasion historique de faire la différence. Un moment d’autant plus décisif que le président des Etats-Unis doit reparler ce lundi au téléphone avec Vladimir Poutine des conditions de la paix en Ukraine.

En Roumanie, George Simion l’antisystème

Le candidat nationaliste, très hostile à l’intégration européenne, et admirateur zélé de Donald Trump, est en position de force. Il a obtenu près de 40% des voix au premier tour de la présidentielle, largement devant son adversaire du second tour ce dimanche, le maire de Bucarest depuis 2020, Nicusor Dan. Le principal argument de George Simion est de s’en prendre aux élites politiques et économiques qui dominent le pays.

Ce député a fait campagne sur le thème «Make Romania Great Again», avec pour principal atout la colère populaire engendrée par la mise à l’écart d’un autre candidat, Calin Georgescu, que la Commission électorale a disqualifié. Ladite commission a annulé le premier tour organisé en décembre 2024, remporté par Georgescu, en raison d’interférences massives présumées de la Russie, via les réseaux sociaux. George Simion a, en fin de campagne, sillonné les capitales européennes. Il a obtenu le soutien du Hongrois Viktor Orbán, de l’Italienne Giorgia Meloni et de la Française Marion Maréchal-Le Pen. Il refuse l’étiquette pro-Russe, et il s’est déconnecté samedi de tous les réseaux sociaux, sauf X, celui d’Elon Musk.

Le président roumain siège au Conseil européen, l’instance des dirigeants des 27 pays membres de l’Union. Son élection, à la tête d’un pays riverain de la mer Noire, où des troupes françaises sont déployées, donnerait un levier supplémentaire à l’actuelle administration américaine dans sa volonté d’imposer un plan de paix à l’Ukraine.

En Pologne, Karol Nawrocki le nationaliste

Karol Nawrocki, 42 ans, était jusque-là un historien conservateur peu connu du grand public. Le voici, ce dimanche, dans le rôle du «candidat citoyen», poussé par les nationaux-conservateurs du PiS, le premier parti d’opposition (Droit et Justice, au pouvoir de 2015 à 2023). Son credo? La Pologne d’abord! Ce qui résonne là encore avec le slogan de Donald Trump. Point important: le vote en faveur de Nawrocki n’a pas été entaché, comme en Roumanie, de présumées interférences de la Russie. Son parti est traditionnellement antirusse, et personne n’oublie en son sein la mort de Lech Kaczynski, alors chef de l’Etat issu du PIS, dans l’accident de son avion jamais élucidé à Smolensk (Russie) le 10 avril 2010.

Photo: Getty Images



La victime collatérale de ce scrutin, en cas de victoire de Nawrocki, serait sans doute l’Ukraine. Même si la Pologne est un soutien fidèle à son voisin contre Moscou, les 4,3 millions d’Ukrainiens qui vivent sous protection temporaire dans le pays sont un sujet de contentieux, et les appels à les renvoyer sont de plus en plus fréquents.

Comme en Roumanie, le principal adversaire du candidat nationaliste est Rafał Trzaskowski, le maire de la capitale. Ce dernier, qui fut eurodéputé, est crédité de 30% des voix. Il est du même parti que l’actuel premier ministre Donald Tusk. Il défend une intégration européenne plus étroite, mais il a infléchi son agenda sociétal pour éviter de heurter les conservateurs, en particulier sur la question de l’avortement.

Le président polonais ne siège pas au Conseil européen. Le Chef de l’Etat sortant, Andrezj Duda, était d’ailleurs issu du PIS. Selon les résultats de ce dimanche, un second tour pourrait être organisé.

Au Portugal, Chega explose la droite

Photo: AFP

La spectaculaire progression du parti de droite nationale-populiste Chega devrait se confirmer lors des législatives ce dimanche. Ces élections ont lieu en raison de la dissolution du Parlement, suite au refus d’une majorité de députés de voter la confiance au chef du gouvernement de droite modéré Luis Montenegro. Et l’on sait que Chega est en tête chez les jeunes âgés de 18 à 24 ans, selon un sondage de l’hebdomadaire Expresso. Une fois de plus, la campagne a tourné autour de la critique du système, de la dénonciation des élites et de la corruption.


Le parti Chega s’est construit, depuis sa création en 2019 dans l’opposition au système autour du slogan «Limpar Portugal» («Nettoyer le Portugal»). Son leader André Ventura mise sur la lassitude des Portugais face au partage du pouvoir entre la droite et les socialistes depuis la fin de la dictature, en 1974. Lui aussi est soutenu par Viktor Orbán et Giorgia Meloni. Son carburant politique est l’insécurité attribuée par beaucoup aux nouveaux migrants. Le risque est de retrouver le Portugal en situation d’ingouvernabilité, si le Parlement est divisé en trois blocs. Une alliance droite-gauche contre Chega pourrait alors émerger.

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