Le dernier exercice militaire commun entre la Russie et la Biélorussie remonte à 2021. Ses conséquences sont connues: quelques mois plus tard, l’invasion de l’Ukraine débutait. A l’époque, les manœuvres avaient servi à positionner des troupes près de la frontière pour permettre l’offensive sur Kiev depuis le territoire biélorusse en février 2022. C’est pourquoi les exercices «Sapad», programmés à partir du 12 septembre, suscitent aujourd’hui une inquiétude particulière.
Cette tension s’ajoute aux récentes intrusions de drones russes dans l’espace aérien polonais, considérées par Varsovie comme une «provocation de grande ampleur». Moscou rejette ces accusations, mais le climat reste extrêmement tendu entre la Russie et les pays de l’OTAN. Pendant quatre jours, l’Occident observera attentivement ce qui se passe sur sa frontière nord-est.
Les manœuvres Sapad
Les exercices «Sapad» (qui signifie «Ouest» en russe) sont organisés tous les quatre ans. Ils simulent généralement la défense de la Biélorussie et de certaines parties de la Russie occidentale contre une attaque venue de l’Ouest. L’édition 2025 se déroule en Biélorussie et dans le district militaire de Moscou.
Ces manœuvres ne sont pas nouvelles et remontent aux années 1970 et 1980. Leur objectif reste inchangé: démontrer la capacité opérationnelle et la puissance de frappe de l’armée.
Qu’y a-t-il de particulier en 2025?
La nouveauté de cette édition réside dans la simulation d’une éventuelle guerre nucléaire avec l’Occident, comme l’a laissé entendre la radio publique russe. Des missiles Oreshnik, de moyenne portée et potentiellement équipés d’ogives nucléaires, doivent être mobilisés. Leur rayon d’action couvre une grande partie de l’Europe – y compris la Suisse.
Autre différence: le nombre de soldats engagés. Selon les médias et les experts, environ 13'000 militaires participeront aux exercices en Biélorussie et 30'000 en Russie, contre près de 200'000 en 2021. Cette réduction s’explique par l’engagement massif des forces armées de Vladimir Poutine sur le front ukrainien.
Des exercices parallèles dans l’Arctique
En parallèle de «Sapad 2025», la Russie mène un exercice naval de la flotte du Pacifique dans ses eaux extrême-orientales. «Plus de dix navires et bateaux, des avions et hélicoptères de l’aéronavale, ainsi que des sous-marins nucléaires et des batteries de missiles côtiers Bastion participent à cette manœuvre», a indiqué le service de presse de la flotte sur Telegram.
L’exercice porte sur la protection des routes maritimes du nord-est et des côtes du Kamtchatka et de la Tchoukotka. Les unités doivent «détecter les sous-marins ennemis, repousser des attaques aériennes et tirer des missiles sur des cibles maritimes». Une attention particulière est accordée à la défense contre les drones, aussi bien aériens que maritimes.
Quels risques pour l’Occident?
La tension est montée d’un cran après que des drones russes ont été lancés mercredi depuis la Biélorussie en direction des villes polonaises de Lodz et Gdansk. Le vice-président du Conseil de sécurité russe, Dmitri Medvedev, a alors menacé directement la Finlande: une confrontation avec Moscou «pourrait entraîner à jamais l’effondrement de l’Etat finlandais». Une rhétorique qui rappelle l’atmosphère précédant l’invasion de l’Ukraine.
Dans le même temps, l’OTAN mène sa propre grande manœuvre avec environ 34'000 soldats. «Nous sommes prêts à protéger chaque centimètre du territoire de l’Alliance», a déclaré Carsten Breuer, inspecteur général de l’armée allemande, à l’agence de presse DPA. Mais le risque d’incidents involontaires est réel, puisque les deux camps s’entraînent avec des munitions réelles, parfois à seulement quelques kilomètres de distance.
Les pays voisins réagissent
Les pays voisins réagissent déjà: la Pologne a complètement fermé sa frontière avec la Biélorussie depuis la nuit de mercredi à jeudi, a annoncé le Premier ministre Donald Tusk. La Lituanie a, de son côté, restreint son espace aérien.
Malgré tout, une escalade semble improbable au vu du nombre limité de troupes engagées. «Une attaque ciblée de la Russie avec des moyens réduits serait trop risquée», explique Klemens Fischer, expert en géopolitique, à Focus. Mais les experts soulignent qu’il est urgent de surveiller étroitement les mouvements militaires sur le flanc est de l’Europe afin de pouvoir réagir rapidement en cas de besoin.