Alors que le fentanyl continue de ravager l’Amérique du Nord, une nouvelle drogue, cinq fois plus puissante, gagne dangereusement du terrain en Europe. Il s’agit du nitazène, un opioïde de synthèse jusqu’à 250 fois plus fort que l’héroïne, qui a déjà causé la mort de centaines de personnes sur le continent, rapporte le «Wall Street Journal» mardi 29 juillet.
Développé dans les années 1950 en Suisse comme substitut à la morphine, le nitazène n’a jamais été autorisé pour un usage médical. Une micro-dose de cette substance ultra-puissante, produite majoritairement en Chine, suffit à provoquer une overdose fatale.
Le plus inquiétant: la majorité des victimes ignorent qu’elles en consomment. Le nitazène est souvent mélangé à d’autres substances, comme de l’héroïne, du fentanyl ou des anxiolytiques contrefaits. Il se présente sous forme de poudre, comprimés, liquide ou spray, et peut être sniffé, avalé, injecté ou inhalé.
«La plus grande crise de santé publique»
L’Europe est en première ligne face à cette nouvelle vague toxique. L’Allemagne, la France, la Suède, la Norvège ou encore le Royaume-Uni ont signalé des cas d’overdose liés aux nitazènes, selon l’Observatoire européen des drogues. En Estonie et en Lettonie, ces substances seraient responsables d’une part significative des décès par overdose. En Suisse, peu d'information filtre sur la présence de cet opioïde.
«C’est probablement la plus grande crise de santé publique pour les usagers de drogues au Royaume-Uni depuis l’épidémie de sida dans les années 1980», alerte Vicki Markiewicz, directrice exécutive de l’organisation Change Grow Live, qui coordonne des traitements pour les addictions. Depuis son arrivée, sur le marché illégal de la drogue en 2019 en Europe, le nitazène n'a fait qu'accroître. Et Le phénomène continue à prendre de l’ampleur.
Entre juin 2023 et janvier 2025, au moins 400 personnes sont mortes d’une overdose impliquant du nitazène au Royaume-Uni. Mais les chiffres officiels sont probablement sous-estimés, car de tests toxicologiques ne détectent pas cette molécule.
Une tragédie personnelle
En été 2023, au pays de Galles, Anne Jacques apprend la mort soudaine de son fils de 23 ans Alex. La police retrouve dans sa chambre des comprimés de Xanax achetés illégalement. Pourtant, l’autopsie conclut à un arrêt cardiaque inexpliqué, alors que le jeune homme était en parfaite santé.
Refusant cette version, Anne Jacques mène sa propre enquête et se renseigne sur les contaminants médicamenteux. Plus de sept mois plus tard, le couperet tombe: un test révèle que les pilules de Xanax de son fils ont bien été contaminés par du nitazène.
«J’ai dû enquêter moi-même sur la mort de mon fils. On a l’impression qu’il a été assassiné», dénonce-t-elle, bouleversée. Aujourd’hui, le nom de cette drogue reste méconnu du grand public. Mais la menace est bien présente, silence, tuant à bas bruit.