Ce mardi, un petit groupe extrémiste sunnite jusque-là méconnu a revendiqué l’attentat-suicide de dimanche contre une église à Damas, alors que les autorités syriennes avaient initialement imputé cet acte au groupe jihadiste Etat islamique (EI). L'attaque a fait 25 morts et des dizaines de blessés, semant la terreur au sein de la communauté chrétienne syrienne et parmi d'autres minorités.
Dans un communiqué diffusé sur Telegram, le groupuscule Saraya Ansar al-Sunna a affirmé qu'un de ses membres avait «fait exploser l'église Saint-Elie dans le quartier de Dwelaa à Damas», après «une provocation», sans plus de détails. Les autorités islamistes arrivées au pouvoir après la chute du président Bachar al-Assad en décembre ont rapidement imputé l'attaque à l'EI et annoncé lundi plusieurs arrestations dans le cadre d'une opération sécuritaire contre des cellules affiliées au groupe.
Mais dans sa déclaration, Saraya Ansar al-Sunna – qui n'a que quelques centaines d'abonnés sur Telegram – a rejeté cette version, la qualifiant de «fausse et fabriquée». Ce groupe, apparu après la chute d'Assad, a déclaré que «ce qui s'en vient ne vous laissera aucun répit (..), car nos combattants... sont pleinement prêts».
La communauté alaouite acculée
En mars, une altercation avait éclaté après que des riverains eurent protesté contre la diffusion de chants islamiques via les haut-parleurs d'une voiture devant l'église Saint-Elie. L'attentat de dimanche est le premier attentat-suicide à l'intérieur d'une église en Syrie depuis le début de la guerre civile en 2011, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
Il survient dans un contexte de violences confessionnelles, marquées notamment par des massacres de membres de la communauté alaouite – à laquelle appartenait Assad – et des affrontements avec des combattants druzes. Ces violences ravivent les inquiétudes quant à la capacité du pouvoir, dominé par le groupe islamiste Hayat Tahrir al-Cham (HTS) qui a renversé Assad, à contrôler les combattants radicaux.
HTS, autrefois affilié à Al-Qaïda, a rompu ses liens avec la nébuleuse jihadiste en 2016. Aymenn Jawad al-Tamimi, chercheur et analyste basé en Syrie, estime que Saraya Ansar al-Sunna pourrait être «une scission pro-EI issue principalement de déserteurs de HTS... et d'autres factions, mais qui opère actuellement de manière indépendante de l'EI».
Il n'exclut pas non plus qu'il puisse s'agir «simplement d'un groupe écran de l'EI». Selon une source interne au groupe citée par Tamimi, Saraya serait dirigé par un ancien cadre de HTS désabusé, et compterait parmi ses chefs un ex-membre de Hurras al-Din, branche syrienne d'Al-Qaïda, qui a annoncé sa dissolution en janvier sur ordre du nouveau gouvernement.