«On demande, en urgence, un Premier ministre pour gouverner la France. Contrat à durée très déterminée.» Cette annonce pourrait être publiée, à l’initiative d’Emmanuel Macron, dans tous les journaux français dès ce lundi 8 septembre vers 18 heures. A cette heure-là, deux heures après le début du vote de confiance sollicité par l’actuel chef du gouvernement François Bayrou, le pays sera, sauf miracle, de nouveau en pleine crise politique. Motif: la défiance votée par une majorité des députés présents. Ce qui conduira le Premier ministre sortant à présenter aussitôt sa démission au président de la République.
Qui, dès lors, pour remplacer François Bayrou dont la fin abrupte du mandat paraît garantie, puisqu’il ne devrait pas disposer, ce soir, d’une majorité suffisante pour soutenir son gouvernement et son programme de 44 milliards d’euros d’économies budgétaires pour l’année 2026, dans un pays confronté à une dette record de 3350 milliards? Trois profils sont possibles, tous à hauts risques, vu l’impopularité actuelle du président Emmanuel Macron (seulement 20 à 25% d’opinions favorables). Lequel ne pourra pas se représenter, en mai 2027, pour un troisième mandat consécutif.
Profil technique: sur un volcan
La première possibilité est de trouver, pour gouverner la France, un Premier ministre dont la principale – voire la seule – mission soit de boucler un budget crédible pour ses partenaires européens et pour les investisseurs internationaux qui, ces dernières années, ont afflué. Ce chef de gouvernement «technique» pourrait être un haut fonctionnaire, ou un ministre réputé pour sa compétence budgétaire. Le modèle évoqué est l’Italie qui, en pleine crise financière, alla chercher, deux présidents du Conseil respectés: Mario Monti (2011-2013) puis Mario Draghi (2021-2022). Problème: il faudra toujours faire voter une loi de finances, supposée arriver sur le bureau de l’Assemblée nationale au début octobre. Ce technicien sera donc sur un volcan. Sont cités: le président de la Cour des comptes Pierre Moscovici, le ministre sortant des Finances Didier Lombard ou le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau (tous trois proches des socialistes). Mais des personnalités extérieures pourraient surgir. En 2024, Macron avait consulté le président (inconnu) du Conseil économique et social Thierry Beaudet.
Profil grande coalition: sacrément dur
La deuxième possibilité est de tirer, enfin, les leçons de l’Assemblée nationale fracturée, où aucun camp politique ne dispose seul d’une majorité. Il s’agirait de proposer à tous les partis dits «de gouvernement», c’est-à-dire à l’exception de la droite et de la gauche radicale, un «contrat de coalition» à l’Allemande. Cela aurait pu être fait au soir des élections législatives anticipées de 2024, mais ça n’a pas eu lieu. La gauche espérait alors obtenir le poste de Premier ministre après sa courte victoire électorale (192 sièges pour la coalition de gauche, depuis disloquée). Qui peut aujourd’hui s’y coller? Deux noms reviennent: ceux de l’actuel ministre de la Justice Gérald Darmanin et celui de la ministre du Travail Catherine Vautrin, tous deux issus de la droite. En théorie, le Premier ministre sortant François Bayrou, centriste, aurait dû procéder ainsi. Pourquoi a-t-il renoncé? Parce que personne n’y était prêt, dit-il. Et maintenant, après sa chute?
Profil «tout pour le tout»: risque maximal
Emmanuel Macron va-t-il répondre positivement aux exigences du Parti socialiste? Ce dernier ne compte que 66 députés sur 577. Mais il réclame le poste de Premier ministre en estimant pouvoir réunir une majorité, ou du moins obtenir un «pacte de non-censure» à l’Assemblée nationale. Ce qui, sur le papier, semble impossible. Alors? Une autre formule «risque-tout» pourrait être de nommer, au contraire, un Premier ministre issu de la droite qui rechercherait le soutien du Rassemblement national, mais cela a complètement raté pour le conservateur Michel Barnier, censuré par une majorité de députés le 4 décembre. Emmanuel Macron, en cas d’échec, devrait dissoudre l’Assemblée nationale. Une garantie d’escalade dans la crise politique…