Elle a vu Bayrou ce mardi
Marine Le Pen se croit plus que jamais aux portes du pouvoir

Marine Le Pen, la cheffe de la droite nationale populiste, est convaincue que son parti peut gagner des élections législatives anticipées, sur fond de crise budgétaire. Et qu'elle pourra se présenter, malgré sa condamnation à une peine d'inéligibilité.
Publié: 02.09.2025 à 19:55 heures
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La patronne du Rassemblement national a rencontré le Premier ministre avec Jordan Bardella, son dauphin.
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Richard WerlyJournaliste Blick

Elle y croit. Et elle ne lâchera rien dans les jours à venir. Marine Le Pen estime que François Bayrou est en train d’offrir à son parti le meilleur tremplin possible pour prendre les rênes de la France.

La cheffe du Rassemblement national l’a d’ailleurs dit au Premier ministre français, qu’elle a rencontré ce mardi 2 septembre en compagnie de son dauphin (et président en titre du RN) Jordan Bardella: pas question pour elle d’accepter sa potion amère budgétaire de 44 milliards d’euros d’économies en 2026. La seule façon de crever l’abcès politique et économique du pays est, pour la dirigeante nationale populiste, de dissoudre l’Assemblée nationale. Puis de convoquer des législatives anticipées. 

Un calcul téméraire

Sur le papier, le calcul de Marine Le Pen semble bien téméraire. Sa condamnation pour «détournements de fonds publics» par le tribunal correctionnel de Paris, le 31 mars 2025 (ainsi qu’une brochette de dirigeants et élus du RN impliqué dans l’utilisation frauduleuse de fonds du Parlement européen) lui interdit a priori toute nouvelle candidature. Concrètement, l’actuelle députée du Pas-de-Calais ne pourrait donc pas se représenter dans sa circonscription. Et encore moins se présenter à une éventuelle élection présidentielle anticipée si Emmanuel Macron décidait, ce qu’il a toujours exclu, de démissionner avant la fin de son second mandat en mai 2027.

Sauf que deux éléments ont convaincu la cheffe du groupe des 90 députés RN qu’une sortie de secours politique existe bel et bien pour elle. La première est juridique et constitutionnelle: est-il possible de l’empêcher de se présenter alors que son procès en appel doit se tenir au printemps 2026, et qu’il pourrait annuler ou infirmer son inéligibilité? Marine Le Pen, en cas de dissolution de l’Assemblée nationale, pourrait donc saisir les neuf sages du Conseil constitutionnel, et arguer de ce recours pour se présenter devant les électeurs.

Oui aux législatives anticipées

Deuxième élément qui explique sa motivation à obtenir des législatives anticipées, outre les sondages qui donnent à son parti entre 30 et 35% des voix? La possibilité, au cas où le RN emporterait la majorité des 577 sièges de députés, d’être nommée Première ministre à la place de François Bayrou. Ce plan, rappelons-le, n’a jamais eu ses faveurs.

Son scénario privilégié a toujours été de laisser les rênes du gouvernement à Jordan Bardella, pour se concentrer sur la présidentielle. Mais vu la crise budgétaire, et pour ne pas laisser le pays enliser, Marine Le Pen pourrait devancer l’échéance. Elle prendrait ainsi un énorme risque. Mais elle est convaincue qu’il pourrait être payant.

Macron et Bayrou sont perdus

Payant, pourquoi? D’abord parce que l’actuel Premier ministre et le président de la République n’ont jamais été aussi impopulaires, avec environ 20% d’opinions favorables. Ensuite parce que le RN devrait électoralement profiter, en cas de législatives, de la désunion de la gauche et de l’absence probable d’un nouveau «front républicain» pour faire barrage à ses candidats. En clair: Marine Le Pen pense qu’il faut profiter du moment actuel. Le grand désarroi français la sert. Son parti n’a jamais gouverné. La droite nationale populiste a le vent en poupe, aux Etats-Unis et ailleurs en Europe. Et tous les sondages considèrent qu’en cas de présidentielle anticipée, le candidat du RN sera présent au second tour. 

Le dernier élément qui pousse Marine Le Pen à accélérer le tempo est la bataille feutrée qui l’oppose, en interne, à Jordan Bardella. L’intéressée a bien conscience que si elle est condamnée de nouveau en appel en 2026, elle devra s’effacer. Mieux vaut donc aller vite, en proposant aux Français des économies budgétaires sur deux sujets qui lui sont chers: l’immigration (baisse des allocations, révocation des assurances sociales, etc.) et baisse de la contribution française à l’Union européenne.

C’est là l’ultime maillon: en s’installant au pouvoir dès cette année, Marine Le Pen et le RN pourraient commencer à mettre en œuvre leur agenda. Avec l’espoir que deux ans plus tard, pour la présidentielle, les électeurs français soient encore plus nombreux à leur faire confiance.

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