Crise politique et sociale
Pourquoi la France a si peur du 8 et du 10 septembre?

Si le gouvernement de François Bayrou n'obtient pas la confiance des députés le 8 septembre, il devra démissionner. La porte sera alors ouverte à une paralysie deux jours plus tard, pour la journée de «blocage» du 10.
Publié: 11:34 heures
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Jean-Luc Mélenchon, le leader de la gauche radicale, a mis tout son poids politique dans la balance pour la journée de blocage du 10 septembre.
Photo: AFP
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Richard WerlyJournaliste Blick

Ces deux dates peuvent faire basculer la France dans l’inconnu. Le 8 septembre, une crise de régime peut s’ouvrir si le Premier ministre François Bayrou n’obtient pas la confiance de l’Assemblée nationale, après sa déclaration de politique générale centrée sur l’urgence des économies budgétaires à réaliser. Et deux jours plus tard, le 10 septembre, c’est le pays entier qui pourrait être pris en otage. Plusieurs collectifs très actifs sur les réseaux sociaux veulent en effet «bloquer le pays» ce jour-là, pour protester contre l’austérité programmée…

Ce double risque fait-il peur aux Français, à moins de deux ans de l’élection présidentielle de mai 2027? La réponse est oui. Pourquoi? Parce que le pays est particulièrement vulnérable.

Le 8 septembre, le vide politique

C’est le scénario qui fait peur dans un pays où l’Etat central dirige tout, ou presque: si le gouvernement de François Bayrou est contraint de démissionner, le vide politique sera très problématique. Pour obtenir la confiance des députés, François Bayrou doit gagner le vote à la majorité absolue des suffrages exprimés (les abstentions ne sont pas comptées). Or pour l’heure, le compte n’y est pas. Le bloc présidentiel compte entre 155 et 190 députés sur 577 (selon le vote de la droite traditionnelle). L’opposition réunie, de la droite nationale populiste à la gauche radicale, peut compter, elle, sur 360 députés. Pour mémoire, Emmanuel Macron avait refusé de nommer après les législatives de juin 2024 un Premier ministre issu de la coalition des gauches qui était pourtant arrivée en tête en nombre de sièges, avec 193 élus.

Le 8 septembre, Macron dans le viseur

Une crise de régime inédite sous la Ve République peut s’ouvrir si une majorité absolue de députés refusent la confiance au gouvernement. Certes, le Premier ministre François Bayrou peut en théorie être renommé par Emmanuel Macron. Mais à quoi bon puisque son programme politique aura été censuré? Le président de la République sera plus que jamais le dos au mur. Il a promis de ne pas démissionner avant mai 2027. Mais que peut-il faire sans majorité, et en guerre ouverte avec les oppositions? Une option serait une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale. Un ultime coup de poker qui pourrait se transformer en guillotine s’il est désavoué dans les urnes.

Le 10 septembre, le blocage total

Beaucoup de Français ont peur d’un enchaînement fatal. D’abord la crise politique le 8 septembre, et une pression accrue sur un Emmanuel Macron de plus en plus impopulaire (moins de 25% d’opinions favorables). Puis la paralysie sociale, en particulier via des grèves générales dans le secteur public. La France se retrouverait à l’arrêt. Alors que sa croissance économique est atone, que son chômage recommence à augmenter, et qu’il n’y a plus d’argent dans les caisses. La confiance des investisseurs et des marchés financiers subirait alors un sacré choc.

Le 10 septembre, début de révolution

C’est la thèse défendue par Jean-Luc Mélenchon. Le leader de la France Insoumise (gauche radicale) soutient le mouvement du 10 septembre et estime que l’heure est venue de pousser Macron à la démission. Marine Le Pen et le Rassemblement national pensent la même chose, sans le dire haut et fort. Le RN veut, lui, une nouvelle dissolution car il pense pouvoir emporter la majorité des sièges à l’Assemblée lors de prochaines législatives. Ironie du calendrier: la patronne du parti ne pourrait pas se présenter, compte tenu de sa condamnation judiciaire de mars 2025. Mais si Macron tombe, sa victoire sera totale.

Le 8 et 10 septembre, le chaos

Ce mot résume bien les inquiétudes françaises. Car personne, aujourd’hui, ne voit de sortie tranquille du tunnel politique dans lequel le président a plongé le pays avec sa dissolution surprise du 9 juin 2024. Tout peut déraper. Un gouvernement d’union nationale semble impossible. Et à en croire les déclarations des dirigeants des principaux partis, François Bayrou n’obtiendra pas la confiance du Parlement. Le chaos institutionnel affaiblirait en outre considérablement la France sur le plan international à l’heure des négociations sur l’Ukraine et de la guerre à Gaza.

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