Adieu du Premier ministre
François Bayrou s'est suicidé, qui va ressusciter la France?

Le Premier ministre français a énoncé dans un discours de 45 minutes les vérités qui, selon lui, ne peuvent plus être ignorées en France. Seulement voilà: ce lundi 8 septembre vers 19 heures, il a été forcé de démissionner.
Publié: 08.09.2025 à 16:39 heures
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Dernière mise à jour: 08.09.2025 à 19:14 heures
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Les députés français voteront, vers 19 heures, sur la confiance au gouvernement de François Bayrou.
Photo: keystone-sda.ch
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Richard WerlyJournaliste Blick

3415 milliards d’euros, soit presque 120% du produit intérieur brut! François Bayrou a rendu public le nouveau chiffre de la dette publique de la France lors de son ultime discours devant les députés. Ultime discours? C’était une quasi-certitude depuis plusieurs jours. Lors de cette soirée du 8 septembre, le Premier ministre français a été renversé. Une majorité de 364 députés ont refusé de lui accorder leur confiance. Mais la dette, elle, restera. Et avec elle les problèmes structurels du pays.


On attend en général d’un politicien centriste qu’il ménage les uns et les autres, et qu’il se mette au service du compromis. François Bayrou (74), vétéran de la politique et déjà trois fois candidat à la présidentielle (2002, 2007, 2012), a pourtant choisi l’option contraire.

Vérités budgétaires

Son discours, une fois encore, a consisté à énumérer les vérités budgétaires et économiques que, selon lui, la classe politique ne veut pas accepter. Une phrase résume sa posture: «Les députés ont le pouvoir de faire tomber le gouvernement, pas celui d’effacer le réel». L’avertissement est lancé: dès demain, lorsque Emmanuel Macron – qui pourrait s’exprimer à la télévision dans la soirée – aura reçu la démission du 4e chef de gouvernement depuis le début de son second mandat en mai 2022; la réalité reprendra ses droits et la France aura une gueule de bois.


Deux mots résument ce qui ressemble fort à un suicide parlementaire de François Bayrou, dont ses proches murmurent qu’il n’a pas abandonné l’idée de se représenter une nouvelle fois au suffrage universel devant les Français, pour la présidentielle de mai 2027.

La banqueroute

Le premier fait mal, très mal: «banqueroute». Pour le Premier ministre, tel est le danger. Banqueroute est un mot presque pire que faillite, car il a une tonalité proche de l’escroquerie. Les dés sont donc jetés. Selon Bayrou, les partis politiques français ne sont pas à la hauteur des épreuves que traverse le pays. Une manière de se comparer aux deux grands dirigeants qu’il a cités: Charles de Gaulle et Pierre Mendès France, l’éphémère président socialiste du Conseil en 1954, resté quelques mois au pouvoir après avoir fait la paix en Indochine, à Genève.

Le deuxième mot sur lequel Bayrou a appuyé est «addiction». Addiction à la dépense publique d’un pays qui, depuis 51 ans, n’a jamais présenté un budget à l’équilibre. Addiction à la dérive structurelle d’un Etat devenu obèse. Addiction aux impôts, ce qui justifie pour lui d’écarter la fameuse taxe Zucman proposée par la gauche sur les plus gros patrimoines, même si le Premier ministre a reconnu la nécessité pour les plus riches de contribuer au redressement national.

La falaise française

Banqueroute et addiction: telle est la falaise que François Bayrou s’est employé à peindre devant les députés, qu’il a enjoints de voter «en conscience» en dehors des consignes des partis «qui finissent toujours par diviser». A-t-il raison? Oui sur le plan des chiffres, c’est difficilement contestable.


Pas sûr du tout, en revanche, que sa méthode a été la bonne. Interrogé par France Info, l’ancien député Bertrand Pancher, indépendant venu de la droite, fondateur du groupe LIOT et président du mouvement Utile, a souligné qu’une coalition est encore possible entre les partis désireux de gouverner et conscient des enjeux budgétaires. Mais qui peut la construire? Tous les regards, après ce suicide politique en direct de François Bayrou, se tournent vers Emmanuel Macron. Lui seul a la clé pour déverrouiller la situation. Il faut, pour cela, nommer un Premier ministre capable d’incarner le compromis. Ou renvoyer les députés devant les électeurs pour demander aux Français de trancher.

Bayrou vient de se suicider. La France, elle, attend d’être ressuscitée.

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