Espoir d'un cessez-le-feu
L'aide au Soudan est «urgente», alerte le CICR

La présidente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) demande aux parties au conflit soudanais d'honorer leurs engagements à faciliter l'assistance humanitaire. «Cette aide est urgente», affirme Mirjana Spoljaric dans un entretien à Keystone-ATS.
Publié: 23.05.2023 à 11:21 heures
La présidente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) Mirjana Spoljaric demande aux parties au conflit au Soudan d'appliquer leurs engagements humanitaires.
Photo: ALESSANDRO DELLA VALLE

Alors que le conflit fait rage au Soudan, la présidente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) Mirjana Spoljaric demande aux belligérants d'honorer leurs engagements à faciliter l'assistance humanitaire.

«Il est important que l'accès humanitaire soit garanti», insiste la présidente depuis New York où elle a été conviée par la Suisse à un débat de haut niveau au Conseil de sécurité de l'ONU sur la protection des civils.

Si l'organisation salue la déclaration d'il y a dix jours de l'armée et des paramilitaires, elle souhaite que le cessez-le-feu qui devait entrer en vigueur lundi permette de l'appliquer entièrement. En dépit de cette trêve, des combats et des raids aériens ont eu lieu dans la nuit de lundi à mardi.

Le CICR a maintenu ses efforts malgré les difficultés. «La possibilité de bouger est limitée. Nous n'avons eu accès qu'à quelques hôpitaux» et peu d'assistance a pu être distribuée, affirme Mirjana Spoljaric. Les visites habituelles auprès de détenus ne peuvent être menées. Les infrastructures de certaines institutions ont été ciblées ou pillées depuis mi-avril.

Les civils au cœur des préoccupations

Selon la présidente, le cessez-le-feu d'une semaine doit constituer une «étape» pour des discussions politiques entre les deux parties. D'autres, comme un échange de détenus, pourraient contribuer à améliorer durablement la situation. Comme récemment au Yémen où le CICR a facilité la libération de centaines de prisonniers entre le gouvernement et les rebelles Houthis.

La souffrance des civils a toujours été au centre des préoccupations dans les conflits. «Les guerres ne sont pas devenues plus graves», affirme Mirjana Spoljaric. «Mais on observe une accélération des crises avec des effets qui se renforcent mutuellement». A la multiplication des conflits non internationaux s'ajoutent le changement climatique ou des violences qui ont un impact très large.

Dans le conflit ukrainien, la présidente affirme que des avancées ont encore été obtenues pour les visites aux détenus. «Mais ce n'est toujours pas satisfaisant pour nous», insiste Mirjana Spoljaric qui demande un accès à tous les prisonniers.

Depuis le début de cette guerre, le CICR a pu établir un contact ou donner des indications sur des disparus dans près de 5300 cas. «Ce travail constitue le cœur de notre engagement pour la protection des civils», estime celle qui est entrée en fonctions il y a huit mois.

«C'est important pour les familles de savoir où sont leurs proches, même quand ils sont décédés», ajoute-t-elle. L'organisation veut oeuvre aussi pour aider les parties au conflit à échanger les dépouilles des soldats tués.

Une «bonne collaboration» avec l'Ukraine

Première femme à présider le CICR en 160 ans, Mirjana Spoljaric a multiplié les missions dans différents pays depuis quelques mois. Elle prévoit de se rendre à nouveau en Ukraine et en Russie, sans pouvoir dire encore quand elle le fera.

L'année dernière, l'organisation a fait face à des campagnes de calomnie sur les réseaux sociaux en Ukraine qui avait poussé l'institution à dénoncer publiquement la situation. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky n'avait pas été tendre avec elle, beaucoup ne comprenant pas que le CICR reste neutre face à l'agression russe ou qu'elle se rende à Moscou.

«Les Ukrainiens ont toujours saisi notre message. Notre collaboration avec les autorités est très bonne», se contente de dire Mirjana Spoljaric.

Dans un an, le Mouvement de la Croix-Rouge se réunira à Genève pour sa grande conférence prévue tous les quatre ans et qui a été décalée en raison de la pandémie. Malgré les violations du droit international humanitaire (DIH) que le CICR dénonce régulièrement, Mirjana Spoljaric estime que celui-ci reste partagé par tous les Etats.

Consensus derrière les Conventions de Genève

«Le consensus derrière les Conventions de Genève est probablement le consensus le plus élevé dans le monde». Et celles-ci «restent tout aussi pertinentes» qu'il y a plus de 70 ans quand elles ont été adoptées.

La présidente ajoute que le DIH reste «bien comme il est». «Mais les nouvelles technologies devront s'aligner avec lui et oeuvrer pour l'humanité», ajoute-t-elle, notamment sur la question des robots tueurs.

L'organisation fait face de son côté à d'importantes difficultés. Elle a récemment annoncé anticiper une coupe d'environ 1500 emplois, peut-être davantage si la situation ne s'améliore pas. Il faut diversifier les donateurs, admet la présidente qui ne peut toujours pas dire combien de licenciements seront menés.

Après près de huit mois, elle retient le «grand soutien politique» qu'elle a reçu dans ses missions. Avec les tensions actuelles, «le monde a toujours besoin d'une organisation qui reste neutre», dit encore la présidente qui ajoute que l'organisation parle avec environ 390 groupes armés. Celle-ci doit maintenant garantir de pouvoir maintenir son dispositif opérationnel face aux différents conflits.

(ATS)

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