L'Union européenne a lancé jeudi une nouvelle enquête ciblant Google, filiale d'Alphabet, suspectée de pénaliser certains sites d'information dans les résultats de son moteur de recherche, ce dont le groupe américain se défend.
En ouvrant cette nouvelle enquête, dans le cadre de sa législation phare sur les marchés numériques, le DMA, l'UE affiche sa détermination à réguler les géants de la tech, y compris les champions américains du secteur, malgré les menaces de Donald Trump qui avait critiqué la très lourde amende européenne infligée début septembre à Google (2,95 milliards d'euros).
Améliorer le classement
Le groupe américain a mis en place des mesures visant à lutter contre des techniques de manipulation utilisées par certains sites pour améliorer leur classement dans les résultats de son moteur de recherche, et qu'il assimile à une forme de spam.
Mais la Commission européenne dit avoir des indications que cela conduirait Google à diminuer le classement des sites d'info, lorsqu'ils incluent dans leurs pages des contenus issus de partenaires commerciaux. Un tel déclassement pénalise les éditeurs de presse concernés, car il entraîne une réduction de la fréquentation de leurs sites, et donc une baisse de leurs revenus publicitaires.
Pilules amaigrissantes et arnaques financières
Bruxelles a donc décidé d'ouvrir une enquête pour une possible infraction aux obligations des plateformes prévues par le DMA. Google s'est défendu vigoureusement, assurant dans un message publié jeudi que «cette nouvelle enquête risque de récompenser des mauvais acteurs et de dégrader la qualité des résultats de recherche».
Le groupe explique que sa politique anti-spam permet de lutter contre des sites frauduleux, qui vendent par exemple des pilules soi-disant amaigrissantes ou montent des arnaques financières, et qui diffusent des liens promouvant leurs produits sur des sites ayant une bonne réputation, pour tromper la vigilance des internautes. Le géant californien assure que ses règles visent à décourager de telles pratiques «via un processus loyal et rigoureux», et estime que s'il devait les abandonner, cela risquerait de léser «des millions d'utilisateurs européens».
Début de l'enquête
Pour la Commission, au contraire, ces mesures de Google pourraient dissuader les éditeurs de presse de travailler de manière tout à fait légitime avec des partenaires qui veulent promouvoir par exemple des coupons ou des offres promotionnelles.
Cette enquête n'en est qu'à ses débuts. La Commission espère la boucler d'ici 12 mois. Si elle concluait qu'Alphabet a commis une infraction au DMA, elle pourrait lui infliger une amende pouvant peser jusqu'à 10% de son chiffre d'affaires mondial, et même 20% en cas de récidive.
Protéger les éditeurs de presse
Le DMA, texte emblématique adopté en 2022, s'applique concrètement depuis mars 2024 dans l'Union européenne. Il vise à mettre fin aux abus de position dominante des géants technologiques, en soumettant les grandes plateformes en ligne comme Google à des règles renforcées.
«Nous allons enquêter pour nous assurer que les éditeurs ne presse ne sont pas privés d'une importante source de revenus dans une période difficile pour le secteur», a déclaré la responsable de la Commission en matière de Concurrence, Teresa Ribera, citée dans un communiqué. «L'objectif est de protéger le financement des éditeurs de presse, leur liberté d'exercer leur activité, et en fin de compte, le pluralisme des médias et la démocratie», a renchéri Henna Virkkunen, sa collègue en charge du Numérique.