Des alliés très fidèles
Pourquoi l'Europe centrale soutient corps et âme Israël

Alors que la pression internationale s’intensifie contre Israël pour sa conduite de la guerre à Gaza, l’État hébreu peut encore compter sur le soutien indéfectible de certains alliés d’Europe centrale, mus par des raisons à la fois historiques et idéologiques.
Publié: 23.05.2025 à 08:05 heures
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Dernière mise à jour: 23.05.2025 à 09:51 heures
Benjamin Netanyahu peut compter sur le soutien indéfectibles d'alliés en Europe centrale.
Photo: keystone-sda.ch
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AFP Agence France-Presse

Si la pression internationale s'accroît sur Israël en raison de sa conduite de la guerre dans la bande de Gaza, il peut toujours compter sur des alliés fidèles en Europe centrale, pour des raisons historiques et idéologiques.

Signe éclatant de cette solidarité: l'Autriche comme l'Allemagne ont défendu mercredi l'accord d'association entre l'Union européenne et Tel Aviv, alors que la majorité des Etats membres se sont prononcés en faveur d'un réexamen de ce texte en vigueur depuis 2000.

Le poids de la Deuxième Guerre mondiale

Berlin et Vienne ont élevé l'existence d'Israël au rang de raison d'Etat, estimant que leur «dette» envers ce pays, créé après l'extermination des juifs par les nazis pendant la Deuxième Guerre mondiale, impose un «soutien significatif», selon la chercheuse Joanna Dyduch.

Pour cette responsable de l'Institut du Proche et du Moyen-Orient à l'université Jagiellonian de Cracovie, Allemands et Autrichiens rejoignent la position de leurs voisins de l'Est sortis il y a plus de trois décennies de la coupe de Moscou.

«Même vision de la sécurité»

De la République tchèque à la Bulgarie, ces Etats partagent une «même vision du droit à la sécurité» qu'Israël, menacé dans son existence, et «il y a cette peur identique d'être abandonné ou trahi».

Pour rejoindre l'UE et l'Otan à partir de 2004, ces jeunes démocraties, en général, ont dû passer d'une position plutôt pro-arabe, alignée sur celle de l'URSS, à une vision calquée sur celle de Washington.

Une réorientation d'autant plus naturelle qu'elles ressentaient une proximité culturelle avec une terre où se sont installées des populations ayant contribué à leur culture, partageant leurs langues, leurs nationalités souvent.

Même courant politique

Si cet élément peut avoir tendance à s'estomper avec le temps, un autre est venu cimenter plusieurs relations bilatérales: celui de l'illibéralisme. Le Hongrois Viktor Orban, l'Autrichien Sebastian Kurz, le Slovaque Robert Fico, le Tchèque Milos Zeman... Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu appartient à leur courant politique, bien représenté dans cette partie de l'Europe depuis une quinzaine d'années.

«Nouer des relations solides» avec ces personnalités lui permet d'«exploiter les divisions» au sein de l'Europe, analyse Azriel Bermant, de l'Institut des relations internationales de Prague. Une stratégie particulièrement payante, quand un dirigeant comme Viktor Orban a la capacité de pouvoir bloquer des décisions, au grand dam de la Commission européenne.

La Hongrie est allée jusqu'à claquer la porte de la Cour pénale internationale (CPI) et inviter sur son sol le chef du gouvernement israélien, visé par un mandat d'arrêt pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité dans la bande de Gaza.

La guerre contre l'islam

Autre combat commun permettant de dépasser les tensions autour de l'antisémitisme, «le discours selon lequel Israël est en première ligne de la guerre contre l'islam», rappelle aussi l'expert. Des partis d'extrême droite peuvent «utiliser ce récit et leur soutien à Israël pour se laver de tout soupçon», dit-il.

Les affaires et la politique ne font alors plus qu'un, même si la coopération stratégique reste modeste. L'année dernière, la Slovaquie a acheté le système israélien de défense antiaérienne Barak MX pour 560 millions d'euros, une première dans l'Otan. L'invasion de l'Ukraine par la Russie a relancé la course aux armements et, en 2023, l'Allemagne avait déjà scellé avec Israël un accord sur l'achat du bouclier antimissile Arrow-3, pour une somme évaluée à 3,5 milliards de dollars.

Exception toutefois, la Pologne, dont la voix porte de plus en plus à Bruxelles, a «européanisé» sa politique étrangère, note Joanna Dyduch. «Sa position a changé par rapport aux autres Etats d'Europe centrale et orientale», même après l'attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas sur le sol israélien le 7 octobre 2023.

Retournement de la Pologne

La Pologne, où les nationalistes ne sont désormais plus au gouvernement, «s'est progressivement distanciée» de la campagne de représailles ayant fait plus de 53'000 morts, selon les données du ministère de la Santé du Hamas, jugées fiables par les Nations unies.

«La réticence d'Israël à condamner le Kremlin» sur l'Ukraine s'est transformée en «grief polonais à son encontre» et a «sans doute influencé la manière dont le public a perçu la guerre à Gaza», conclut-elle.

Alors qu'elle penchait auparavant en faveur d'Israël, la Pologne a soutenu sans équivoque l'admission de l'Etat de Palestine, au moment du vote de l'Assemblée générale de l'ONU en mai 2024. Et ce tandis que la Hongrie comme la République tchèque ont voté contre, l'Allemagne, l'Autriche, la Bulgarie et la Roumanie s'abstenant.


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