«C'est une horreur»
Moscou intensifie ses attaques dans le Donbass

Des combats particulièrement intenses sévissent dans la région du Donbass (est de l'Ukraine), sur laquelle Moscou se concentre sans effectuer d'avancée significative. Des négociations «très difficiles» se déroulent sur le sort des derniers défenseurs de Marioupol.
Publié: 14.05.2022 à 08:46 heures
Photo: IMAGO/SNA

«Il y a des combats nourris à la frontière avec la région de Donetsk, près de Popasna», a commenté vendredi soir sur Facebook Serguiï Gaïdaï, gouverneur ukrainien de la région de Lougansk, faisant état de nombreuses pertes en matériel et en personnel du côté russe.

«C'est une horreur mais ils essaient encore de parvenir à leurs fins. Mais d'après les interceptions (de communications téléphoniques), nous comprenons qu'un bataillon entier a refusé d'attaquer car ils voient ce qui est en train de se passer», a-t-il relevé.

«Pas de prise significative»

Un responsable américain de la Défense, s'exprimant sous couvert d'anonymat, a confirmé que l'activité russe la plus importante actuellement se déroulait dans le Donbass. «Et, en gros, nous continuons de voir que les Russes ne font pas de prise significative» dans cette région, a-t-il indiqué.

«L'artillerie ukrainienne contrecarre les efforts russes pour gagner du terrain, y compris leurs efforts pour franchir la rivière Donest (...) ce qui affecte leur capacité à envoyer des renforts importants dans le nord du Donbass», a poursuivi cette source.

Le ministère britannique de la Défense (MoD) a précisé vendredi que les forces ukrainiennes avaient repoussé «avec succès» une tentative russe pour traverser ce cours d'eau près de Severodonetsk, occasionnant aux troupes de Moscou de lourdes pertes.

Cette opération illustre «la pression sous laquelle se trouvent les commandants russes pour progresser dans l'Est de l'Ukraine», a estimé le MoD, soulignant que l'armée russe n'était «pas parvenue à faire des avancées importantes bien qu'elle y ait concentré ses forces après» avoir renoncé à s'imposer à Kiev.

Fin mars, quelques semaines après son invasion de l'Ukraine le 24 février, la Russie s'était retirée de la région de la capitale, changeant de «cible prioritaire» pour tenter de prendre le contrôle de l'est de l'Ukraine.

Annexion prochaine?

Un porte-parole de l'état-major ukrainien a relevé samedi au petit matin que les Russes n'avaient «pas interrompu leur offensive dans la zone opérationnelle Est. L'ennemi continue ses frappes de missiles sur des infrastructures industrielles et ses tirs sur des cibles civiles dans toute l'Ukraine».

L'état-major lui-même, dans son communiqué matinal quotidien, a rapporté que dans la région de Donetsk et de Tavriya, l'armée russe avait utilisé «mortiers, artillerie, lance-grenades et moyens aériens pour infliger un maximum de dégâts à l'armée ukrainienne», visant le personnel, des fortifications et des bâtiments». Dix attaques russes ont été repoussées en 24h autour de Donetsk et Lougansk, a-t-il indiqué.

Selon l'Institut américain d'étude de la guerre (ISW), Vladimir Poutine «entend probablement annexer le sud et l'est de l'Ukraine à la Fédération de Russie dans les prochains mois». «L'Ukraine et ses partenaires occidentaux ne disposent probablement que d'une fenêtre d'opportunité réduite pour appuyer une contre-offensive dans les territoires occupés avant» leur annexion, selon cet organisme.

«Nous ne laisserons personne»

La situation s'est semble-t-il déjà renversée à Kharkiv, pourtant l'une des cibles prioritaires pour les Russes. «La principale activité de l'ennemi dans la région de Kharkiv a été le retrait de ses unités de la ville de Kharkiv», a indiqué le porte-parole de l'état-major ukrainien.

«La libération progressive de la région de Kharkiv prouve que nous ne laisserons personne à l'ennemi», a relevé vendredi soir le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans son message quotidien, annonçant que la reprise de territoires tombés aux mains des Russes se poursuivait. «A la date d'aujourd'hui, 1015 localités ont été libérées, soit six de plus dans les dernières 24 heures», a-t-il fait savoir.

Eau, électricité, communications, transports et services publics y ont été rétablis, a-t-il précisé, confiant garder à l'esprit les villes et territoires encore sous occupation russe.

Avec une pensée toute particulière pour le millier de combattants ukrainiens retranchés dans un labyrinthe de tunnels datant de l'ère soviétique sous l'usine sidérurgique Azovstal à Marioupol, pour lesquels «des négociations très difficiles sont en cours sur la prochaine phase d'évacuation, les gravement blessés et le personnel médical».

Résister au maximum

La vice-Première ministre ukrainienne Iryna Verechtchouk a fait le même constat, évoquant des «négociations avec l'ennemi (qui) sont très difficiles». «Nous négocions actuellement (l'exfiltration) de 38 combattants gravement blessés. Nous avançons pas à pas. (...) Il n'y a pas de discussions en ce moment pour la libération de 500 à 600 personnes».

L'état-major ukrainien a précisé samedi dans son communiqué matinal quotidien, que l'armée russe avait continué «le blocus de nos unités près de l'usine Azovstal. Il a mené des frappes d'artillerie et aériennes de grande envergure».

Sviatoslav Palamar, commandant adjoint du régiment Azov, une des formations ukrainiennes luttant à Azovstal, a lancé un appel à l'aide aux Etats-Unis «pour évacuer nos blessés et (qu'ils) mobilisent tous les efforts pour aider à l'extraction de notre régiment» de cet encerclement

«Il y a près de 600 blessés sur Azovstal, les Russes continuent de bombarder l'hôpital militaire», a-t-il témoigné depuis l'usine. «Nous allons résister tant que nous pourrons (...), si on ne l'avait pas fait, cette horde irait plus loin».

Mais «il ne faut pas exagérer le pouvoir des dirigeants mondiaux» face à la détermination de Moscou, a réagi Mme Verechtchouk. Les efforts internationaux se sont révélés infructueux jusqu'à présent pour sauver ces soldats ukrainiens défendant cette ville à 90% détruite par les bombardements russes.

Elargissements tous azimuts

Dans ce contexte, l'Union européenne s'est engagée vendredi à apporter une aide supplémentaire d'un demi-milliard d'euros pour soutenir le combat de l'Ukraine, en le portant «à 2 milliards d'euros au total».

Les 27 membres de l'Union européenne n'ont cependant toujours pas réussi à se mettre d'accord pour arrêter progressivement leurs achats de pétrole russe, la Hongrie ayant jugé insuffisante la dérogation obtenue.

Les ministres des Affaires étrangères du G7 (Allemagne, France, Italie, Canada, Etats-Unis, Japon et Royaume-Uni), rejoints par leurs homologues ukrainien Dmytro Kouleba et moldave Nicu Popescu, sont réunis jusqu'à samedi. Samedi est également prévue à Berlin une rencontre informelle des ministres des Affaires étrangères de l'Otan au sujet de l'Ukraine.

Un rapport officiel suédois a ouvert vendredi la voie à une adhésion du pays à l'Alliance atlantique, en multipliant les conclusions favorables avant la décision de ce pays nordique et de son voisin finlandais dans les prochains jours, soit deux membres de l'UE restés des décennies hors des alliances militaires. Au grand dam de Moscou.

Autre conséquence, favorable au Kremlin cette fois: une région séparatiste prorusse a fait un pas vers son rattachement à la Russie. Les autorités de cette «république» séparatiste autoproclamée, indépendante de fait de la Géorgie pro-occidentale et occupée par des forces de Moscou depuis une intervention militaire russe en 2008, ont annoncé vendredi organiser le 17 juillet un référendum sur son intégration à la Russie.

(ATS)

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