Emmanuel Macron entame un week-end en forme de calvaire. Sauf miracle, la France entrera de nouveau dans une crise politique majeure ce lundi 8 septembre. Ce jour-là, le premier ministre François Bayrou n’obtiendra pas la confiance d’une majorité de députés, après avoir engagé la responsabilité de son gouvernement comme le prévoit l’article 49.1 de la constitution. Il devra donc présenter sa démission au président de la République. Lequel se retrouvera le dos au mur: condamné à nommer un nouveau chef du gouvernement sans majorité, ou obligé de dissoudre à nouveau l’Assemblée nationale comme il l’avait fait le 9 juin 2024.
Le pire, pour Emmanuel Macron, élu président en mai 2017 puis réélu en juin 2022 pour un second mandat de cinq ans non renouvelable, est qu’il n’a devant lui que des mauvaises solutions d’ici à la prochaine présidentielle, en mai 2027. Un gouvernement minoritaire à l’Assemblée nationale, quelle que soit la personnalité ou la couleur politique de son chef, sera un calvaire politique.
La droite nationale populiste y croit
Une dissolution risquerait d’aboutir à une large victoire de la droite nationale-populiste et europhobe aux élections législatives, alors que le chef de l’Etat a fait du projet européen le socle de son action. Troisième et dernière option, qu’Emmanuel Macron a déjà écartée: sa démission. En clair, le pays n’est plus derrière lui et recoller les morceaux semble impossible.
Des trois options évoquées, la plus probable est celle d’un nouveau premier ministre dont chaque pas pourra se transformer en piège. Nommé en décembre 2024 après la chute de son prédécesseur Michel Barnier, resté seulement six mois au pouvoir puis censuré par les députés, François Bayrou (74) n’a en effet réussi sur rien ou presque.
L’échec de Bayrou
Ce vétéran centriste pensait pouvoir se frayer un chemin entre les groupes politiques, et obtenir le soutien d’une majorité de députés sur un programme de redressement budgétaire, alors que le pays atteint un niveau d’endettement public record de 3350 milliards d’euros. Echec. Bayrou a proposé, le 15 juillet, 44 milliards d’euros d’économies sur environ 1650 milliards de dépenses publiques annuelles. Préconisant le «retour au travail», il y a ajouté la possible suppression de deux jours fériés. Résultat: un rejet massif des parlementaires, en dehors des partis de la coalition gouvernementale. Pour: de 210 à 230 députés sur 577. Contre: tous les autres, de la droite nationale-populiste à la gauche radicale.
Emmanuel Macron sait, en outre, qu’il ne peut pas s’en sortir. La constitution le protège et il peut, bien sûr, aller jusqu’à la fin de son second mandat. Il est très peu probable qu’une procédure de destitution soit engagée contre lui, malgré son impopularité record (moins de 25% d’opinions favorables). Le président français dispose en outre de deux «domaines réservés» qui lui permettent d’agir et d’exister: les Affaires étrangères et la Défense.
L’Ukraine, son dossier
Il pourra donc, dans les deux ans à venir, continuer d’œuvrer aux garanties de sécurité européennes pour l’Ukraine, comme il vient de le faire lors d’une réunion à Paris cette semaine. Mais attention: la paralysie du pays guette. Le vote d’un budget pour 2026 apparaît très improbable à ce stade. Et deux journées d’agitation sociale sont annoncées: l’une de 10 septembre à l’appel du mot d’ordre «Bloquons tout», l’autre le 18 septembre à l’appel des syndicats.
La solution qui conviendrait sans doute le plus à ce président proeuropéen serait la nomination d’un chef du gouvernement au profil «technique» dont l’unique mission serait d’ébaucher un budget «plus petit dénominateur commun», à la fois moins dispendieux et sans économies budgétaires conséquentes. Sauf que la légitimité politique de celui-ci sera nulle, et que la pression pour des législatives anticipées ne fera que s’accroître.
Le Rassemblement national (droite nationale populiste) croit déjà son heure arrivée, et l’idée d’une «union des droites» progresse, défendue par l’ancien président Nicolas Sarkozy. Le Parti socialiste réclame de gouverner, sans avoir de majorité. Ce week-end ne sera pas seulement celui du calvaire politique pour Emmanuel Macron. Il marque, ni plus ni moins, la fin de sa présidence.