Migros l'a annoncé il y a bientôt trois semaines. Le distributeur suisse va se débarrasser de quatre de ses filiales: Hotelplan, Mibelle, SportX et Melectronics vont être vendus. De quoi réjouir certains concurrents du géant orange. Et c'est Aldi Suisse qui s'en frotte particulièrement les mains.
Le discounter n'a pas attendu très longtemps pour réagir à cette annonce croustillante. Le distributeur a commencé son offensive par une publicité dans laquelle le logo de la filiale spécialisée du voyage Hotelplan est mis à mal. Dans la campagne, le logo Hotelplan est détourné dans la phrase «Un hôtel sans plan?» Sans oublier, un peu plus bas, le slogan «Aldi Suisse Tours: le meilleur rapport qualité/prix selon la tradition».
Action de génie ou proposition déplacée?
Après avoir posé sa première mine, Aldi en rajoute désormais une couche. Dans une récente publicité en ligne, le discounter écrit sur fond orange: «Le géant orange t'a laissé tomber?» avec, encore une fois, la promesse d'Aldi «Change pour l'équipe bleue» écrite plus bas – sur fond bleu d'Aldi, bien sûr.
Alors, action de com' de génie ou proposition déplacée? Dans tous les cas, ces publicités sont considérées comme extraordinaires et insolentes – du moins pour la Suisse. Interrogé par Blick, le service de presse d'Aldi Suisse se défend: «Nos publicités doivent divertir et attirer l'attention, c'est la raison pour laquelle nous faisons toujours un clin d'oeil à l'actualité.»
La publicité mentionnée aurait apparemment suscité de nombreux retours positifs. Quant à la réaction de son concurrent, Aldi se montre serein: «Nous sommes convaincus que notre concurrent saura prendre lui aussi cette campagne avec humour», estime la porte-parole.
Protection particulière contre la concurrence?
Qu'en pensent les experts? Interrogé sur l'offensive publicitaire d'Aldi, Javier Gonzalez, propriétaire de l'agence de publicité AQA à Thalwil (ZH), partage son point de vue: «Dans le secteur des voyages du moins, la publicité agressive qui joue sur les autres marques était courante dans les années 90, mais elle n'est plus vraiment d'actualité.» Dommage pour Aldi qui voulait justement s'en inspirer.
Le professionnel de la com' comprend l'intention du discounter dans cette publicité. Mais il n'y voit ni créativité de génie, ni propos choquants. D'ailleurs, la publicité sous cette forme n'enfreint pas la loi fédérale sur la concurrence déloyale. «Sinon, Aldi Suisse ne l'aurait probablement pas diffusée», rappelle Javier Gonzalez.
«Gentleman's agreement» tacite
L'expert s'interroge toutefois sur un point: pourquoi Aldi est-il le seul distributeur à réagir et à se montrer offensif? Les concurrents directs d'Hotelplan, soit Kuoni – qui appartient au groupe commercial Rewe – ou Tui Suisse n'ont pas encore profité de la situation pour faire leur propre publicité.
Javier Gonzalez soupçonne un «gentleman's agreement» tacite au sein de la branche suisse du voyage, où l'on se connaît bien et où personne ne veut rendre le travail de la directrice très appréciée d'Hotelplan Laura Meyer encore plus difficile.
Coop et sa filiale de voyage ITS n'ont, jusqu'à présent, pas non plus utilisé de publicité du genre contre Migros. «En Suisse, de telles réactions restent inhabituelles», rappelle Javier Gonzalez.
«Hotelplan s'écrit sans M»
Qu'en pense Migros? Le service de presse d'Hotelplan a, contre toute attente, pris la publicité d'Aldi avec légèreté. Pour rappel, Hotelplan avait été le premier à réagir sur le plan publicitaire à l'annonce de Migros et avait lancé, en accord avec la Fédération des coopératives Migros (FCM), une campagne sous le slogan «Hotelplan s'écrit sans M».
Une déclaration qui, selon Javier Gonzalez, était plutôt dirigée vers le domaine concerné: «Cela ressemble surtout à une communication interne, adressée au personnel et à la branche du voyage.» Dans tous les cas, Aldi a, une fois de plus, réussi à faire parler d'elle.