Alliance torpillée
Après la défaite de l'UDC à Genève, Le Centre et le PLR partent au clash

Dans un communiqué incendiaire, Le Centre Genève reproche au PLR son soutien à l’UDC, et torpille l’Alliance de droite. Il se défend d'être responsable de la défaite de Lionel Dugerdil. Entre le Centre et l'UDC, le PLR a montré qu'il a fait son choix: ce sera le second.
Publié: 17:02 heures
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Le 19 octobre, Cyril Aellen (à g.), Yves Nidegger et Mauro Poggia ont blâmé Le Centre sur le plateau de Léman Bleu.
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Myret ZakiJournaliste Blick

Un communiqué a mis le feu aux poudres le 19 octobre. Le Centre genevois, sur un ton inhabituellement offensif, y exprime une position ferme, après l’annonce de victoire du Vert Nicolas Walder au second tour de l’élection au Conseil d’Etat, et de la défaite de Lionel Dugerdil, candidat de l'Union démocratique du centre (UDC).

«Echec de la stratégie du PLR»

Le Centre Genève, présidé par le conseiller administratif de Plan-Les-Ouates Philippe Rochetin, y blâme la stratégie du Parti libéral-radical (PLR) pour la défaite de la droite. Regrettant que «beaucoup d’électeurs ne se soient pas reconnus dans une droite isolationniste et une gauche perçue comme dogmatique», le parti estime que le soutien du PLR à l’UDC au sein de l’Alliance de droite a «affaibli la droite libérale», et acte «l’échec de la stratégie portée par les instances PLR». L’Alliance de droite est qualifiée de «machine à perdre». Le communiqué invite enfin le PLR à «refonder l’Entente» avec Le Centre et les Vert’libéraux, «loin des sirènes du populisme», en particulier dans la perspective des Bilatérales III.

Sauf que certains représentants du PLR ne l’entendent pas de cette oreille. Sur Facebook, le conseiller national PLR Cyril Aellen a qualifié dimanche soir le communiqué du Centre de «provocateur» et «inutilement chicanier», signalant que de nombreux membres du PLR «sont outrés et se demandent comment nous pouvons encore discuter avec les responsables du Centre dans ces conditions». Le PLR Genève, présidé par l'entrepreneur onésien Pierre Nicollier, n'a toutefois pas répondu officiellement au Centre.

Un ton qui froisse

Contacté, le président du Centre Philippe Rochetin explique que ce communiqué répond au ton agressif employé contre sa formation. «On a trouvé qu’il y avait un changement de ton de la part de cette Alliance de droite, qui ne devait pas froisser notre électorat au 2ème tour, et qui s’est lâchée hier après-midi.»

Ce qui n’a pas passé: les déclarations qu'ont faites, dans la foulée des résultats, Cyril Aellen, le conseiller national MCG Mauro Poggia, ainsi qu'Yves Nidegger, chef du groupe UDC au Parlement cantonal, sur le plateau de Léman Bleu

«Nous avons, à Genève, une conseillère d’Etat qui est du Centre (ndlr: Delphine Bachmann) qui a moins de légitimité en termes de représentation que l’UDC, et qui est pourtant présente parce que la droite a joué le jeu, a entre autres déclaré Mauro Poggia. La loyauté et la reconnaissance sont des qualités qu’il faut saluer aussi en politique. Je constate malheureusement que ce ne semble pas être le cas du côté du centre droit. Je pense qu’à un moment donné, il faut jouer le jeu.» Avant d’estimer par ailleurs que la seule conseillère administrative du Centre à la Ville de Genève (ndlr: Marie Barbey-Chappuis) est «devenue de couleur rose-verte».

Règlement de comptes

Yves Nidegger a de son côté blâmé Le Centre pour «le sectarisme» à droite, qui explique «que Genève soit faussement et illégitimement gouvernée à gauche». Celui que l'on considère comme l'idéologue de l'UDC Genève rappelait ensuite qu'en 2011 déjà, lors de l'élection complémentaire à la Cour des comptes, le centriste Guy-Olivier Segond lui avait préféré le candidat du mouvement de fauche SolidaritéS. Il conclut que «dégager Mme Bachmann ne va pas apporter de voix supplémentaires là où elles devraient aller, mais ça fera de la place quand même pour plus de sièges de droite». 

Cyril Aellen, de son côté, s'en est aussi pris au Centre pour son lâchage sur la TV genevoise: «En 2023, le Centre avait donné sa parole avec trois autres partis pour l’entier de la législature. Il a renié sa parole, il a fait aujourd’hui pour partie la campagne de Nicolas Walder. C’est son droit le plus strict. Mais si cette clarification n’a pas lieu dans les prochains mois, il sera impossible de travailler avec eux dans une nouvelle configuration comme en 2023. Ils choisiront de faire une nouvelle alliance avec Nicolas Walder en 2028. Et nous appellerons les électeurs du Centre dans les campagnes à voter pour le PLR.»

«Aucun accord signé»

«On savait que tout serait notre faute, quelle que soit la consigne qui serait donnée, réagit Philippe Rochetin, au téléphone avec Blick. Or le 19 octobre était une complémentaire, et il n’y avait aucun accord signé. Au demeurant, s’il y avait un tel élan mobilisateur autour de cette candidature de l’Alliance, on n’aurait pas un taux de participation aussi faible.»

Si Delphine Bachmann a bénéficié de l’Alliance, répond-il, «on a rendu la pareille en votant le ticket Poggia-Amaudruz pour le Conseil des Etats». Au final, estime le président du Centre Genève, «le seul qui n’a pas profité de l’Alliance est le PLR. Il devrait faire attention: dans le Jura, l’UDC progresse à ses dépens». 

Aujourd’hui, Philippe Rochetin insiste qu’il n’y a pas d’alliance comme en 2023. «On a d’ailleurs a appelé cela l’Alliance de droite ET de centre droit, et non l’Alliance genevoise comme en 2023. Le résultat est là. Cela n’a pas marché. Au final, on accusait souvent l’Entente d’être la droite la plus bête du monde ou d’être une machine à perdre, mais l’Alliance n’a pas fait mieux. Un candidat de l’Entente aurait sans doute passé, hier.»

Une «place à prendre»

Pour l’homme fort du Centre Genève, son parti «a une vraie place à prendre. Mon souci principal est de comprendre pourquoi nous assistons à un tel désintérêt politique des citoyens, et de nous rapprocher de leurs préoccupations quotidiennes. Cela compte plus que de savoir si on est de gauche ou de droite». 

Contacté par Blick, Cyril Aellen persiste et signe: «Le Centre a opéré un volte-face, il a changé d’avis, et cela m’attriste». Pour le démontrer, il cite le communiqué du même Centre de 2023, qui affirmait son soutien aux cinq candidats alors réunis au sein de l’Alliance genevoise, et soulignait que seule une droite élargie permettrait d’assurer la prospérité du Canton. 

«Genève est le seul canton où Le Centre, le PLR et l’UDC sont incapables de travailler ensemble, déplore le député PLR, alors qu’à Vaud, Fribourg et Neuchâtel, ils y arrivent. Pendant 15 ans, c’était l’UDC qui ne voulait pas entendre parler du Centre. A présent, c’est l’inverse. Or le PLR ne veut sacrifier aucun des deux pour l’autre!» L'idée de l'Entente ne le tente pas aujourd'hui. «Je regrette la droite qui trahit. Au moins, avec l’UDC, il n’y a pas tromperie sur la marchandise.»

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