Lucernois, méfiez-vous du roi!
Le «roi de Suisse» prend le contrôle de routes lucernoises et veut taxer ses sujets

Jonas Lauwiner, autoproclamé «roi de Suisse», a pris le contrôle de plusieurs routes dans le canton de Lucerne. Les riverains sont indignés, car ce soi-disant souverain veut leur faire payer l'utilisation de ces routes.
Publié: 06.06.2025 à 11:52 heures
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Dernière mise à jour: 06.06.2025 à 11:54 heures
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Autoproclamé roi de Suisse, les pratiques immobilières de Jonas Lauwiner sont légales.
Photo: DR
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Alessandro Perucchi

Il possède près de 150 terrains d'une superficie dépassant largement les 100'000 mètres carrés. L'autoproclamé «roi de Suisse» a récemment été élu au conseil municipal de Burgdorf (BE). Seulement voilà: le trentenaire Jonas Lauwiner n'a ni hérité ni acheté son terrain. Alors comment fait-il? C'est simple: il parcourt les registres fonciers à la recherche de terrains abandonnés. 

S'il en trouve, il peut déposer une demande pour se faire enregistrer comme propriétaire légitime. La plupart du temps, cela ne coûte que quelques centaines de francs de frais. Une démarche qui lui a réussi: au printemps de cette année, son empire s'est considérablement agrandi et il a plus que doublé le nombre de ses terrains. Parmi ceux-ci se trouve un chemin dans la localité de Geuensee, à Lucerne. 

La Rosenweg, une rue d’un village lucernois, suscite la polémique. Selon la «Luzerner Zeitung», Jonas Lauwiner aurait pris possession de cette rue, devançant ainsi une association de copropriétaires qui la convoitait.

«
Les gens sont juste en colère parce que je les ai devancés
Jonas Lauwiner s'exprime sur ses sujets
»

La commune était consciente que la rue n’avait pas de propriétaire officiel. «C’est pourquoi nous souhaitions régulariser la situation», confie une employée communale, citée par le journal. Mais le souverain autoproclamé a pris les devants, doublant la municipalité et les habitants du quartier.

Pour que la rue revienne à la commune ou aux riverains, il pose ses conditions: une compensation financière pouvant aller jusqu’à 150'000 francs, ou alors... qu’on renomme la rue Rosenweg en Lauwinerweg.

Un roi vraiment impertinent

Nous nous sommes renseignés mercredi à Geuensee. «Je n'aurais jamais cru une telle chose possible en Suisse», estime une riveraine. Comme tous les habitants du Rosenweg, elle souhaite rester anonyme. Un autre riverain s'exprime de la même manière et trouve les propositions du «roi» impertinentes: «Je ne veux pas habiter au Lauwinerweg!»

«Je comprends pourquoi les gens sont en colère», nous déclare Jonas Lauwiner au téléphone. Selon lui, ce qui dérange, c’est qu’il les ait simplement devancés. Il assure que tout s’est déroulé dans les règles. En effet, dans certains cantons comme Lucerne, Zoug, Schwytz ou Berne, les terrains sans propriétaire ne reviennent pas automatiquement à l’Etat.

Le roi taxera ses sujets

«Je suis un entrepreneur, comme les autres», affirme le «roi». Il explique qu’il prend en charge l’entretien des rues, mais qu’il peut en répercuter les coûts. Presque toutes les maisons qui empruntent ses routes bénéficient d’un droit de passage. Autrement dit, elles peuvent légalement utiliser la rue mais «elles devront payer pour cela.»

Les habitantes et habitants du Rosenweg recevront bientôt leur première facture. Simplement pour le fait… d’y habiter. Un modèle lucratif pour Jonas Lauwiner: il emploie plusieurs personnes chargées de l’entretien et de la gestion d’environ 80 rues lui appartenant. Il travaille encore dans l’informatique, comme il nous l’avait confié en avril. Il ajoute aujourd'hui: «Je n’ai plus besoin de cet argent. Les affaires immobilières suffisent.» 

Les riverains ne veulent pas payer

À deux communes de là, à Mauensee (LU), la situation ressemble à celle de Geuensee. Le chemin de Chottenrain a lui aussi été «conquis » par Jonas Lauwiner. Mais ici, les habitants n’acceptent pas facilement ce nouveau rapport de propriété. La commune serait en train de négocier avec le nouveau propriétaire. L'entrepreneur, de son côté, reste évasif: «Je ne peux encore rien dire à ce sujet.»

Si aucun accord n’est trouvé, les habitants de Mauensee pourraient eux aussi bientôt recevoir une facture pour l’entretien de la route. Une habitante se dit furieuse: «Qu’il soit sûr d’une chose: il ne recevra pas un centime de notre part!» 

Les sujets «n'ont qu'à se manifester»

Si les riverains de la rue Rosenweg à Geuensee ne veulent pas recevoir de factures de sa part, ils n'ont qu'à racheter la route, assure-t-il. La collaboratrice de la commune a déclaré à la «Luzerner Zeitung» qu'un tel montant, jusqu'à 150'000 francs, ne pouvait tout simplement pas être payé. 

Un argument que l'intéressé n'accepte pas. Il a fait le calcul: si tous les riverains s'unissaient, la route coûterait probablement 2000 francs par personne. «Mais personne ne veut payer, tout le monde ne fait que pleurer». En outre, il est toujours ouvert aux négociations. La commune et tous les riverains auraient reçu ses coordonnées, «mais personne ne s'est manifesté».

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