Pascal Broulis n'est pas un nouveau venu dans le paysage politique romand. Pourtant, ce dimanche 12 novembre, c'est la première fois de sa carrière que l'éléphant du Parti libéral-radical (PLR) vaudois a gagné le droit de revêtir un costume fédéral.
Au final, son duel face au Vert Raphaël Mahaim n'a pas été aussi serré que la gauche l'aurait espéré. Le PLR a recueilli 53,6% des voix, soit 89'058 suffrages, contre 44,92%, soit 15'000 voix de moins, pour son adversaire du jour.
Dans un fair-play très vaudois, tous les acteurs de ces élections fédérales se sont retrouvés en vieille ville de Lausanne pour se saluer et se féliciter cordialement. Pascal Broulis s'est ensuite rendu au stamm de son parti, le XIIIe Siècle. C'est en marge de cette célébration avec les siens que le nouveau sénateur a répondu à nos questions au téléphone. Interview.
Pascal Broulis, au vu des résultats du jour, c'est l'émotion qui prime. Avez-vous craint durant cette campagne d'être devancé par Raphaël Mahaim?
L'émotion est totale. Ce n'était pas acquis et il a fallu se battre. Comme dans tout pays démocratique, à la fin, c'est le peuple qui décide. Mais il y a eu des moments de doute. Ma grande crainte, au vu de mon très bon résultat au premier tour, c'était que tout le monde se dise que mon élection allait passer comme une lettre à la poste et ne se déplace même pas. Je suis très reconnaissant du soutien que j'ai eu de mon parti et de tous ceux qui ont travaillé sur cette campagne. C'est aussi leur victoire à eux.
Face au candidat vert, qu'est-ce qui a joué en votre faveur?
La mobilisation des jeunes du PLR était assez incroyable. Cette véritable action militante n'est pas courante chez nous. On a aussi décidé d'être omniprésents. Je suis allé partout. Le matin et le soir, à des congrès, des séminaires et des rencontres. Je ne restais pas juste trois minutes, mais des séances entières. Je partais à minuit et demi, et le lendemain, je me levais à 6h pour me rendre sur des stands que des jeunes mettaient en place dans des marchés.
Mais est-ce que cette stratégie était vraiment différente de celle du champion écolo?
Je suis resté calme. Je n'ai jamais attaqué Monsieur Mahaim. Jamais. Ce n'est pas ma conception de la politique. Moi, j'attaque les idées. Ma politique, c'est de rassembler les gens, de les respecter, s'ils vous respectent en retour bien sûr. Je ne coupe jamais la parole. J'ai défendu des idées et des valeurs qui font la Suisse, telle qu'elle a été fondée par mon parti: cohésion, respect de ceux qui vieillissent et des jeunes qui cherchent des jobs ou qui sont en formation. J'ai abordé des thèmes qui n'ont pas du tout été débattus au premier tour.
Lesquels?
Que ça plaise ou non à la gauche, j'ai placé plusieurs fois l'armée. Quand on voit ce qui se passe en Ukraine, en Israël ou au Moyen-Orient, c'est quand même l'un des gardiens de la démocratie. On a parlé d'Europe, ou encore d'économie. Enfin. Parce que l'argent ne pousse pas sur les arbres. Je pense que j'ai gagné des points à chaque fois que nous en parlions. Ces thèmes, pourtant essentiels à la population, étaient moins abordés par mes adversaires.
Vous allez retrouver votre ancien collègue socialiste Pierre-Yves Maillard au Conseil des États. Le duo Brouillard et Malice fonctionnera-t-il aussi bien à Berne?
Ce sera différent, car les thèmes seront plus larges au niveau suisse. Je sais que Monsieur Maillard sera attentif à ce que veut le gouvernement. Et moi, c'est la même chose. Nous devrons trouver des accords, pour éviter de tout s'envoyer à la figure avant de demander au peuple de trancher. Il y aura forcément des grands dossiers à traiter, dont un très sensible pour les jeunes, pour l'économie ou pour les travailleurs: l'Europe. Il faudra trouver des solutions.
Y compris sur l'économie?
Monsieur Maillard est un syndicaliste. Il sait la valeur d'un franc et il sait que chaque franc de plus est important. Je me réjouis de construire avec lui, même si nous n'arriverons pas tout le temps à des compromis. Sur les grands thèmes, il nous faudra convaincre la Suisse alémanique. Le canton de Vaud est le troisième plus grand du pays. C'est un canton ouvert, qui intègre beaucoup de gens venant s'installer en Suisse. Les deux cantons lémaniques créent de la richesse: 25% de l'impôt fédéral direct vient de Vaud et Genève alors que nous représentons 15% de la population. Il faudra que l'on se batte pour imposer un point de vue romand.
L'échelon fédéral, c'est une première pour vous. Le sénateur Pascal Broulis sera-t-il fait du même bois que le conseiller d'État vaudois?
Ce sont des activités différentes. Mais je connais très bien la Chambre haute, puisque j'ai présidé pendant quatre ans la Conférence des gouvernements cantonaux et durant plus de dix ans la Fondation pour la collaboration confédérale. Sous la coupole, nous débattrons de dossiers que je connais et que je défendais déjà comme conseiller d'État à l'époque.