Le français boudé dans les écoles... et sous la Coupole
A Berne, les élus alémaniques se fichent de comprendre les Romands

La Suisse alémanique se dispute sur l'enseignement français à l'école. Mais qu'en est-il des connaissances en français des parlementaires à Berne? Blick est allé à la rencontre d'élus Romands, et leurs avis sont mitigés.
Publié: 05:11 heures
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«Vous mettez en péril un compromis helvétique durement négocié», déclare Christophe Darbellay, conseiller d'État valaisan et ancien président du Centre.
Photo: keystone-sda.ch
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Anna Clara Kohler

Fini les «Bonjour» et «Ça va?» dans les écoles primaires en Suisse allemande? Cette décision est actuellement en discussion. Plusieurs cantons suisses alémaniques envisagent de supprimer l’enseignement précoce du français. Face à cette tendance, le Conseil fédéral menace désormais d’imposer le maintien de son enseignement dès le plus jeune âge. Car en Suisse romande, ces projets suscitent une vive inquiétude: il va de la cohésion nationale! 

Mais concrètement, quel rôle jouent les langues nationales dans la cohésion? Sous la coupole du Palais fédéral, le multilinguisme fait partie du quotidien. Une règle non écrite veut que chacun s’exprime dans sa langue nationale. Mais est-ce vraiment le cas? 

Des questions en français sans réponse

Dans la salle des pas perdus du Palais fédéral, Damien Cottier, chef du groupe du Parti libéral-radical (PLR) et conseiller national neuchâtelois, incarne parfaitement cette minorité francophone au Parlement. Or, il mène toujours ses séances de commission en deux langues. «Un collègue de Suisse alémanique ne parlerait probablement qu’en allemand», observe-t-il. 

Certains députés alémaniques adoptent même une attitude qui consiste à dire que ce n’est pas grave si l’on ne comprend pas les Romands. Damien Cottier insiste: «Il est important d’apprendre les langues nationales des autres.»

«Si nous devons parler toute la journée dans l’autre langue, c’est difficile», explique Samuel Bendahan, conseiller national socialiste vaudois et coprésident du groupe. Selon lui, l’allemand domine largement dans les commissions et l’administration fédérale. Il n’est pas rare que des questions en français restent sans réponse. «En tant que minorité, c’est un problème», tranche-t-il. 

Le compromis helvétique en jeu

Peu connaissent ce dossier aussi bien que Christophe Darbellay. L’ancien conseiller national et président du Centre Suisse, aujourd’hui conseiller d’Etat valaisan et président de la Conférence des directeurs cantonaux de l’instruction publique, a dû, lui aussi, souvent s’exprimer en allemand pour se faire entendre. «Pour être compris en tant que Romand, il faut parler français à la commission puis répéter son message en allemand», dit-il.

Christophe Darbellay déplore les évolutions actuelles dans les cantons alémaniques. «Ils mettent en péril un compromis helvétique durement négocié.» À ses yeux, le recul du français à l’école primaire fragilise la «Willensnation» (littéralement: «Nation fondé sur la volonté), le socle de la cohésion nationale.

Pas d'anglais entre Suisses

Damien Cottier plaide également pour un geste fort en faveur de l’unité nationale. Il ne comprend pas «qu’on doive parler anglais entre Suisses».

Car derrière la langue, il y a aussi la culture. Romands et Alémaniques n’ont pas toujours la même approche des débats, rappelle Damien Cottier. D’où l’importance de maintenir l’enseignement précoce des langues nationales. «Nous avons un problème si les Cantons décident de faire débuter leur apprentissage plusieurs années plus tard.»

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