Donald Trump met les entreprises pharmaceutiques suisses sous pression: le président américain menace d'imposer des droits de douane punitifs sur les produits pharmaceutiques, ce qui a notamment contraint les deux géants locaux du secteur, Novartis et Roche, à agir. Novartis a annoncé il y a près de deux semaines vouloir investir 23 milliards de dollars dans des usines américaines.
Son concurrent Roche lui a emboîté le pas mardi en annonçant des «investissements historiques» de 50 milliards de dollars aux Etats-Unis. Parallèlement, le secteur fait désormais un lobbying offensif en Europe.
Ainsi, le patron de Novartis Vas Narasimhan demande des prix plus élevés pour les médicaments en Europe. Il a exprimé cette exigence dans une lettre ouverte parue dans le journal économique britannique «Financial Times». Vas Narasimhan a rédigé cette lettre en collaboration avec Paul Hudson, CEO du géant pharmaceutique français Sanofi.
L'Europe doit se rapprocher des prix américains
Les deux chefs d'entreprise dressent un tableau noir de la situation actuelle. Certes, l'Europe abrite quelques-unes des plus importantes entreprises biopharmaceutiques du monde, mais cette position est menacée: «Dans la nouvelle situation mondiale, le modèle pharmaceutique européen – produire en Europe et exporter vers les Etats-Unis – ne peut pas perdurer», écrivent-ils. Preuve que les menaces douanières de Trump ont un impact sur les patrons de l'industrie pharmaceutique.
Actuellement, les contrôles de prix et les mesures d'économie affaiblissent l'attractivité du marché. Concrètement, Nas Narasimhan et Paul Hudson exigent que l'Union européenne introduise un prix catalogue européen qui se situe dans la fourchette des prix nets américains.
Selon les estimations des autorités étasuniennes, les Américains paient les médicaments et les génériques presque trois fois plus cher que les pays comparables. En outre, l'UE doit fixer un objectif de dépenses pour les médicaments et les vaccins afin que les innovations soient «justement récompensées».
L'association suisse de la branche met également en garde
Après les innovations annoncées aux Etats-Unis, le secteur pharmaceutique européen met donc maintenant la pression chez lui. Mardi, l'association suisse de la branche Scienceindustries s'est également montrée inquiète: elle a mis en garde contre le fait que la Suisse pourrait être reléguée au second plan en tant que site de production. «La détérioration de l'attractivité de la Suisse n'a rien à voir avec Donald Trump», a déclaré le directeur Stephan Mumenthaler au «Tages-Anzeiger». Selon une étude, l'attractivité diminue depuis un certain temps dans plusieurs domaines.
Que les revendications soient justifiées ou non, l'économie d'exportation suisse est fortement dépendante de l'industrie pharmaceutique. Un document sur la branche chimique et pharmaceutique suisse, publié il y a quelques semaines par l'économiste Johannes von Mandach de la société de conseil économique Wellershoff & Partners, montre à quel point.
«Sans la chimie et la pharmacie, notre prospérité par habitant aurait baissé l'année dernière», peut-on lire dans cette étude. Ce qui est inquiétant, c'est qu'"il ne s'agit pas d'un effet exceptionnel et unique, mais d'une tendance à long terme», conclut Johannes von Mandach.