En quête du bonheur
Ilias Panchard: «Une des clés du bonheur, c'est de trouver ce qui nous anime»

Cet été, Blick part en quête d’une chose aussi universelle qu’insaisissable: le bonheur. Chaque jour, une voix romande se confie. Pas pour donner des leçons, mais pour partager une trajectoire, des doutes, des petits riens. Aujourd'hui: l'élu Vert Ilias Panchard
Publié: 02.08.2025 à 20:02 heures
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Ilias Panchard est conseiller communal Vert à Lausanne et président de l’association «Sortir du nucléaire».
Photo: keystone-sda.ch
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Camille KrafftJournaliste Blick RP

Le bonheur. Derrière ce mot galvaudé, chacun cache une idée, une sensation, un souvenir, parfois un rêve. A travers une série d’entretiens intimes et légers, nous avons demandé à des personnalités de tous horizons ce que signifie, pour elles, être heureux. Nos interlocuteurs ont accepté de se confier. Pas pour donner des leçons, mais pour partager une trajectoire, des doutes, des petits riens — et peut-être, offrir aux lecteurs une boussole intérieure.

Conseiller communal à Lausanne, Ilias Panchard est du genre hyperactif. Ecologiste et altermondialiste, il milite contre le nucléaire et pour le droit d'asile, prône une meilleure répartition des richesses et veut désarmer les policiers. Des luttes aux antipodes de la tendance actuelle, mais cela ne le décourage pas. Car le trentenaire en est persuadé: il est possible d'être heureux dans un monde qui tangue. 

Ilias Panchard, qu’est-ce qui vous rend heureux dans votre vie de tous les jours?
Je n’ai pas besoin de vivre des événements incroyables pour ressentir du bonheur. Si j’ai l’impression d’avoir été utile, je me sens bien à la fin de ma journée. Par ailleurs, je n’aimerais pas avoir un quotidien monotone. Pour moi, c’est une vraie chance de pouvoir réaliser des activités variées, qui vont dans tous les sens. Et aussi d’échanger avec des proches à ce sujet, que ce soit dans le domaine associatif, personnel ou politique.

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Ce qui me rend particulièrement heureux, c’est de soutenir une cause qui est peu connue
Ilias Panchard, élu écologiste
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Est-ce que le bonheur passe par l'engagement?
Ce qui me rend particulièrement heureux, c’est de soutenir une cause qui est peu connue, de défendre des gens qui ne sont pas forcément ceux qu’on voit ou qu’on entend le plus. J’y trouve la justification de ce pourquoi je m’engage.

Que faut-il comme ingrédients pour atteindre le bonheur?
Pour moi, c’est une somme de différents éléments, un équilibre. Pour éprouver un certain bonheur, il faut être en bonne santé, vivre en cohérence avec soi-même, ressentir de la joie dans ce qu’on fait et pouvoir le partager avec d’autres personnes. Je ne serais pas heureux si l’un de ces paramètres était défaillant.

Pour certains philosophes, le bonheur, c’est l’absence de malheur. Qu’en dites-vous?
Cela me parle assez. Parfois, on se rend compte qu’on était heureux lorsqu’on est confronté à un événement difficile, comme un deuil ou une rupture. Et si l’on n’a rien vécu de douloureux, on peut ne pas avoir conscience de vivre dans le bonheur.

Vous êtes un écologiste, très marqué à gauche. Peut-on être heureux malgré les guerres et la crise climatique?
J’ai toujours été très sensible à ce qui se passe dans le monde, avec une approche altermondialiste. Mais l’actualité ne doit pas nous pousser à sous-estimer le fait que, à titre personnel, on a une belle vie. Il est possible d'être heureux même si, au niveau collectif, on est au bord de la rupture à plein de niveaux. Ce n'est pas contradictoire. On m'a aussi déjà demandé si je voulais des enfants, alors que beaucoup de gens y renoncent pour des raisons écologiques. Je comprends ces personnes. Mais à titre personnel, si je refusais d'avoir des enfants, cela remettrait en question ma conviction qu'en s'engageant, on peut avoir de l'impact. 

Il y a souvent des malentendus autour du bonheur, non?
On est enclin à se réfugier dans le matériel et à vivre à travers le regard des autres, notamment via les réseaux sociaux. Alors qu’en réalité, ce qu’on est beaucoup à rechercher, c’est une forme d’émerveillement face à la beauté du monde, avec une dimension spirituelle. Pas dans le sens religieux, mais dans celui d’un questionnement: est-ce qu’il y a quelque chose qui nous dépasse? Beaucoup de gens s'interrogent aujourd’hui sur leur vraie place dans le monde. C’est une période assez dure à ce niveau parce qu’au plan politique, il n’y a pas beaucoup d’alternatives. La tendance est à ne pas prendre trop de risques, à laisser passer l'orage. Je suis convaincu que c'est la pire chose à faire. 

Justement, c’est stimulant d’être dans la lutte, non?
Oui, mais il faut réussir à avancer collectivement. Seul, on n’arrive à rien.

Le moment le plus heureux de votre vie, c’était quand?
Quand je me suis marié, c’était une période géniale. Et sinon autour de la vingtaine, dans l’insouciance et la spontanéité qui caractérisent cet âge. Avec des amis, on préparait nos sacs à dos en dix minutes et on partait à vélo sur les cols ou en randonnée. C’était la liberté.

Y a-t-il des choses que vous avez arrêté de faire pour être plus heureux?
Cesser de cacher mes émotions. J’ai dû faire un travail sur moi-même pour apprendre à les exprimer. Sans clichés, ce n’est pas si facile pour un jeune homme. 

Avez-vous besoin de solitude pour être heureux?
Oui, j’ai parfois moins de solitude que ce qu’il me faudrait. J'en trouve dans la course à pied, notamment en montagne. Ce n’est pas une activité que j’aimerais partager avec d’autres personnes.

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Je pense qu'il faut construire de quoi être heureux au quotidien. Car il est peu probable que le bonheur vous tombe dessus spontanément.
Ilias Panchard, élu écologiste
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Est-ce qu’il y a un livre ou un film qui vous a fait réfléchir au bonheur?
«Into the wild», le livre et le film (l’histoire, inspirée de faits réels, d’un brillant étudiant américain qui plaque tout pour partir seul en Alaska, ndlr). Je me suis beaucoup interrogé sur la quête du héros, même s'il connaît une fin tragique. 

Est-ce qu’il existe une clé du bonheur que vous aimeriez transmettre à d’autres personnes?
Je pense qu'il faut construire de quoi être heureux au quotidien. Car il est peu probable que le bonheur vous tombe dessus spontanément, parce que vous gagnez de l’argent ou que vous faites une rencontre: l’enjeu principal, c’est de trouver ce qui nous anime. Trouver sa place, même modeste, dans le monde. 

Votre chienne est en train d’aboyer derrière vous. Est-ce qu’elle contribue à votre bonheur?
Oui, elle y participe. Cet accueil quotidien qu’elle nous réserve quand on rentre, c’est assez unique. Je n’avais jamais eu d’animaux de compagnie avant, à part des poissons rouges. Et aujourd’hui, je ne pourrais pas imaginer vivre dans un lieu sans chien. 

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