Gaspard Koenig, philosophe star
«Nos sociétés ne sont pas organisées pour être heureuses»

Sous stress, la Suisse romande n'a plus envie de travailler, ou alors beaucoup moins, selon un sondage représentatif de Blick. Est-ce réalisable? Invité par Léman Bleu pour un débat, le philosophe star Gaspard Koenig y croit. À voir ce mercredi à 20h ou en replay.
Publié: 13.12.2023 à 19:41 heures
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Dernière mise à jour: 15.12.2023 à 10:39 heures
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«Aujourd'hui, on consomme du pétrole comme des malades, regrette Gaspard Koenig, sur le plateau. Et que fait-on avec ce pétrole qui devrait nous rendre hyper heureux? On fait des embouteillages, des tanks et du Candy Crush.»
Photo: KEYSTONE/DPA/ROLF VENNENBERND
Blick

Ces deux-là étaient faits pour se rencontrer. Léman Bleu a réuni, sur un plateau, un sondage de Blick et le philosophe star Gaspard Koenig, vainqueur des prix Interallié et Jean Giono, mais aussi finaliste du Goncourt 2023 pour son roman «Humus».

Le sondage, réalisé en collaboration avec M.I.S Trend, révèle que 50% des personnes actuellement en emploi arrêteraient de travailleur demain si elles le pouvaient. En particulier parce que 70% d'entre elles sont étouffées par le stress.

Le livre de l'essayiste parle de deux jeunes ingénieurs en agronomie en quête de sens. L'un tente de s'accomplir façon start-up nation, l'autre de manière plus décroissante.

La qualité de vie, version Gaspard Koenig

Peut-on tout avoir? Bosser moins, gagner plus, sans perdre en qualité de vie, sans que le système s'effondre? Dans «Le PoinG», animé par la journaliste Laetitia Guinand, l'écrivain français, défenseur du revenu inconditionnel de base, a esquissé une réponse à faire bondir la droite.

«Parlons de notre qualité de vie aujourd'hui, amorce Gaspard Koenig durant l'émission tournée mercredi dans l'après-midi. Aujourd'hui, on consomme du pétrole comme des malades. Et que fait-on avec ce pétrole qui devrait nous rendre hyper heureux? On fait des embouteillages, des tanks et du Candy Crush.» Pour l'auteur, «nos sociétés ne sont pas organisées pour être heureuses et à avoir une bonne qualité de vie, peut-être tout le contraire».

«Des stratégies managériales hallucinantes»

Également invité à s'exprimer lors de ce débat — à voir ce mercredi à 20h sur la chaîne genevoise ou en replay –, l'éthicien Bertrand Kiefer dénonce de son côté une augmentation de la «toxicité du travail».

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«Il y a des stratégies managériales absolument hallucinantes qui se sont répandues, déplore le rédacteur en chef de la 'Revue médicale suisse'. Les hôpitaux sont par exemple gérés comme une industrie!» À travers notamment des logiciels d'intelligence artificielle.

Aujourd'hui, dans le monde du travail, «l'humain est chosifié», observe Bertrand Kiefer.
Photo: DR

Résultat? «Ça génère d'énormes souffrances parce que l'humain est chosifié dans le processus», peste le médecin. Difficile dans ces circonstances de trouver du sens dans son taf.

Moins de tolérance à la frustration?

Il parait loin le temps où les bons Suisses vivaient pour — et se définissait par — leur boulot. Philippe Val, invité permanent du télécrochet, à lui une autre explication pour exprimer le changement de notre rapport au monde professionnel. Pour «la critique globale du travail de Mai 68 a fait beaucoup de mal».

L'ex-directeur de «Charlie Hebdo» et de France Inter note en outre que la nouvelle génération, dite «woke», n'a aucune tolérance à la frustration. Notre enquête démontre toutefois que le désamour de la population romande pour le travail traverse les générations.

Davantage de temps libre pour surconsommer?

Les gens veulent du temps libre, mais pour faire quoi? Sait-on vraiment ce qu'on se veut? Aussi autour de la table, notre journaliste Amit Juillard, auteur d'un commentaire appelant à rendre le week-end de trois jours obligatoire, constate des comportements «ambivalents».

D'un côté, les gens font de la surconsommation un loisir — qui a l'énergie pour faire autre chose? De l'autre, il y a celles et ceux qui cherchent une voie alternative, qui tentent des aventures plus créatives, comme durant la pandémie et ses confinements. Période durant laquelle on a appris que travailler moins ne rend pas forcément plus malheureux.

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