Associations et agriculteurs montent au créneau
La nouvelle mesure de Berne sur le foie gras fait polémique

Le Conseil fédéral introduit un étiquetage obligatoire pour les produits animaux issus de traitements douloureux. Mais les défenseurs des droits des animaux et les petits agriculteurs critiquent cette mesure, la jugeant insuffisante.
Publié: 08:57 heures
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Depuis juillet, la Suisse impose une déclaration obligatoire pour les produits étrangers issus de traitements douloureux.
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Joschka Schaffner

En Suisse, le gavage forcé des oies et des canards est interdit, mais le foie gras étranger, en vente dans nos rayons, échappe à cette interdiction. C'est pourquoi, sans en interdire l'importation, le Conseil fédéral a introduit des déclarations obligatoires à partir de juillet: la viande, les œufs et le lait doivent être réétiquetés s'ils proviennent d'animaux ayant subi des interventions douloureuses sans anesthésie.

Selon le gouvernement fédéral, cette mesure vise à accroître la transparence envers les consommateurs. Mais les défenseurs des droits des animaux, en revanche, ne sont pas du tout satisfaits de cette solution. «C'est purement symbolique», dénonce Tobias Sennhauser, de l'association Tier im Fokus. En effet, la législation continue d'autoriser des interventions douteuses sur les animaux d'élevage, qui n'ont pas besoin d'être déclarées. 

Tout n'est pas rose en Suisse

De nombreuses méthodes en Suisse sont dénoncées par les défenseurs des animaux:

  • Les dents des porcs peuvent être limées sans anesthésie.

  • Pour les poulets, la législation autorise le «débecquage», une technique qui consiste à couper la pointe du bec afin d'éviter que les animaux ne se blessent entre eux.

  • Certaines interventions sont réalisées sous analgésique, mais peuvent ensuite provoquer des douleurs, comme la castration des porcelets ou l’écornage des vaches.

«Les Suisses sont encore trop peu informés de ces interventions», déclare Tobias Sennhauser. «La législation suisse sur la protection des animaux doit aussi être améliorée, elle stagne depuis 2008.» A l'inverse, d'autres pays rattrapent progressivement leur retard.

Barrage à l'initiative sur le foie gras

Avec cette déclaration obligatoire, le Conseil fédéral espère surtout contrer l'initiative sur le foie gras, qui veut interdire les produits issus du gavage en Suisse. Une telle option n'est pas envisageable pour le gouvernement, qui rejette cette initiative populaire, pourtant soutenue par de nombreuses organisations de protection animale.

Parmi celles-ci, l'association de Tobias Sennhauser critique la décision du gouvernement fédéral. «En Suisse alémanique en particulier, les produits nouvellement étiquetés n'ont pratiquement aucune influence», affirme le défenseur des droits des animaux. Au contraire, la nouvelle réglementation trompe les consommateurs en leur faisant croire qu'ils peuvent acheter des produits d'origine animale suisses en toute quiétude.

Pour le défenseur des animaux Tobias Sennhauser de Tier im Fokus, la nouvelle obligation de déclaration n'est que de la poudre aux yeux.
Photo: Jessica Ladanie

Quoi qu'il en soit, Tobias Sennhauser est fondamentalement critique de ces obligations de déclaration. «Pour la vraie fourrure, par exemple, nous constatons que ces mesures ne fonctionnent pas bien», rétorque-t-il. Il s'attend désormais à ce que la même chose se produise avec le foie gras, les cuisses de grenouilles et d'autres produits similaires, car, selon la législation alimentaire, les contrôles ne sont effectués que «de manière aléatoire».

Les petits agriculteurs en colère

D'autres associations ne se réjouissent pas non plus de ce nouveau régime. La Fondation pour la protection des consommateurs, par exemple, critique la période de transition extrêmement généreuse de deux ans accordée par le gouvernement fédéral aux fabricants et aux entreprises.

Si l'Association des petits agriculteurs salue ces directives sur le principe, elle écrit dans un communiqué que le fait que le Conseil fédéral n'inclue pas les produits ovins et caprins n'a aucun sens.

Tout comme les défenseurs des droits des animaux, les petits agriculteurs réclament une interdiction des importations. L'association affirme que cette mesure serait plus simple à mettre en œuvre, plus cohérente et qu'elle ne devrait pas se limiter uniquement aux produits animaux. La Confédération devrait aussi mettre fin immédiatement à la commercialisation des légumes contenant des pesticides interdits en Suisse.

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