Traverser la Suisse en courant et dans les deux sens: c’est le défi qu’un auditeur financier zurichois s’est lancé. Il a relié Zurich à Genève, puis Constance à Lugano. Deux traversées, une seule idée: dessiner une croix sur la carte du pays. Le tout, sans sponsors, sans équipe, mais avec une cause en tête: la lutte contre les violences domestiques.
Chaque kilomètre était donc dédié à Spring Act, une start-up bernoise qui a créé une intelligence artificielle pour aider les femmes victimes de violences conjugales. «En Suisse, selon les statistiques, le nombre de femmes touchées par la violence domestique est en augmentation. C’est un sujet dont on ne devrait plus avoir à parler en 2025, mais qui reste d’actualité», explique-t-il.
Courir pour une cause
Son projet était entièrement autofinancé. Pas de collecte d’argent, pas de levée de fonds. Juste de la visibilité. Sur Instagram et LinkedIn, il a raconté son parcours jour après jour tout en promouvant Spring Act.
Tout a commencé par une vidéo: un coureur traversant l’Afrique du Sud à la Tunisie. De là, l’envie d’en faire autant. Le Canada? Trop risqué. Alors, la Suisse. Son pays d'accueil, lui qui vient de France. «Ici, on sait qu’on trouvera de l’eau et de l’aide tous les 20 ou 30 kilomètres.»
L’idée née sur YouTube
La première diagonale, Zurich–Genève, réalisée en 9 jours, avait une valeur symbolique. Il vit à Zurich, son frère à Genève. La seconde, qui relie Constance à Lugano (en 16 jours), complète le dessin. «J’ai vu que personne n’avait documenté une traversée Est–Ouest et Nord–Sud en solo. Je me suis dit: pourquoi pas moi?»
Seize jours de course, entre 4 et 9 heures par jour selon le relief. «Le plus difficile, ce n’est pas le corps, c’est la tête, se persuader qu'on peut encorer aller de l'avant», confie-t-il. Il a couru, marché, filmé, dormi peu. Une nuit blanche dans un karaoké tessinois après une réservation annulée, un glissement de terrain évité de justesse près du Gothard. Le genre d’aventures qu’on ne prévoit pas dans un tableur Excel.
Le plus dur, c’est la tête
Lors de la première traversée, il réservait ses hôtels au jour le jour. Pour la seconde, il rentrait souvent dormir chez lui à Zurich après chaque étape. «Tant que c’était à moins d’une heure de train, ça valait le coup. Après, non.»
Son projet a fait parler sur les réseaux sociaux, mais il ne cherche pas de validation. Et ces deux diagonales suisses ne sont qu’un début. Il rêve désormais d’un tracé continental: du Portugal à l’Estonie, à travers l’espace Schengen.
«Ce serait une manière de promouvoir la liberté de mouvement, une valeur qu’on oublie trop souvent.»
Dégénéré, mais réfléchi
Sous son pseudo de Dégénéré Runner, il affiche un ton libre et ironique, loin du sérieux de la finance. «Je viens d’un milieu très cadré. Mettre un peu d’humour et de dérision dans tout ça, c’est une façon de respirer.» Fou? Pas vraiment. Calculé, plutôt. «Même les défis les plus fous demandent du sérieux.»
De ces deux traversées, il garde surtout des images: les vallées du Tessin, les montagnes du Gothard, les appels passés à sa famille pour tenir dans la solitude. Et un lieu au-dessus des autres: Lucerne. «C’est la plus belle ville de Suisse, entre charme médiéval et modernité. Et les Lucernois sont les plus sympas.»