Un commentaire de Richard Werly
Sauver l'Ukraine va nous coûter cher

S'il en était besoin, le sommet de Washington a dissipé toute illusion. Les Etats-Unis n'abandonnent pas les Européens aux côtés de l'Ukraine. Mais tout cela va nous coûter cher. Très cher même, estime notre journaliste Richard Werly.
Publié: 09:23 heures
|
Dernière mise à jour: 09:24 heures
Partager
1/5
A la Maison Blanche, les sept dirigeants européens ont fait front face à Donald Trump.
Photo: IMAGO/ZUMA Press Wire
Blick_Richard_Werly.png
Richard WerlyJournaliste Blick

Il y a le coût politique. Le coût diplomatique. Et le coût financier. Impossible désormais de se voiler la face et de fermer les yeux: une paix durable en Ukraine nous coûtera très cher. Normal, puisqu’il s’agit de la défense de l’Europe face à la Russie? Sans doute. Mais n’oublions pas que cette guerre a aussi été, largement, le fait de la volonté des Etats-Unis de tenir tête à Vladimir Poutine.

Or aujourd’hui, les dés ont roulé. Donald Trump veut bien négocier. Il semble même prêt à offrir des «garanties de sécurité» aux Européens. Mais tout devra être payé cash. L’assurance-vie américaine à la mode Trump est une affaire transactionnelle pendant que celui-ci, par ailleurs, entend bien redémarrer une relation économique fructueuse avec la Russie.

Sonnante et trébuchante

Redire cette évidence sonnante et trébuchante peut sembler choquant. Certains diront même qu’elle est «très, voire trop suisse». Mais regarder les faits s’impose. Oui, les sept dirigeants européens ont bien obtenu, lundi 18 août à la Maison Blanche, un soutien de Donald Trump à un éventuel futur déploiement d'une «force de réassurance» en Ukraine, sans que l’on en connaisse encore les contours et les moyens.

Oui, le divorce transatlantique n’a pas eu lieu. Oui, l’OTAN existe encore comme l’alliance militaire la plus puissante au monde, dissuasive pour le Kremlin. Mais l’affaire est entendue pour le président des Etats-Unis: le Vieux Continent est d’abord un client. Tout soutien, sur le plan du renseignement et des moyens militaires, prendra inévitablement la forme d’une facture.

Ukraine dévastée

Le plus préoccupant, dès lors, est le paysage qui se dessine pour l’Union européenne et ses partenaires immédiats, dont la Suisse. L’Ukraine dévastée après trois années de guerre devra être soutenue à bout de bras pendant des années. Sa reconstruction coûtera des sommes astronomiques. Son intégration promise dans l’UE (peut-être accélérée) aura aussi un coût économique, social et agricole.


Les Etats-Unis, pendant ce temps, nous imposent des droits de douane qui ressemblent à du racket, en raflant les investissements industriels et les commandes énergétiques, en plus des contrats militaires, type F-35 ou Patriot (dont la Suisse risque d’attendre longtemps la livraison). Tout en signalant à tous nos partenaires économiques à travers le monde qu’il vaut mieux acheter «Made in USA» que «Made in Europe».

L’énergie russe perdue

Ajoutez à cela, si la paix en Ukraine survient, de prochains accords économiques entre la Russie et les Etats-Unis et la coupe sera pleine. L’Europe aura perdu l’énergie russe bon marché. Elle aura aussi perdu les terres rares ukrainiennes raflées par Trump. Et elle devra, pour accéder au marché chinois, ouvrir davantage son marché aux produits «Made in China». C’est ce scénario qu’il faut déjouer d’urgence.

Or pour cela, une seule solution est sur la table: unifier, renforcer, dynamiser d’urgence le marché européen. Dans le monde lunaire et impitoyable de Donald Trump, les seules puissances qui s’en sortiront seront celles qui se défendent. Les dirigeants européens, hier, ont montré que cela commence à marcher sur l’Ukraine.

Il faut donc poursuivre, beaucoup plus vite, dans cette direction: se montrer unis pour résister à l’avalanche des factures et du racket signé Donald J. Trump.

Partager
Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la
Articles les plus lus
    Articles les plus lus