Nicolas Sarkozy a désormais un devoir: respecter la justice dont il a publiquement dénoncé, à maintes reprises, le comportement à son égard. Le procès en appel dans l’affaire des fonds libyens, qui aura lieu à partir de mars 2026, déterminera si oui ou non l’ancien président français est coupable aux yeux du Tribunal. Plusieurs de ses coaccusés se retrouveront alors à ses côtés. Ses avocats pourront repartir à l’assaut, affirmant son innocence. Mais le pire, d’ici là, serait que l’ex-chef de l’Etat reprenne ses attaques contre les juges. Ou qu’il cautionne ceux qui, en son nom, instruisent le procès du pouvoir judiciaire.
Reprenons un instant les faits, rien que les faits. Le jugement du 25 septembre 2025, explicité en 400 pages par les magistrats, ne peut pas se résumer à la seule décision controversée de ces derniers de placer Nicolas Sarkozy en détention, avec exécution immédiate de sa peine de cinq ans de prison ferme. Deux autres accusés, Alexandre Djouhri et le banquier genevois Wahib Nacer ont eux fait l’objet d’un «mandat de dépôt» dès la fin du procès. Le second a, depuis, été remis en liberté sous contrôle judiciaire en raison de son âge. Le second reste en détention.
L’attentat de 1979
La notion «d’association de malfaiteurs» si commentée et si critiquée car elle est le seul délit dont Nicolas Sarkozy a été jugé coupable, fait sens au regard des faits exposés. Tout, dans ce procès, tourne autour d’un clan, d’un groupe d’hommes liés à l’ex-locataire de l’Elysée, dont certains sont restés très proches. Tout, dans ce procès, tourne autour d’un crime: celui de l’attentat contre le DC10 d’UTA commis en 1979 par les services secrets libyens, dont le chef a ensuite fait partie des interlocuteurs des émissaires sarkozystes (l’ancien président affirmant qu’il n’était pas au courant, et ayant été relaxé du délit de corruption).
La suite est connue. Nicolas Sarkozy a passé trois semaines en détention comme nul autre justiciable en France. Incarcéré, il a été protégé (ce qui peut sembler normal) de tout contact avec d’autres détenus. Des policiers l’accompagnaient. Sa famille – ce qui est normal – l’a entouré. Et le voici dehors, en raison de dispositions légales normales: son âge, l’absence de risque de récidive et l’absence de risque de fuite. Il devra éviter tout contact avec le ministère de la justice et avec les autres prévenus. Il devra aussi s'abstenir de quitter le territoire national. Tout cela est cohérent, compte tenu des liens amicaux avec l'actuel Garde des Sceaux, Gérald Darmanin qui lui a rendu visite en détention.
Un jugement qui peut être débattu
Débattre du jugement dans l’affaire des fonds libyens est une chose. Accepter qu’un ancien chef de l’Etat, pour crier son innocence encore plus fort, bafoue la justice et les juges, en est une autre. Il est normal que Nicolas Sarkozy soit désormais en liberté sous contrôle judiciaire. Normal aussi qu’il se défende après avoir retrouvé les siens. Toute exploitation politique de cette situation, et tout amalgame visant à décrédibiliser la justice, reviendrait en revanche à discréditer la République. La France, sa justice et la confiance des Français dans leurs institutions n’ont pas besoin de ça.