Un professionnel romand valide
Chez Coop, les apprentis boulangers pourront dormir la nuit

C'est une nouveauté, Coop lance des places d'apprentissage en boulangerie pour du travail de jour, et non de nuit. L'entreprise déclare vouloir ainsi «rendre ce métier attrayant pour la relève». L'association romande des boulangers-pâtissiers-confiseurs commente.
Publié: 02.08.2024 à 06:15 heures
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Les apprentis boulangers et boulangères de Coop pourront travailler en horaires de jour.
Photo: Keystone
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Léo MichoudJournaliste Blick

Pour redonner aux jeunes envie de devenir boulangers, faut-il les laisser dormir? Ce vendredi 2 août, dans tout le pays, pas moins de 1200 apprentis entament leur CFC dans un supermarché de l’autre géant orange. La nouveauté, c’est que douze d’entre eux se lancent dans un apprentissage de boulangerie-pâtisserie-confiserie… qui se passe en pleine journée.

«Comme la formation a lieu dans nos boulangeries maison, la plupart des apprenti-e-s travaillent en journée, ce qui rend leur métier plus attrayant pour les jeunes», déclare Annika Keller, responsable de la formation professionnelle chez Coop, dans un communiqué paru ce vendredi. Il faut dire que la confection du pain est connue pour ses horaires nocturnes.

Dans les boulangeries artisanales, les professionnels de la farine commencent généralement leurs journées dès 1h du matin et les terminent vers 11h ou midi. Une telle décision, de la part d’un des plus grands employeurs et formateurs de Suisse, pourrait bien changer la donne.

Un boulanger romand applaudit

Vice-président de l’Association romande des artisans boulangers-pâtissiers-confiseurs (ARABPC), Nicolas Taillens voit plutôt d’un bon œil pour sa profession cette concurrence sur le marché des apprentis: «Je leur dis bravo d’avoir fait cette réflexion. S’ils ont les moyens de réinventer leur organisation pour ces 12 personnes, alors tant mieux. C’est toujours douloureux, pour un formateur, de voir partir la relève vers d’autres emplois.»

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«Plus la structure est grande, plus c’est jouable. Mais c’est rassurant pour un apprenti de pouvoir continuer à vivre normalement, à voir ses amis»
Nicolas Taillens, vice-président de l’Association romande des artisans boulangers-pâtissiers-confiseurs (ARABPC)
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Le patron de la boulangerie Taillens à Crans-Montana (VS), formateur depuis 25 ans, relève toutefois que d’autres avant Coop ont mis en place des solutions similaires pour éviter de dégoûter les jeunes sortant de l’école à 16 ans. «Plus la structure est grande, plus c’est jouable, détaille le commerçant. Mais c’est rassurant pour un apprenti de pouvoir continuer à vivre normalement, à voir ses amis. Ce manque de vie sociale fait partie des a priori que les jeunes ont sur ce métier lorsqu’ils hésitent entre deux apprentissages.»

Pénibilité nocturne pour les jeunes

Il reste bien conscient des difficultés inhérentes à son métier. «Je vois passer des jeunes convaincus qui décident pourtant d’arrêter, en voyant qu’il s’agit de se lever avant les aurores presque 360 jours par an.» Il juge pourtant que les jeunes sont conscients des conditions particulières de sa profession. Il continue: «C’est à nous, patrons, de mettre en place des solutions pour réduire la pénibilité de ce travail.»

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«Il y a une vraie incohérence entre la réalité de notre métier et la loi qui interdit aux mineurs de commencer à travailler avant 5h du matin»
Nicolas Taillens, boulanger à Crans-Montana (VS)
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Dans les faits, la loi suisse empêche les mineurs de travailler de nuit. «Il y a une vraie incohérence entre la réalité de notre métier et la loi qui interdit aux mineurs de commencer à travailler avant 5h du matin, déplore Nicolas Taillens. Cela coupe une partie de la main-d’œuvre en formation. Les petites structures sont les premières à faire les frais.»

«Pas miraculeux non plus»

Selon celui qui forme deux apprentis par an dans son établissement, cette décision de l’enseigne est un pas en avant, mais pas une solution miracle. «12 apprentis pour Coop dans toute la Suisse, pour l’instant ce n’est pas miraculeux non plus», constate le Valaisan.

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«L'objectif est de répondre à la demande croissante en boulangères et boulangers des boulangeries maison par du personnel qualifié»
Coop, dans son communiqué sur les apprentis en boulangerie
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Pour lui, qu’il travaille à la Coop ou dans une boulangerie artisanale, un formateur reste un formateur: «Les jeunes ne sont pas mariés avec leur entreprise formatrice. Commencer chez Coop, c’est une manière de mettre le pied à l’étrier. On peut même finir par se rendre compte que c’est un métier sympa et qu’on a presque tous ses après-midi de libres.»

Du côté de chez Coop, l’objectif affiché de cette nouveauté de 2024 est «de répondre à la demande croissante en boulangères et boulangers des boulangeries maison par du personnel qualifié». Le nombre de ces «boulangeries maisons» de Coop a presque doublé en quelques années, et atteint un total de 71 fournils.

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