Chaos à Opfikon dans le canton de Zurich samedi: deux groupes d'Erythréens rassemblant des dizaines de personnes se sont affrontés dans une bagarre géante. La police est parvenue à séparer les protagonistes. La rixe a opposé des partisans et des opposants au dirigeant autoritaire érythréen Isaias Afwerki, lors d'un «festival érythréen». Bilan: cinq personnes ont été légèrement blessées et sept plus sérieusement. Trois Erythréens âgés de 23 à 27 ans ont été arrêtés.
Les partisans du régime érythréen ont tenté de tenir un rassemblement illégal et l'opposition a tenté de l'empêcher, a déclaré dimanche Okbaan Tesfamariam à l'agence de presse Keystone-ATS. L'Erythréen est activiste et porte-parole de la Fédération des médias érythréens de Suisse.
Festival érythréen déjà annulé à Berne
La dispute a commencé à Oberuzwil, dans le canton de Saint-Gall. Une fête devait s'y dérouler et les partisans d'Isaias Afwerki s'y étaient réunis. En raison du risque de violences, les organisateurs ont annulé la fête. Apparemment, de nombreux participants se sont ensuite déplacés à Opfikon.
La violente altercation à Zurich samedi dernier a donné lieu à une question au Grand Conseil. L'UDC a demandé au Conseil d'Etat ce qu'il compte faire contre la violence croissante entre les groupes érythréens. Dans la question qu'elle a déposée lundi, l'UDC veut notamment savoir si le nombre d'actes de violence entre Erythréens a augmenté en Suisse au cours des dernières années. En outre, le parti s'interroge sur les possibilités d'expulser des ressortissants ayant le statut de réfugié s'ils sont responsables de débordements.
Des fêtes culturelles érythréennes similaires se sont déjà tenues par le passé, en Suisse comme à l'étranger. Mais les protestations se sont multipliées récemment. Une fête culturelle érythréenne était prévue le 1er septembre dans la maison de paroisse de Rüfenacht, près de Berne. La paroisse a toutefois annulé son feu vert, car il était question d'une manifestation de protestation contre la fête.
«Ces festivals sont des événements de propagande»
«La situation n'est pas nouvelle», a relevé Okbaan Tesfamariam. Le conflit entre les opposants et les partisans du régime dure depuis des décennies. Après une guerre d'indépendance sanglante, Isaias Afwerki a pris le pouvoir et a transformé le pays en l'une des dictatures les plus brutales du continent, selon Amnesty International.
Le conflit entre les partisans et opposants d'Isaias Afwerki se manifeste également au sein de la diaspora, a expliqué Okbaan Tesfamariam. Plusieurs dizaines de milliers d'Erythréens vivent en Suisse. Certains d'entre eux ont fui à l'époque de la guerre civile pour l'indépendance de l'Erythrée. Une partie soutient encore le gouvernement érythréen aujourd'hui. D'autres ont fui ces dernières années la dictature et son système strict de service militaire à vie et de travail forcé.
La montée des violences ces derniers temps résulte d'une multiplication des tournées de propagande, selon Okbaan Tesfamariam. Au cœur des conflits: les festivals érythréens. «Ces festivals sont des événements de propagande de la dictature érythréenne», dénonce Okbaan Tesfamariam. Selon lui, la dictature collecte de l'argent lors de ces événements au nom de la guerre d'indépendance. De nombreux Erythréens en exil se sentiraient ainsi mis sous pression.
Affrontements en Allemagne et en Suède
Des manifestations contre les festivals culturels érythréens ont eu lieu à plusieurs endroits ces dernières semaines en Europe. En Allemagne, à Giessen, la police a dû intervenir en force et des personnes ont été blessées. A Stockholm, des débordements ont blessé sept personnes lors d'un festival érythréen.
La police suédoise a annoncé jeudi que des violences avaient éclaté lors d'un rassemblement d'opposants au gouvernement à proximité du site du festival. Environ 1000 manifestants anti-gouvernementaux ont forcé un barrage de police et pris d'assaut le festival lors d'une action de protestation légalement déclarée, a rapporté le média «Expressen». Les manifestants auraient arraché des chapiteaux et utilisé des pointes de tente comme armes contre les policiers. En outre, des pierres ont été lancées sur les fonctionnaires.
Emeutes à Tel Aviv
Des affrontements ont également eu lieu en Israël. Selon les médias, plus de 150 personnes, dont environ un tiers de policiers, ont été blessées samedi lors d'une bataille de rue à Tel Aviv. Les heurts ont été déclenchés par un festival érythréen qui devait avoir lieu à l'ambassade à Tel Aviv.
Des centaines d'Erythréens ont manifesté devant l'ambassade contre le gouvernement local et ont forcé les barrières des forces de l'ordre. Selon les dernières informations de la police, 52 manifestants ont été arrêtés lors des affrontements. Ils étaient armés de matraques, de gaz lacrymogènes et de pistolets à impulsion électrique. Les manifestants ont également brisé des vitres de voitures et de magasins environnants.
Interdiction des festivals
Les opposants à ces fêtes demandent que de tels festivals culturels soient interdits. C'est ce qui s'est passé aux Pays-Bas. Le pays a interdit un événement cet été. Les autorités craignaient des appels à la violence et ont fait valoir des problèmes de sécurité.
Personne n'était joignable pour une prise de position auprès de l'ambassade d'Erythrée à Genève, ainsi qu'auprès du consulat à Wettingen en Argovie jusqu'à dimanche après-midi.
(Blick avec ATS)