Les voitures électriques continuent d'avoir le vent en poupe en 2025. En Allemagne comme en Suisse, leur part de marché a nettement progressé par rapport à l’année précédente.
Cette tendance est pourtant contestée par l'Association centrale de l'industrie automobile allemande (ZDK), principale représentante de la branche dans le pays, qui estime que les voitures électriques sont à la traine, selon la chaîne allemande ARD. Et pour cause. Selon l'association, les constructeurs et les concessionnaires se serviraient des immatriculations pour embellir les chiffres afin de masquer une baisse réelle de la demande.
Concrètement, les fabricants ou les revendeurs achèteraient eux-mêmes des immatriculations pour certains véhicules, souvent des modèles d'exposition. Ils les revendraient ensuite à prix réduit à l'acquéreur final, créant ainsi une sorte de marché de voitures à la fois neuves et d'occasion. Neuves, car le modèle n'a jamais été utilisé. D'occasion, parce qu'il a déjà été immatriculé auparavant.
Une tactique rentable
«Pour les concessionnaires, il s’agit avant tout de rendre les véhicules rapidement disponibles», explique Auto-Suisse, la faitière suisse des importateurs officiels d'automobiles, à la demande de Blick. «En immatriculant eux-mêmes leurs voitures, ils cherchent également à atteindre leurs objectifs internes», ajoute l'association. Cette tactique leur permet ainsi de toucher certains des bonus auxquels ils ont droit lorsqu’ils atteignent les quotas de vente fixés par les marques.
Mais peut-on dire pour autant que le secteur trafique les chiffres de ventes des voitures électriques? BMW dément formellement. Le constructeur assure qu’il n’y a pas eu, au premier semestre 2025, de part disproportionnée d’immatriculations internes pour les modèles électriques de BMW et de Mini sur le marché allemand.
En Suisse, Auto-Suisse ne recense pas de statistiques spécifiques sur ces pratiques. Impossible donc de trancher clairement. «Nous partons toutefois du principe que les immatriculations internes concernent aujourd’hui les véhicules électriques, hybrides et thermiques dans des proportions similaires», précise l’association.
BYD, grand adepte de l'auto-immatriculation
Côté allemand, que disent les chiffres? Le Center Automotive Research (CAR), organisme américain de recherche à but non lucratif, a analysé les immatriculations de voitures neuves et de véhicules de location allemands. Immatriculer ces derniers constitue aussi un moyen idéal pour gonfler artificiellement les parts de marché et de transformer rapidement des modèles neufs en occasions.
L'étude révèle que certains fabricants chinois de voitures électriques ont particulièrement recours à ces méthodes. Chez BYD, les immatriculations achetées à l'interne représentaient 75% des ventes: autrement dit, seul un véhicule immatriculé sur quatre a directement été vendu à l'acquéreur final. Même stratégie chez Great Wall Motor (56% d'immatriculations achetées à l'interne ou par des loueurs) et MG (51%), alors que la moyenne globale s’établit à 37%.
Le tableau d'ensemble est toutefois plus nuancé: à l’autre extrémité du classement, on retrouve aussi des marques 100% électriques. Polestar (21%), Nio (13 %) et Tesla (11%) affichent des taux nettement inférieurs à la moyenne.
Tout le monde a intérêt à gonfler les chiffres
L'étude ne procède toutefois pas à une analyse précise par modèle, ce qui empêche de distinguer les voitures électriques des autres véhicules de marques comme Audi ou Volkswagen. Il est dès lors impossible de confirmer ou d’infirmer les accusations de ZDK.
Ce qui est en revanche certain, c'est que les constructeurs ont clairement intérêt à gonfler les chiffres de vente de leurs voitures électriques. Et pour cause, l’Union européenne comme la Suisse leur imposent des objectifs stricts en matière d’émissions de CO2.
En cas de dépassement, les amendes peuvent atteindre plusieurs millions. Lorsque la demande pour les véhicules électriques est insuffisante, ces achats d'immatriculations permettent quand-même d’atteindre les quotas fixés.