C'est une bonne nouvelle pour le nouveau conseiller fédéral en charge de l'asile Beat Jans. La réforme que l'UE vient d'adopter en la matière est un soulagement pour le socialiste fraîchement élu. Seule une partie de l'accord qui concerne le développement de Schengen/Dublin est contraignante pour la Suisse.
Au sujet de la solidarité entre les Etats européens, la Suisse est libre de participer ou non. En revanche, lors des réunions des ministres européens de la Justice et des Affaires intérieures, elle ne pourra guère se soustraire à ses responsabilités.
Impossible pour l'heure de prédire exactement quelles seront les conséquences du pacte européen. Ce nouveau mode de fonctionnement sur l'asile devrait toutefois avoir un certain effet dissuasif, tant sur les passeurs que sur les personnes qui ne sont pas personnellement menacées dans leur vie ou leur intégrité corporelle. Pour ces dernières, les procédures devraient être plus rapides et les expulsions plus fréquentes.
Moins de migrants?
Des centres d'accueil sont aussi prévus aux frontières extérieures à l'espace Schengen. Les demandeurs d'asile y resteront le temps de clarifier leur identité et leur origine. Reste à savoir si les tribunaux ne mettront pas un terme à cette pratique controversée.
Interrogé à ce sujet, le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) a indiqué qu'il saluait l'orientation des réformes. «Elles doivent permettre de réduire la migration irrégulière vers l'Europe ainsi que la migration secondaire au sein de l'espace Schengen», expliquent les fonctionnaires en charge des migrations. En d'autres termes, le SEM espère déjà que le nombre de demandes d'asile en Suisse diminuera. Mais personne ne sait si cela se produira réellement. Si tout se passe comme prévu, la réforme entrera en vigueur en 2026 ou 2027, selon le SEM.
Répartition difficile
En pratique, la solidarité risque de ne pas être au rendez-vous. Si, dans un centre d'accueil, il est décidé en un jour que sur 100 migrants, 60 n'ont aucune chance d'obtenir l'asile en Europe, parviendra-t-on à répartir les 40 autres? Ceux-ci doivent être attribués à des pays de l'espace Schengen selon une clé de répartition. Seulement, il est peu probable que des pays comme la Hongrie, mais aussi la Suède et la Finlande, soient disposés à apporter leur contribution. Le cas échéant, un État doit pouvoir acheter le droit de décider librement. Il est question de 20'000 euros par migrant.
L'obligation d'accueil peut aussi être levée moyennant des travaux de soutien. Mais que se passerait-il si, au lieu de deux personnes, un pays comme la Hongrie devait en accueillir 2000? S'acquittera-t-elle alors de ses obligations? Osera-t-on renvoyer d'une île comme Lampedusa des migrants qui n'ont aucune chance d'obtenir l'asile?
Selon les experts, de nombreux signes indiquent que même la France et l'Allemagne deviennent désormais plus restrictives en matière d'accueil. Existe-t-il seulement d'autres États pour prendre le relais? Reste que des dispositions de crise sont envisagées en cas de guerre, comme après l'attaque contre l'Ukraine, mais en temps plus «calme», les attributions risquent d'être difficiles.
Si Beat Jans ne veut pas s'exposer aux reproches au sein du Conseil européen des ministres de la Justice et des Affaires intérieures (JAI), il devra faire partie de ces ministres qui tendent la main à l'accueil des demandeurs d'asile.