Qui ose encore s'adresser à Trump?
À force d’humilier ses hôtes, Trump va perdre des plumes

Entrez à vos risques et périls. Quiconque rend visite à Donald Trump à la Maison Blanche doit s'attendre au pire. Cela pourrait avoir de graves conséquences pour lui et pour les Etats-Unis.
Publié: 26.05.2025 à 10:13 heures
Donald Trump a accusé le président sud-africain Cyril Ramaphosa de génocide. Le président américain a montré des photos d'un autre pays.
Photo: keystone-sda.ch
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Guido Felder

Donald Trump est un grand fan de catch. Il est connu pour être un grand admirateur de la légende du combat Hulk Hogan qui, à l’époque où il était actif, mettait ses adversaires sur le dos dans des shows spectaculaires. Et c’est exactement comme les combattants sur le ring que le président américain traite ses invités à la Maison Blanche: il les défie, il les met à l’épreuve, il les met à terre.

Tout a commencé avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qu’il a accusé d’être responsable de la guerre. Dernière victime en date de Trump: le président sud-africain Cyril Ramaphosa, qu’il a accusé de génocide en publiant des photos – truffées d'erreurs – d’un génocide contre les Blancs. Trump a certes droit à son spectacle, mais il ne se rend pas compte qu’il se sabote lui-même.

Zelensky et Ramaphosa ne sont pas les seuls à avoir pris place sur la chaise blanche de l’inquisition devant la cheminée. Le roi Abdullah II bin al-Hussein de Jordanie a dû écouter avec malaise Trump parler de relocalisation des Palestiniens dans la bande de Gaza. Même le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, ami proche de Trump, a ravalé sa rancœur lorsque le président américain a évoqué des discussions avec l’ennemi juré d’Israël, l’Iran.

D’autres visiteurs, comme le président français Emmanuel Macron et le Premier ministre britannique Keir Starmer, ont certes réussi à éviter les esclandres en offrant des cadeaux et en se dérobant. Mais ils n’ont pas réussi à obtenir de progrès substantiels sur leurs demandes.

Les alliés se détournent

Trump aime ce genre de mises en scène qui lui permettent, avec son vice-président agressif J.D. Vance, de prendre les autres à contre-pied et de les réduire à néant. Philipp Adorf, spécialiste des Etats-Unis à l’université de Bonn, déclare: «Lors de sa rencontre avec Zelensky, Trump a déclaré ouvertement que la dispute avait fourni de bonnes images télévisées.»

«Ils tuent les fermiers blancs»
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Le comportement du président américain suscite certes des applaudissements dans son propre camp, mais contribue en même temps à aliéner davantage les alliés traditionnels et potentiels. Des accusations comme celles portées contre Ramaphosa devraient susciter la méfiance, surtout dans les pays du Brics. Cette association d’Etats se considère comme un contrepoids géopolitique à l’Occident, auquel on prête souvent des ambitions néocoloniales. Les cinq pays fondateurs sont le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud. En 2024, l’Égypte, l’Éthiopie, l’Iran et les Émirats arabes unis les ont rejoints, et en 2025, l’Indonésie.

En direction de Moscou et de Pékin

L’affirmation publique d’un génocide des Blancs en Afrique du Sud est, dans de nombreux pays du Sud, la preuve que l’Occident s’accroche à sa mentalité coloniale. Au lieu de s’opposer à l’Occident, ces Etats pourraient désormais s’orienter vers d’autres grandes puissances auprès desquelles ils se sentent les bienvenus – par exemple la Russie ou la Chine. «L’humiliation par Trump d’un chef d’Etat africain renforce le récit de Moscou et de Pékin selon lequel ils traitent le Sud global avec respect et sur un pied d’égalité – contrairement à un Occident paternaliste», analyse Philipp Adorf.

Les réceptions de Trump montrent que les visites d’Etat à Washington risquent actuellement l’humiliation – ou n’apportent alors tout au plus qu’un bénéfice diplomatique limité. Contrairement à Hulk Hogan, qui embrassait souvent ses adversaires après le combat d’exhibition, Trump laisse ses visiteurs humiliés et isolés. Il appelle cela une victoire, mais en réalité, il se met lui-même sur la paille.

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