«Nous sommes-là parce qu'il a violé trois personnes, voilà pourquoi nous sommes-là!», a martelé mardi dans son réquisitoire final la procureure pour tenter de convaincre les jurés de condamner l'ancien producteur Harvey Weinstein, rejugé à New York pour viol et agressions sexuelles.
Plus tôt mardi, lors de sa plaidoirie finale, l'avocat de l'ex-roi du cinéma avait décrit ses accusatrices comme des «femmes aux rêves brisés» pour demander aux jurés de l'acquitter. Le réquisitoire de la procureure Nicole Blumberg doit se poursuivre mercredi. Le juge Curtis Farber doit ensuite donner ses instructions aux jurés qui se retireront pour décider d'un verdict.
Rappel des faits
Harvey Weinstein, dont la chute a entraîné en 2017 le début de la vague mondiale #MeToo, a comparu depuis le 15 avril à New York après l'annulation retentissante l'année dernière, pour des raisons procédurales, de sa condamnation en 2020 à 23 ans de prison pour l'agression sexuelle de Mimi Haley en 2006 ainsi que le viol de Jessica Mann en 2013.
Le procès porte aussi sur une nouvelle inculpation pour une agression sexuelle de Kaja Sokola, qui avait 19 ans à l'époque des faits, en 2006. Les trois femmes ont longuement témoigné devant les jurés. «Ce n'était certainement pas drôle», mais «elles veulent que l'accusé soit tenu responsable de ses actes», a souligné la procureure.
Harvey Weinstein, en prison à cause d'une autre condamnation pour crimes sexuels en Californie, a comparu chaque jour en chaise roulante, physiquement diminué. Il a gardé le silence tout au long du procès.
«Transactionnel»
«S'il y a le moindre doute dans le dossier, vous devez jeter tout cela» et déclarer Harvey Weinstein, 73 ans, non coupable, a lancé l'avocat Arthur Aidala. Près de 20 ans après les faits les plus anciens, il a cherché à miner la crédibilité des accusatrices. Pour Arthur Aidala, il ne s'agit pas de démontrer que les relations sexuelles avec ces trois femmes étaient consenties, exhortant les jurés à ne pas confondre «immoralité» et «criminalité».
A ses yeux, «c'est transactionnel», de la «promotion canapé» entre de jeunes femmes qui «utilisent leur beauté, leur charmes» et un homme plus âgé qui peut leur ouvrir des portes. «C'est lui qu'on a utilisé», a-t-il même affirmé, cherchant visiblement à faire mentir les procureurs qui ont décrit Harvey Weinstein comme un homme tout-puissant.
Pour Arthur Aidala, l'accusation a recours à des témoignages mensongers de la part de «femmes qui ont eu leurs rêves brisés» pour parvenir une nouvelle fois à la condamnation du «pécheur originel du mouvement #metoo». Le verbe haut, multipliant les métaphores, l'avocat a cherché plusieurs fois à s'attirer la sympathie du jury avec des plaisanteries. Il a aussi parfois mimé les victimes pour pointer des incohérences, comparant l'une d'elles à un enfant pris en flagrant délit de mensonge.
Décrédibiliser les victimes
L'avocat insiste sur le fait que les victimes ont toutes continué à fréquenter Harvey Weinstein après les violences dont elles l'accusent, ce qu'elles n'ont pas contesté, expliquant n'avoir pas voulu gâcher leurs carrières. Elles ont aussi confié avoir eu peur de ne pas être prises au sérieux face au fondateur des studios Miramax, dont les films accumulaient les Oscars.
«Elles savaient qu'il fallait rester de son côté» et ont préféré «enterrer leur traumatisme», a justifié la procureure Nicole Blumberg. Durant le procès, les trois victimes ont assuré que les relations sexuelles avec Harvey Weinstein n'étaient pas consenties. «Je lui ai dit d'arrêter (...), mais il ne m'a pas écoutée», a assuré Kaja Sokola.
Miriam Haley avait assuré avoir supplié en vain le producteur de renoncer à lui imposer une relation sexuelle. «Je me suis dit: 'Je me fais violer, voilà c'est comme ça'», a-t-elle témoigné devant la cour.
En 2020, lorsque le premier procès d'Harvey Weinstein s'était tenu à New York, des manifestations contre les violences sexuelles avaient lieu presque chaque jour au pied du tribunal. Cette fois, les audiences se sont déroulées avec moins d'attention médiatique, et à l'ombre du procès du magnat du hip-hop P. Diddy, qui comparaît à quelques rues de là devant la justice fédérale pour trafic sexuel.