Frappes américaines sur Fordo
Ces camions ont-ils sauvé le nucléaire iranien? Des photos sèment le doute

Les frappes américaines ont-elles vraiment détruit le programme nucléaire iranien? Fordo, Natanz, Ispahan: les dégâts sont réels, mais l’Iran aurait anticipé l’offensive. Et Téhéran évoque déjà un nouveau site secret, à l’abri des bombes.
Publié: 10:00 heures
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Dernière mise à jour: 10:07 heures
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Une image satellite datant du 19 juin montre une ligne de 16 camions à l'entrée du site de Fordo qui sera frappé quelques jours plus tard par les Etats-Unis.
Photo: AFP
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Solène MonneyJournaliste Blick

Les frappes américaines ont-elles vraiment «complètement détruit» les installations de Fordo, Natanz et Ispahan, comme le clame Donald Trump? Des images satellites prises le 19 juin, soit deux jours avant l’offensive, pourraient bien semer le doute, relève le «Washington Post».

On y voit une colonne de camions stationnée à l’entrée du tunnel de Fordo, site hautement stratégique du programme nucléaire iranien. En tout, 16 véhicules repérés. Le lendemain, ils ont disparu, remplacés par d'autres camions et un bulldozer. De quoi relancer une question sensible: l’Iran a-t-il réussi à mettre à l’abri ses centrifugeuses avant les frappes?

Une évacuation discrète?

Pour l’instant, aucune certitude. Les camions ont été aperçus le lendemain à un peu plus d'un kilomètre du site de Fordo. Plusieurs experts en prolifération évoquent la possibilité d'une stratégie préventive de l'Iran. «Ils ont sans doute mis les installations à l’arrêt, évacué ce qu’ils pouvaient, puis tout refermé», avance Jeffrey Lewis, du Middlebury Institute.

D’après Spencer Faragasso, chercheur à l'Institut américaine pour la science et la sécurité internationale, les tunnels auraient même été remblayés pour éviter la dispersion de matériaux radioactifs. Les dernières images satellites montrent d’ailleurs que les entrées semblent comblées, soit par les frappes, soit de manière préventive.

Un nouveau site secret?

Téhéran affirme avoir mis à l’abri ses stocks d’uranium hautement enrichi avant l’attaque américaine, et réaffirme avec force qu’elle ne renoncera pas à son programme nucléaire. Mais une autre carte, bien plus inquiétante, pourrait être en jeu: l’ombre d’un site secret refait surface.

Le 12 juin, Mohammad Eslami, directeur de l’Organisation iranienne de l’énergie atomique, a surpris en annonçant que l’Iran disposait d’un troisième site d’enrichissement, situé dans un lieu «sûr et invulnérable». «Dès que l’installation et la configuration des centrifugeuses seront terminées, l’enrichissement commencera», a-t-il déclaré.

Cette annonce, aussi soudaine que stratégique, n’a été ni confirmée ni réfutée. Impossible de savoir si des centrifugeuses y sont déjà en place, ni même si le site est aussi opérationnel que le prétend Téhéran. A ce jour, aucune preuve n’a été apportée. L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) n’a pas eu accès au site, et ses propos ont suscité un silence quasi total du côté des gouvernements occidentaux.

Un bilan américain flou

Les photos satellites prises dimanche révèlent plusieurs points d’impact sur Fordo, en particulier autour de la salle de 250 mètres qui abrite les centrifugeuses. Selon un haut responsable américain cité par le «New York Times», le site a été mis «hors service». Mais il ajoute qu'une douzaine de bombes de 13 tonnes, même très puissantes, ne suffiraient sans doute pas à le raser entièrement.

Natanz, de son côté, avait déjà subi plusieurs attaques israéliennes. Deux cratères ont été repérés au-dessus des halls souterrains. L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) affirme que les systèmes électriques avaient été détruits avant même les frappes, provoquant potentiellement des pannes critiques pour les centrifugeuses.

A Ispahan, les images révèlent de lourds dégâts sur plusieurs bâtiments du centre de recherche nucléaire. Ce site, encore inspecté il y a deux semaines, abriterait du combustible proche de l’enrichissement militaire. Les destructions pourraient ralentir le programme iranien de plusieurs années, sauf si d’autres infrastructures secrètes sont déjà opérationnelles.

Si l’ampleur réelle des destructions reste à confirmer, une chose est claire: les frappes américaines ont porté un coup sérieux au programme nucléaire iranien. Au-delà des installations, c’est aussi sur le plan psychologique que l’opération américaine a frappé: démonstration de force, coordination avec Israël, et mise sous pression d’un régime déjà isolé sur la scène internationale.

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