Le nouveau gouvernement allemand, dirigé par le chancelier CDU Friedrich Merz, a resserré la vis en matière d'asile, et cela a des conséquences pour la Suisse.
Désormais, tous les migrants illégaux seront directement refoulés à la frontière, même s'ils souhaitent déposer une demande d'asile. La Suisse insiste cependant sur une procédure coordonnée avec l'Etat de droit, et attend une étroite coordination entre les pays voisins.
Le chercheur en migration Gerald Knaus expose clairement ce qu'il pense de la nouvelle politique d'asile allemande: elle serait, selon lui, en grande partie inefficace.
De la comédie à la douane
«Ce que nous vivons à la frontière allemande relève de la politique théâtrale», explique le chef du groupe de réflexion «European Stability Initiative», dans un entretien avec la «Neue Zürcher Zeitung».
Les récentes reconduites à la frontière effectuées par la police fédérale (alors que l’Allemagne avait déjà durci les mesures aux frontières les années précédentes) ne seraient guère plus que de la politique symbolique.
L'expert donne un exemple: «Début février, la police fédérale a annoncé avoir renvoyé en Autriche trente personnes en deux jours en Bavière. Je me suis renseigné à Vienne: six personnes sont effectivement arrivées, aucune ne voulait demander l’asile en Autriche. Elles ont été brièvement interrogées, puis elles sont reparties.»
Dans l'interview accordée à la «NZZ», Gerald Knaus doute fondamentalement qu'une telle politique frontalière puisse endiguer efficacement la migration. «Les Etats membres de l'UE ont essayé ces dix dernières années d'empêcher les gens de venir en Europe aux frontières extérieures de l'UE, parfois avec une grande brutalité».
Cela n'a réussi que là où des barrières ont été construites: entre la Biélorussie et la Pologne, la Grèce et la Turquie ou la Bulgarie et la Turquie.
En Europe centrale, c’est illusoire: «Toute personne qui essaie de franchir la frontière à travers les vignobles près de Lörrach et Bâle, en évitant les clôtures, échouera à coup sûr. D’ailleurs, la dernière barrière érigée dans cette région remonte à la Seconde Guerre mondiale, sous Himmler. Elle visait à empêcher les Juifs de fuir vers la Suisse.»
S'orienter vers d'autres alternatives
En fait, il y aurait aujourd'hui moins de Syriens et d'Afghans qui arrivent en Europe qu'il y a trois ans. En Autriche, le nombre de demandeurs d'asile aurait même chuté plus rapidement qu'en Allemagne, et ce, sans aucun contrôle supplémentaire.
Dans la «NZZ», Gerald Knaus demande donc un changement de stratégie: au lieu de renvois inefficaces, il faut des alternatives. L'externalisation des procédures d'asile dans des pays tiers sûrs est une clé, cela pourrait réduire efficacement l'incitation à l'immigration irrégulière, comme cela a déjà été le cas en 2016 avec l'accord UE-Turquie.