Après le Salvador, l'Eswatini et le Soudan du Sud, le Rwanda a accueilli mi-août sept premiers migrants en situation irrégulière expulsés des Etats-Unis dans le cadre d'un accord récemment conclu avec Washington, a annoncé jeudi Kigali.
Depuis le retour du président américain Donald Trump à la Maison Blanche en janvier, son administration avait déjà envoyé des étrangers vers ces trois premiers pays, dont ils n'étaient souvent pas originaires.
A titre d'exemple, un groupe de huit migrants avait été transporté début juillet au Soudan du Sud, pays instable parmi les plus pauvres au monde. Parmi eux: deux Birmans, deux Cubains, un Vietnamien, un Laotien, un Mexicain et un seul Sud-Soudanais.
«Un soutien approprié»
Un premier groupe de sept personnes est aussi arrivé mi-août sur le sol rwandais, a annoncé jeudi Kigali, qui avait annoncé début août avoir accepté d'accueillir jusqu'à 250 personnes expulsées des Etats-Unis.
Tous les migrants expulsés ont reçu «un soutien approprié et la protection du gouvernement rwandais», a déclaré dans un message à l'AFP la porte-parole du gouvernement rwandais, Yolande Makolo.
«Trois d'entre eux ont exprimé le souhait de retourner dans leur pays d'origine, tandis que quatre souhaitent rester (au Rwanda) et y construire leur vie», a-t-elle indiqué, sans préciser leurs nationalités.
Interrogée par l'AFP, une porte-parole de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) a expliqué qu'elle ne «soutient ni ne facilite les expulsions», mais les visite pour évaluer leurs besoins fondamentaux.
«Une manne financière»
Le Rwanda, petit pays d'environ 13 millions d'habitants, qui a connu une forte croissance économique depuis le génocide de 1994 – au moins 800'000 personnes avaient péri, selon l'ONU, pour la plupart des Tutsi mais aussi des Hutu modérés –, est fréquemment critiqué pour son bilan en matière de droits humains.
Ce pays avait déjà signé un accord migratoire, rémunérateur, avec le Royaume-Uni, finalement annulé en 2024 par le nouveau gouvernement britannique après avoir généré d'intenses polémiques.
«Ces accords sur les demandeurs d'asile ont représenté une manne financière pour le Rwanda», a estimé auprès de l'AFP un militant des droits humains, sous couvert d'anonymat par craintes de représailles.
«L'acceptation de ces personnes expulsées lui confère également un avantage dans les négociations de paix en cours concernant le conflit en RDC» (République démocratique du Congo), a-t-il ajouté.
Pourparlers de paix
Soutenu par Kigali, le groupe armé M23 s'est emparé ces dernières années de larges pans de l'est de la RDC, notamment des grandes villes de Goma et Bukavu au cours d'une vaste offensive lancée fin 2024, accompagnée de violations massives des droits humains.
Aucune éventuelle contrepartie n'a été mentionnée dans l'accord USA-Rwanda sur les migrants, alors que Washington est passé à l'offensive sur les minerais de RDC, essentiels à la fabrication de composants pour l'armement, les téléphones mobiles et les voitures électriques.
Des émissaires rwandais et congolais ont repris mardi des pourparlers de paix au Qatar, après avoir signé une déclaration de principe le 19 juillet réaffirmant «leur engagement en faveur d'un cessez-le-feu permanent». Les deux pays avaient déjà signé un accord de paix aux États-Unis fin juin.
Mais le faible nombre de migrants arrivés au Rwanda mi-août, en plus des huit expulsés au Soudan du Sud et de cinq autres envoyés en Eswatini mi-juillet, traduit les difficultés pour l'administration américaine d'appliquer son plan de déportation massive d'étrangers en situation irrégulière.
Kilmar Abrego Garcia
Le Salvador, petit pays d'Amérique centrale dirigé par Nayib Bukele, l'autoproclamé «dictateur le plus cool du monde», a été le premier pays à accepter ces expulsés. Pendant quatre mois, 252 Vénézuéliens accusés d'appartenance au gang «Tren de Aragua» y ont été incarcérés, avant d'être renvoyés au Venezuela.
Seulement 20 d'entre eux avaient un casier judiciaire aux Etats-Unis, selon Caracas, et plusieurs ont raconté à l'AFP l'enfer carcéral subi au Salvador. Le gouvernement ougandais a annoncé la semaine dernière avoir lui aussi conclu un accord avec Washington pour accueillir des expulsés des Etats-Unis.
Expulsé à tort en mars vers le Salvador puis ramené aux États-Unis, il a été réarrêté lundi et placé en détention avant une nouvelle expulsion – vers l'Ouganda – qu'il conteste judiciairement.