Le monde a les yeux rivés sur le Proche-Orient avec inquiétude. L'escalade entre Israël et l'Iran s'est encore aggravée samedi car une menace bien précise affole les marchés financiers: «La fermeture du détroit d'Ormuz est actuellement à l'étude et l'Iran prendra la décision appropriée avec une détermination totale», a déclaré samedi le député et général de brigade Ismail Kosari, d'après le site d'information «Entekhab».
Depuis le début des attaques dans la nuit de jeudi à vendredi, un tel blocus serait l'une des pires choses qui puisse arriver. Arne Lohmann Rasmussen, de l'entreprise de conseil en énergie Global Risk Management, a déclaré vendredi au quotidien allemand «Bild»: «La fermeture du détroit d'Ormuz serait un cauchemar absolu. Si l'Iran bloque ce passage étroit, cela pourrait affecter jusqu'à 20% des flux pétroliers mondiaux».
Quels seraient les conséquences concrètes de ce blocus pour l'économie mondiale et la Suisse? L'Iran fermera-t-il vraiment le détroit d'Ormuz? Voici cinq choses essentielles à savoir.
La route pétrolière la plus importante du monde
Aucune route commerciale pétrolière n'est plus importante que le détroit entre le golfe Persique et le golfe d'Oman. Chaque jour, entre 20 et 21 millions de barils de pétrole brut transitent par ce passage, soit environ 20% de la consommation mondiale de pétrole. Les pays asiatiques comme la Chine, l'Inde, le Japon et la Corée du Sud sont particulièrement dépendants de cette route.
Mais l'Europe aussi est concernée, et pour la Suisse, Ormuz est une plaque tournante stratégique de l'énergie. En cas de blocage, les prix mondiaux du pétrole pourraient doubler en l'espace de quelques heures. D'après les premières estimations, les prix pourraient grimper jusqu'à 130 dollars le baril, contre 73 dollars actuellement, soit une hausse de 14% par rapport à la semaine passée.
Les nombreuses menaces de l'Iran
Jusqu'à présent, le détroit d'Ormuz n'a jamais été fermé. Même si des pétroliers ont été attaqués pendant la guerre entre l'Iran et l'Irak dans les années 1980, il était encore possible de passer. Mais en 2011 et 2019, l'Iran a menacé de bloquer le passage, en réponse aux sanctions occidentales.
De plus, le régime de Téhéran a déjà capturé des pétroliers – la dernière fois en 2023. Jusqu'à présent, les menaces militaires, notamment des Etats-Unis, ont toujours empêché un blocage, mais une simple menace de Téhéran suffit à inquiéter les marchés du monde entier.
Les conséquences à court terme
Si le détroit d'Ormuz était bloqué, les prix du pétrole grimperaient en flèche et seraient soumis à une forte pression dans le monde entier, ce qui aurait des conséquences immédiates pour le secteur des transports. Les raffineries de pétrole en Asie et en Europe, qui dépendent d'un approvisionnement rapide depuis le Golfe, devraient trouver des réserves d'urgence.
Les marchés boursiers subiraient donc des pertes très importantes. A l'heure actuelle, il est difficile d'estimer l'ampleur des dégâts à court terme, car il n'existe pas de comparaison historique.
Les conséquences à moyen et long terme
Les économistes parlent d'un choc inflationniste. D'après la Hamburg Commercial Bank, une escalade à Ormuz risque de nous mener à une stagflation mondiale, c'est-à-dire une stagnation de l'économie accompagnée d'une hausse de l'inflation. Ce choc pourrait inciter les banques centrales à garder leurs taux d'intérêt fixes, voire à les augmenter à nouveau, ce qui pourrait avoir des répercussions géopolitiques mondiales.
Et pour la Suisse?
En 2023, 31,6% du pétrole suisse provenait du Nigeria et 54% des Etats-Unis. Si le prix du pétrole augmente, les Suisses paieront à moyen terme la note à la pompe. Les prix du mazout pourraient aussi augmenter et, à long terme, une fermeture du détroit d'Ormuz pourrait augmenter l'inflation, qui était inférieure à 0,1% en mai.
Les entreprises suisses orientées vers l'international pourraient subir des goulots d'étranglement dans la chaîne d'approvisionnement. Quant aux PME, elles pourraient aussi être affaiblies par l'incertitude sur les marchés financiers.