Interpol a été saisi
Voici comment Poutine piège de jeunes Africaines pour les exploiter dans ses usines

La guerre en Ukraine est avant tout une guerre de drones. Pour pouvoir en assurer la production, la Russie cherche activement de la main d’œuvre et se tourne notamment vers l'Afrique, où de jeunes femmes sont recrutées à coup de fausses promesses.
Publié: 12:07 heures
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Le président russe Vladimir Poutine est à court de main-d'œuvre pour son produire son matériel de guerre.
Photo: imago/ZUMA Press
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Marian Nadler

Drones FPV, drones kamikazes ou plus récemment drones à fibre optique: ces engins volants et dépourvus de pilote sont devenus une composante centrale de la guerre en Ukraine, au point qu'ils ont transformé en profondeur les stratégies de combat. Si les drones sont aujourd'hui indispensables, c'est notamment en raison de leur coût, souvent inférieur à celui des dégâts qu'ils provoquent.

Chaque jour, des centaines de drones sont détruits des deux côtés du front, ce qui impose un rythme de production extrêmement soutenu. Or, la Russie fait actuellement face à une importante pénurie de main d'oeuvre: le taux de chômage pointe à seulement 2,3%, tandis que de nombreux hommes sont employés par l'armée, qui les envoie mourir au front.

Pour combler ce manque, Moscou a renforcé ses recrutements à l’étranger. Les personnes sont généralement contactées par internet, et parfois via les réseaux sociaux. Selon le journal «Le Monde», les femmes africaines qui sont particulièrement ciblées.

Des critères d'admission risibles

Pour illustrer le fonctionnement de ces recrutements, «Le Monde» cite un exemple concret: des femmes étrangères sont invitées à postuler pour des emplois à Ielabouga, une ville de la région du Tatarstan considérée par Moscou comme une «zone économique spéciale». Les candidatures se font via le site internet d'«Alabuga Start», un «programme international de formation professionnelle», lancé par Moscou.

Le programme promet un salaire mensuel compris entre 398 et 636 francs, soit une rémunération nettement supérieure à celle de nombreux pays africains. Pour prétendre à une admission, il suffit de remplir quelques critères: être une femme âgée de 18 à 22 ans, avoir terminé l’école secondaire, posséder un passeport valide et connaître 100 mots basiques en russe.

Des salaires extrêmement bas

Aux candidates, on promet une «opportunité unique» capable de «changer le cours d’une vie». En revanche, on ne leur explique nulle part qu'elles seront affectées à l’assemblage de drones. C'est pourtant bien ce qui attend la majorité des candidates.

D'ailleurs, pourquoi cibler spécifiquement des femmes pour produire du matériel militaire? Parce qu’elles seraient «plus faciles à encadrer», justifie Timur Shagivaleev, directeur de la zone économique spéciale d'Ielabouga, dans une interview accordée début juin au site russe Business Online. Selon lui, certaines professions requerraient «une précision féminine».

Timur Shagivaleev figure sur les listes de sanctions de l’Australie, des Etats-Unis et de l’Ukraine. Selon les services de sécurité ukrainiens, il est soupçonné d’avoir fourni plus de 13’000 drones kamikazes à l’armée russe.

Dans son entretien avec Business Online, il admet également que les Russes ne sont pas prêts à travailler pour un salaire mensuel de 30’000 à 40’000 roubles (soit environ 304 à 406 francs). Ce qui laisse penser que les salaires réellement versés sont même inférieurs à ceux promis par le programme «Alabuga Start». A titre de comparaison, le salaire moyen en Russie s’élève à environ 83’200 roubles (843 francs).

Interpol saisi par le Botswana

Les contrats de travail comportent une clause de confidentialité très stricte. Pourtant, certaines employées ont commencé à briser le silence, comme le révèle une enquête de l’Initiative mondiale contre la criminalité transnationale organisée (GI-TOC). Plusieurs témoignages font ainsi état de conditions bien différentes de celles promises.

Certaines jeunes femmes ont déclaré avoir passé des heures à assembler des drones, loin du «simple emploi sous supervision» promis par l'annonce. Plusieurs d'entre elles se plaignent également de problèmes de peau liés à l’exposition à des produits chimiques toxiques. Les travailleuses souhaitant mettre fin à leur contrat ont quant à elles été contraintes de rembourser les frais liés au billet d’avion, au logement et aux cours de russe.

Toujours selon «Le Monde», la police du Botswana a décidé de faire appel à Interpol. En effet, plusieurs femmes ayant travaillé dans la zone économique spéciale d'Ielabouga, ont déposé plainte pour trafic d'êtres humains. Le Kremlin n'a pas réagi et ne semble pas être pressé de le faire.

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