Ils feront tout pour l’empêcher et le saboter. Malgré leurs divergences parfois exposées, Donald Trump et Benjamin Netanyahu sont d’accord sur un point: l’émergence d’un Etat palestinien digne de ce nom, doté de ses propres forces de sécurité et d’une unité territoriale, serait un danger existentiel pour Israël. Pas question donc de permettre cela, malgré le geste diplomatique important constitué, lundi 22 septembre, par la reconnaissance de la Palestine par une dizaine de nouveaux pays, dont la France et le Royaume-Uni.
Peut-on s’attendre, dès lors, à autre chose qu’à une dégradation de la situation sur le terrain pour les Palestiniens, dans la bande de Gaza dévastée et en Cisjordanie colonisée? La réponse est non. C’est le contraire qui va se produire, et le front Trump-Netanyahu contre la Palestine devrait se confirmer le 29 septembre lorsque les deux dirigeants se rencontreront à Washington.
Le temps de la paix
Le président des Etats-Unis se sera auparavant exprimé ce mardi 23 septembre à la tribune de l’ONU, dont il a empêché l’accès au président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, en lui refusant de manière inédite un visa. Son intervention sera une réponse directe, et sans doute cinglante, au discours d’Emmanuel Macron sur la reconnaissance de la Palestine, conclu par un appel aussi vibrant que peu réaliste: «La paix est beaucoup plus exigeante, beaucoup plus difficile que toutes les guerres. Mais le temps est venu.»
Pour empêcher à l’Etat palestinien de prendre forme, l’offensive israélo-américaine est déclarée sur trois plans. Trois assauts assurés de s’aggraver encore plus dans les jours qui viennent.
L’assaut militaire
Le premier assaut est militaire et il se déroule à Gaza. Dans cette enclave où continuent de vivre deux millions de Palestiniens, et où environ 63'000 civils ont trouvé la mort depuis la riposte israélienne à l’attaque terroriste du 7 octobre 2023 menée par le Hamas, l’objectif des soldats de Tsahal est clair: détruire coûte que coûte toutes les infrastructures utilisées par le mouvement islamiste palestinien que Netanyahu a promis «d’éradiquer jusqu’à la racine».
Parallèlement, le projet est de repousser la population dans le Sud du territoire, acculée à la frontière avec l’Egypte, dans l’espoir (pour l’heure vain) que ce pays ouvre ses portes. La déportation des Gazaouis est un objectif assumé à la fois par le Premier ministre israélien et par Donald Trump. Lequel en a fait une condition préalable de son plan de reconstruction de Gaza. Les Etats-Unis viennent toutefois de convoquer une conférence internationale avec les principaux pays arabes. Qu’en sortira-t-il?
800'000 colons israéliens
Le deuxième assaut est colonialiste. Il consiste à laisser libre cours aux 800'000 colons israéliens de Cisjordanie pour harceler les Palestiniens qui, en théorie, sont chez eux dans ce territoire depuis les accords d’Oslo de septembre 1993. L’objectif, là aussi, est assumé par Netanyahu et Trump. Le premier a redit qu’il fera tout pour empêcher la création d’un Etat palestinien, et détruire politiquement la fameuse «solution à deux Etats» dont Emmanuel Macron s’est fait l’avocat à l’ONU.
Le président des Etats-Unis, lui, boycotte les dirigeants palestiniens et laisse la main libre à son ambassadeur à Jérusalem, Mike Huckabee, partisan zélé du grand Israël et de la recolonisation totale de la Cisjordanie par la force. Plus le territoire palestinien sera morcelé, plus il sera impossible de constituer un Etat digne de ce nom, a fortiori dans les frontières de 1967 qui restent celles défendues par l’ONU, avec Jérusalem-Est pour capitale. Sans parler de la destruction totale de Gaza, cet autre territoire palestinien, distinct géographiquement de la Cisjordanie.
Un Etat contrôlé par le Hamas
Le troisième assaut est politique. Il consiste à assimiler l’Etat palestinien au mouvement terroriste Hamas et à considérer que toute tentative de réhabiliter l’Autorité palestinienne, discréditée par sa corruption endémique, est un cadeau fait au mouvement terroriste palestinien et à son allié à Gaza, le Jihad islamique.
Les autorités israéliennes, qui ont jadis privilégié le Hamas pour affaiblir le Fatah de Yasser Arafat, ont deux arguments clés: les militants du Hamas restent enracinés dans la population civile au sein de laquelle ils détiennent encore prisonniers 48 otages israéliens (dont 27 présumés vivants); et aucune alternative politique crédible n’existe face aux islamistes qui réclament toujours la destruction de l’Etat hébreu.
Donald Trump applaudit à cet amalgame. Pour lui comme pour Netanyahu, un Etat palestinien serait, par définition, un Etat terroriste contrôlé par le Hamas. Face à cela, la promesse d’Emmanuel Macron d’un «démantèlement et un désarmement» du groupe islamiste «avec le soutien des partenaires internationaux et les moyens qui seront nécessaires à cette mission difficile» ressemble à un mirage.