Un défi envers l'Etat
Le drapeau palestinien sur les mairies françaises fait polémique

Publié: 20:44 heures
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La mairie de Saint-Denis, au nord de Paris, arbore le drapeau palestinien sur sa façade, à côté des drapeaux français et européen.
Photo: keystone-sda.ch
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ATS Agence télégraphique suisse

Des dizaines de mairies de gauche, dont celle de Lyon, troisième ville de France, ont fait flotter le drapeau palestinien lundi, pour marquer la reconnaissance d'un Etat palestinien par Paris, malgré l'opposition ferme du ministre de l'Intérieur. La France et plusieurs autres pays doivent reconnaître lundi l'Etat de Palestine, tentant de mettre un peu plus la pression sur Israël à l'ouverture de la grand-messe annuelle de l'ONU à New York, qui sera dominée par la guerre à Gaza.

Le sujet de la reconnaissance – essentiellement symbolique – de la Palestine divise la société comme la classe politique en France. Symbole de ce différend, des militants pro-Gaza et des élus de gauche ont déployé, contre l'avis de la maire socialiste de Paris Anne Hidalgo, un drapeau palestinien pendant une trentaine de minutes sur la façade de l'Hotel de Ville de la capitale lundi.

C'est en France que vit la plus grande communauté juive d'Europe, avec environ 500'000 personnes, en même temps que l'une des plus importantes communautés arabo-musulmanes d'Europe, très sensible au sort des Palestiniens de Gaza. Le ministère français de l'Intérieur avait donné instruction aux préfets de faire cesser tout pavoisement en vertu du principe de neutralité du service public, de non-ingérence dans la politique internationale de la France et du risque de «troubles graves» à l'ordre public.

Le ministère a recensé lundi plus de 50 municipalités, sur 34'875 communes que compte le pays. Après Nantes (ouest), Rennes (ouest), Grigny ou Saint-Denis dans la région parisienne, les mairies écologistes de Besançon (est) et Lyon (centre-est) ont hissé à leur tour le drapeau palestinien sur le fronton de l'Hôtel de ville. A Marseille (sud), deuxième ville de France, le maire de gauche Benoît Payan a pour sa part refusé de hisser le drapeau palestinien, préférant annoncer le jumelage de sa ville avec Bethléem, située en Cisjordanie occupée.

«Ce drapeau-là n'est pas le drapeau du Hamas»

Le premier secrétaire du Parti socialiste (PS), Olivier Faure, a donné consigne à ses édiles de pavoiser les mairies avec la bannière palestinienne pour marquer le coup. Il en a appelé au chef de l'Etat pour qu'il «autorise» cette initiative. En face, le ministre de l'Intérieur démissionnaire, Bruno Retailleau (Les Républicains), a enjoint les préfets de saisir la justice administrative.

Après avoir affiché sa solidarité avec Israël après les attaques sanglantes du 7 octobre 2023, le président Emmanuel Macron a depuis pris ses distances et multiplié les critiques à l'égard de la stratégie du gouvernement israélien à Gaza. A Lyon (centre-est), le maire écologiste Grégory Doucet a salué le drapeau palestinien hissé au fronton de l'hôtel de ville. «Cette reconnaissance de l'Etat palestinien n'est pas une offense faite à Israël (...). L'absence d'Etat est un terreau fertile pour tous les groupes terroristes, de Daech au Hamas», a-t-il estimé.

Plusieurs villes de la région parisienne ont fait de même, comme Saint-Denis, près de Paris, en présence d'Olivier Faure. «Ce drapeau-là n'est pas le drapeau du Hamas, il est le drapeau de femmes et d'hommes qui ont le droit, eux aussi, à la liberté et à l'autodétermination», a-t-il jugé, disant «regretter que le ministre de l'Intérieur n'ait rien trouvé de mieux que de chercher à condamner des maires qui font leur devoir de solidarité».

Brandir les deux drapeaux?

A Malakoff, la maire communiste avait précédé l'appel et apposé un drapeau palestinien dès vendredi, resté sur le fronton de l'hôtel de ville, malgré une injonction de la justice administrative, sur recours du préfet du département. Un tribunal administratif a infligé lundi à la mairie une astreinte journalière de 150 euros, jusqu'au retrait du drapeau.

Certaines villes ont érigé le drapeau palestinien et israélien, comme Saint-Ouen, dans la région parisienne. Paris a également projeté dimanche soir les deux drapeaux sur la tour Eiffel avec le drapeau de la Paix. Une décision qualifiée de «consternante de stupidité après deux ans de génocide» par le fondateur de La France insoumise (gauche radicale) Jean-Luc Mélenchon.

Des élus et représentants des Républicains et du Rassemblement national (RN, extrême droite) ont fermement dénoncé le pavoisement des mairies aux couleurs palestiniennes, demandant des condamnations ou critiquant une manoeuvre communautariste. En Italie, des dizaines de milliers de personnes ont manifesté pour «dénoncer le génocide à Gaza», lors d'une journée de mobilisation également marquée par des grèves et des blocages à l'appel de plusieurs syndicats.

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