Attention: choc générationnel! Combien de lecteurs de cet article se souviennent que le Parti socialiste fut, jadis, l’incontournable maître du jeu politique français? Combien gardent en mémoire l’image du défunt président François Mitterrand, décédé en 1996, tenant dans sa main une rose, symbole du PS et de la gauche sociale-démocrate française alors hégémonique?
Si vous n’avez pas cela en tête, alors, pas de problème: ce qui se passe au Parti socialiste peut vous intéresser. 40'000 adhérents revendiqués. Trois candidats pour le poste de Premier secrétaire, le patron du parti, dont le sortant Olivier Faure (56). Et l’hypothétique retour de cette formation aux avant-postes de la politique hexagonale. Voici, en substance, ce qui se joue à partir de ce mardi 27 mai et jusqu’au 5 juin, dans les urnes électroniques mises à disposition des électeurs socialistes.
Le problème est que le PS français, qui était encore au pouvoir entre 2012 et 2017 sous le quinquennat de François Hollande (70), est aujourd’hui l’ombre de lui-même. Son seul coup d’éclat, ces derniers mois, est d’avoir pris ses distances avec la France insoumise (gauche radicale) de Jean-Luc Mélenchon. Mais pour faire quoi et avec qui? Survolons ensemble les ruines de ce qui fut le premier parti de France.
Un parti sans militants
40'000 adhérents et électeurs! Soit trois fois moins que les 120'000 électeurs qui viennent de porter le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau (64) à la tête du parti les Républicains, héritier du RPR et de l’UMP (droite). A titre de comparaison, la France insoumise revendique 350'000 adhérents. La réalité est que le PS ressemble beaucoup plus à un club de parlementaires et d’élus locaux qu’à un mouvement de masse. Il ne pèse plus dans la population.
Un parti sans leader
Olivier Faure, l’actuel Premier secrétaire, a réussi l’impossible: tenir à la tête de cette formation politique qu’il conduit depuis 2018. Un beau parcours pour ce député de Seine et Marne, qui est avant tout un apparatchik. L’homme est doué pour les calculs, mais il n’est guère charismatique et il fait face à deux opposants: le député Boris Vallaud et le maire de Rouen Nicolas Mayer-Rossignol. Faure a toujours été un «second» face à Mélenchon, l’homme qui a failli se qualifier pour le second tour de la présidentielle 2022, raté à 400'000 voix près. Or sans leader, pas de premier rôle. Un nom peut faire la différence: celui du populaire député européen Raphaël Glucksmann. Mais il n’est pas membre du PS…
Un parti sans programme
Bien malin celui qui peut lister les propositions du Parti socialiste alors que celui-ci promettait jadis de «changer la vie». C’est le drame, on peut le reconnaître, de toutes les formations sociales-démocrates en Europe. L’heure est aux clivages et à l’outrance. La gauche radicale pèse, en France, beaucoup plus lourd dans les urnes et le PS doit ses 66 députés actuels à l’accord électoral conclu avec LFI, les écologistes et les communistes lors des législatives anticipées de juin 2024. Un programme? Il en faudra un pour ressusciter.
Un parti provincial
La force du Parti socialiste français est son ancrage dans les grandes villes de province et dans les régions. Il en contrôle plusieurs. Il est donc un agrégat de barons politiques, avant tout soucieux de garder leurs distances vis-à-vis de Paris. La capitale ne réussit d’ailleurs guère au PS, même si sa maire Anne Hidalgo en est issue. A la présidentielle de 2022, cette dernière a réalisé le pire bide de l’histoire politique socialiste: 1,7% des voix au premier tour… contre 21,95% pour Jean-Luc Mélenchon.
Un parti tué par François Hollande
C’est l’ironie absolue: le dernier président socialiste français est accusé d’avoir tué cette formation qu’il a longtemps dirigée. François Hollande redevenu député de la Corrèze en 2024, est l’ombre que beaucoup au PS préfèrent éviter, même s’il reste incontournable dans les arcanes du parti. Hollande rime, au PS, avec promesses trahies. Il jurait de mettre à genoux la finance, et sa présidence a accouché… d’un successeur nommé Emmanuel Macron, son ex-collaborateur à l’Elysée. Un sacré boulet!